Les Etats-Unis d'Amérique sont parvenus avec beaucoup de peine à obtenir l'accord de principe pour une reprise des pourparlers entre Palestiniens et Israéliens. Toutefois, cette reprise programmée pour jeudi prochain à Washington risque d'être le seul acquis de ces deux dernières années. L'euphorie suscitée par l'annonce de la date de la reprise des négociations directes entre les deux parties par la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, le 20 août dernier, n'a pas duré longtemps. Les pourparlers qui seront repris le 2 septembre sous l'auspice des Américains, du Quartette (États-Unis, Russie, Europe, ONU), de l'Égypte et de la Jordanie, semblent d'ores et déjà compromis. L'accord final qu'ambitionnent d'obtenir les Américains d'ici un an est plus que jamais un vœu pieux. Certes, ce seront les premières négociations depuis vingt mois. Les premières depuis l'arrivée au pouvoir en Israël de Benyamin Netanyahou. Le Premier ministre israélien ne cesse de multiplier ses conditions pour la reprise des pourparlers qu'on avait annoncés, pourtant, sans préalable. Pour lui, trois conditions doivent être réunies pour parvenir à l'accord de paix tant attendu. M. Netanyahu veut avant tout obtenir des Palestiniens la reconnaissance d'Israël «comme Etat du peuple juif» mais également que l'accord mette un point final au conflit et sur des arrangements de sécurité avantageux pour Israël. Les Palestiniens veulent de leur côté un gel réel des colonies. Ce qu'ils n'ont pas obtenu malgré le moratoire temporaire sur celles-ci depuis 2009. À cet égard, Abbas a eu au moins le mérite d'être clair. «Les colonies et la paix sont deux parallèles qui ne se rencontrent pas», a-t-il précisé dans une lettre adressée récemment au Quartette. Les Israéliens ne l'entendent pas de cette oreille. La reprise de la construction dans les colonies réclamée par de nombreux ministres israéliens, notamment à El Qods, risque d'être le premier écueil majeur de ces pourparlers. Lors de la réunion hebdomadaire du gouvernement, M. Netanyahu a clairement laissé entendre qu'Israël n'accepterait pas de compromis sur les trois points à l'issue des négociations. «Notre intention est d'avancer sérieusement et de façon responsable en vue d'un accord de paix […] basé sur trois principes. Avant tout, il faut une reconnaissance d'Israël comme Etat du peuple juif et que l'accord stipule la fin du conflit», a-t-il claironné. Il estime qu'une telle reconnaissance permettrait d'exclure des «demandes supplémentaires», allusion claire à la revendication palestinienne d'un «droit au retour» des réfugiés de 1948. Pour les Israéliens, ce retour en masse de réfugiés palestiniens mettrait en péril le caractère juif des territoires occupés. Le président palestinien Mahmoud Abbas a, de son côté, déclaré dimanche dernier qu'il ferait porter à Israël l'entière responsabilité de l'échec des négociations de paix s'il reprenait la colonisation en Cisjordanie occupée et à El Qods Al Charqiya. «Je dois vous dire aujourd'hui, en toute clarté et franchise, ce dont nous avons informé toutes les parties, y compris le parrain américain des négociations avant d'accepter d'y participer, que le gouvernement d'Israël assumera l'entière responsabilité du risque d'échec et d'effondrement des négociations si les activités de colonisation continuent dans l'ensemble des territoires palestiniens occupés en 1967», a-t-il déclaré. M. Abbas s'exprimait dans une allocution diffusée par la télévision officielle palestinienne, à quelques jours de la reprise le 2 septembre à Washington des négociations directes avec Israël, interrompues depuis 20 mois. Le texte de l'accord doit comporter, selon lui, «la nécessité de mettre fin à l'occupation qui dure depuis 1967, la non-reconnaissance de l'annexion d'El Qods Al Charqiya ou de toute mesure visant à modifier le caractère de la ville, la nécessité d'établir un Etat palestinien indépendant et viable, et le refus de la colonisation, y compris ce que l'on appelle la croissance ‘'naturelle''» dans les colonies. «Nous nous rendons à ces négociations, armés de ces positions et engagements et nous n'en dévierons pas. Nous allons mettre toutes les parties sans exception devant leur responsabilité de s'y conformer et de les appliquer, si elles veulent vraiment parvenir à une paix viable et solide», a-t-il dit. Les trois dossiers inextricables Trois questions majeures sont au cœur des négociations israélo-palestiniennes depuis la tentative avortée de Camp David en 2000 : les frontières, les réfugiés et le statut d'El Qods.Les frontières semblent être le dossier le plus simple. La Ligne verte, ligne de démarcation entre la Jordanie et Israël entre 1949 et 1967, est théoriquement considérée comme la future frontière entre Israël et l'État palestinien. Sur le terrain, la construction des colonies, qui s'est largement développée après la signature des accords d'Oslo, complique beaucoup plus les choses. Pas moins de 280 000 Juifs vivent, aujourd'hui, dans 121 colonies et 190 000 sont installés à El Qods-Est. Le principe d'échanges de territoires est acquis. Il s'agit de permettre aux populations des grands blocs de colonies, essentiellement autour d'El Qods, de ne pas être évacuées en contrepartie de quoi Israël donnerait aux Palestiniens des terres d'une surface équivalente. Vient ensuite la question des réfugiés palestiniens. Le retour de ces réfugiés est quasiment inconcevable pour les sionistes car cela, expliquent-ils, signifierait la disparition de l'État sioniste implanté dans la région. Les réfugiés palestiniens qui étaient au nombre de 750 000 en 1950 sont 4,7 millions aujourd'hui avec leur descendance. D'où la condition de Netanyahou pour que les Palestiniens reconnaissent «Israël comme l'État du peuple juif».Vient enfin l'éternel problème d'El Qods. Ville sainte pour les trois religions monothéistes, El Qods reste difficile à départager. Elle symbolise l'imbrication du politique et du religieux, partie intégrante de ce conflit depuis sa naissance. Le problème essentiel est, certes, celui de la vieille ville, El Qods Al Charqiya. L'enjeu est celui de la souveraineté politique, mais aussi celui du libre accès aux différents lieux de culte. Revenir aux frontières de 1967 ne signifie rien de moins que la mise d'El Qods sous l'autorité palestinienne. Ce que réfutent les Israéliens qui ne veulent même pas le compromis d'une ville sous autorité internationale. Les chances de paix peuvent-elles alors être de mise ? Rien ne semble être plus compromis que des pourparlers qui augurent d'ores et déjà un dialogue de sourds. G. H.