Avec cent trente trois milliards de dollars de réserves de changes et une dette ramenée à six cents millions de dollars, l'Algérie vit-elle dans l'opulence ? Est-elle un pays riche ? L'Algérie reste dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire. L'argent dont elle dispose suscite cependant des convoitises et des débats (fonds souverains). En transition économique, le pays est en train d'investir massivement dans les infrastructures, misant sur le capital public. Seulement, cette manière de faire ne semble pas agréer à certains, suscitant des grincements de dents. Les partisans d'un libéralisme outrancier veulent moins d'Etat dans l'économie, moins de dépenses publiques. Les dépenses publiques, le président de la République, dans son intervention devant le Conseil des ministres, la semaine dernière, y a fait allusion. Le chef de l'Etat a parlé des importations qui se sont «dangereusement emballées» ces dernières années. Il a également mis en exergue le fait que les chantiers qui n'ont pas été achevés coûtent cher à l'Etat. Le paradoxe est qu'il ait des ministres qui demandent des rallonges budgétaires pour des projets qu'ils n'arrivent pas à terminer dans les délais de rigueur. Est-ce normal ? Le gouvernement travaille depuis deux ans à l'élaboration d'une loi destinée à contrôler l'argent public. C'est un nouveau cadre dans lequel le Parlement pourra avoir de la marge, contrôler les dépenses budgétaires de l'Etat et superviser l'exécution des lois de finances. Le pouvoir législatif aura ainsi, et ce sera une première, des «comptes rendus» rigoureux sur toutes les dépenses, les budgets des différents organismes publics ainsi que les lois de finances. Cette loi en projet aujourd'hui institue en fait des mécanismes qui permettent la modernisation de la gestion des finances publiques, un instrument qui faisait défaut jusque-là. Elle instaure une contractualisation des rapports entre les organismes publics et l'Etat. C'est la consécration d'une réforme structurelle des finances publiques, des systèmes budgétaires modernes mais également des systèmes d'information et d'informatique ayant trait à la gestion des dépenses de l'Etat. C'est une évolution assez conséquente en matière de contrôle des finances publiques. C'est, en résumé, une nouvelle législation qui vise à gérer au mieux les comptes de l'Etat et à recadrer les allocations de crédits budgétaires. Dans le droit fil des réformes sur le budget et l'argent public, les entreprises étatiques seront désormais sous la surveillance de l'Inspection générale des finances (IGF), une institution de contrôle qui ne s'occupait jusque-là que des administrations et des offices publics. C'est une nouvelle réforme opérée dans la sphère financière. Comporte-t-elle de l'efficacité, de la rigueur ? A priori oui. On dit que ces nouvelles règles sont de nature à conférer de la transparence à la gestion des deniers publics, des marchés publics, a fortiori dans une conjoncture marquée par une aisance financière jamais égalée. Revoir et corriger le rôle de l'IGF semble «épouser» une démarche globale dont les contours annonciateurs ont été dévoilés dans le cadre de la loi en projet sur la modernisation du budget de l'Etat sus-évoquée. L'IGF n'a pas pour l'instant mandat pour contrôler les entreprises publiques. Pour qu'elle puisse le faire, elle doit attendre le vote d'un projet de loi relative à l'organisation, à la gestion et à la privatisation des entreprises publiques économiques. Y. S.