DEAUVILLE (France) - La Tunisie et l'Egypte révolutionnaires ont reçu vendredi, au G8 de Deauville (France), la promesse d'une aide économique pour soutenir le "printemps arabe", tandis que la Russie s'imposait en médiateur potentiel dans le conflit libyen. Moscou s'est pour la première fois rallié vendredi à la position des occidentaux, en signant une déclaration du G8 appelant au départ de Mouammar Kadhafi. "Oui, nous sommes prêts à l'admettre... il doit partir", a déclaré le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov. "Kadhafi et le gouvernement libyen ne sont pas parvenus à assumer leur responsabilité de protection du peuple libyen et ont perdu toute légitimité. Il n'a pas d'avenir dans une Libye libre et démocratique. Il doit partir", dit très nettement la déclaration finale du G8. Mais Moscou espérait aussi, à Deauville, avoir gagné un rôle de premier plan dans les efforts de résolution de la crise libyenne. Plusieurs responsables russes ont fait savoir que Barack Obama et Nicolas Sarkozy avaient approché le président russe Dmitri Medvedev pour qu'il tente une médiation dans le conflit. "Ils l'ont demandé. Aussi bien Obama que Sarkozy", a assuré devant la presse le haut représentant russe pour l'Afrique, Mikhaïl Margelov. La Russie s'est aussi empressée de préciser que la situation de la Libye était très différente de celle de la Syrie, dont Moscou reste l'un des principaux soutiens, en dépit de la répression des manifestations contre le régime du président Bachar al-Assad. La Libye et la Syrie sont vues comme les Occidentaux comme un obstacle potentiellement mortel à la propagation de l'esprit des révolutions tunisienne et égyptienne que le G8 veut encourager par une aide économique. C'était l'objet de la séance de travail de vendredi matin, à laquelle étaient conviés les Premiers ministres de Tunisie, Béji Caïd Essebsi, et d'Egypte, Essam Charaf. "Ce que le président Sarkozy a annoncé, c'est un package global de 40 milliards de dollars pour la région. Ce package n'a pas été décliné par pays", a déclaré le ministre tunisien des Finances, Jalloul Ayed. Avant d'arriver à Deauville, l'Egypte et la Tunisie avaient chiffré leurs besoins: Le Caire a besoin de 10 à 12 milliards de dollars d'ici à mi-2012 et a déjà appelé à l'aide le Fonds monétaire international (FMI); Tunis a chiffré ses besoins à 25 milliards de dollars sur cinq ans. Ces deux pays sont particulièrement frappés par la chute de la fréquentation touristique et une croissance proche de zéro. L'aide promise par le G8 devrait être constituée essentiellement de prêts des organisations financières internationales, Fonds monétaire international (FMI) et Banque mondiale en tête. La Banque européenne d'investissement (BEI), institution de financement à long terme de l'UE, mais aussi la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd), qui réorientera ses actions vers les bords de la Méditerranée, seront sollicités. Mais pour le G8, il s'agit aussi de promouvoir la démocratie plus au sud du continent africain. Alassane Ouattara (Côte d'Ivoire), Alpha Condé (Guinée) et Mahamadou Issoufou (Niger), qui viennent d'accéder au pouvoir au terme de parcours démocratiques jugés exemplaires par la France, ont aussi été conviés à Deauville par le président français Nicolas Sarkozy. Outre la reconnaissance de leurs mérites, ces pays espèrent eux aussi une aide sonnante et trébuchante du G8. "La Côte d'Ivoire a besoin de 15 à 20 milliards d'euros pour les cinq prochaines années", a ainsi déclaré vendredi Alassane Ouattara, avant de rencontrer les leaders du G8. Son pays vient de traverser 5 mois de violences post-électorales, et a un urgent besoin de relancer son économie pour aider à la réconciliation nationale. Le G8 a signé une déclaration commune avec plusieurs pays africains, dont le Sénégal, l'Algérie, l'Ethiopie, l'Afrique du Sud, se félicitant des progrès démocratiques sur le continent et appelant un renforcement de la lutte contre "terrorisme", piraterie et trafics.