L'arrestation d'un dirigeant de la mouvance talibane par le Pakistan pourrait constituer un tournant dans la position d'Islamabad envers le mouvement insurrectionnel en Afghanistan. Les médias américains avaient annoncé la capture du mollah Baradar quelques jours auparavant dans le sud du Pakistan. L'armée pakistanaise confirme. C'est des agents des services de renseignement américains et pakistanais qui auraient accompli l'opération. Les talibans avaient cependant démenti, affirmant que Baradar continuait à diriger les opérations des talibans sur le terrain. Le mollah Baradar est régulièrement présenté comme un dirigeant important des talibans afghans arrivant dans la hiérarchie juste derrière leur fondateur et chef suprême, le célèbre mollah Muhammad Omar. Son arrestation constitue sans nul doute un revers pour les talibans. Ces derniers devraient entamer des actions de vengeance. Baradar est considéré comme l'un des fondateurs du mouvement taliban. Le mollah Baradar, «de son vrai nom Abdul Ghani Baradar, était au sommet de la chaîne de commandement militaire et avait autorité sur les finances. Né dans la province d'Uruzgan dans le sud du pays, et appartenant à la tribu des Popalzai -une influente tribu pachtoune à laquelle appartient également le président Hamid Karzai-, il a d'abord combattu les Soviétiques dans les années 80 avec le soutien des Américains et des Pakistanais», selon Interpol. En septembre 1996 quand les talibans s'installent au pouvoir à Kaboul, le mollah Omar fit appel à lui. Baradar devint alors vice-ministre de la Défense. Toujours selon Interpol, le mollah Baradar, âgé de 42 ans, appartient depuis mai 2007 à la plus haute hiérarchie des talibans. Le mollah Omar l'aurait nommé chef militaire des talibans. Pour les observateurs et spécialistes, l'arrestation de Baradar constitue un revirement au Pakistan dans sa politique vis-à-vis des talibans. Il est de notoriété publique que les talibans ont, durant des périodes données de l'histoire récente, été «favorisés» par les services pakistanais, les fameux ISI, et la CIA américaine. La confirmation de la capture du dirigeant taliban par Islamabad survient alors que le président américain Barack Obama réunit son cabinet de guerre sur l'Afghanistan. Objectif : faire le point sur l'offensive à Marjah, un bastion taliban dans le sud de l'Afghanistan. Depuis samedi dernier, quelque 15 000 soldats afghans et étrangers sont engagés dans une opération d'envergure baptisée «Mushtarak», en plein cœur de la province du Helmand. Les talibans, délogés du pouvoir fin 2001 par une coalition menée par les Etats-Unis, ont considérablement intensifié leur insurrection ces deux dernières années. Aucun endroit du territoire ne semble échapper à leur emprise. Les forces étrangères comptent quelque 113 000 morts parmi les soldats. Ce qui pousse Washington à envoyer un renfort de 30 000 militaires américains et des pays de l'OTAN à ajouter 10 000 soldats. La guerre en Afghanistan semble s'enliser. M. B.