L'année 2011 s'achève sur fond de crise économique généralisée en Europe où les conséquences sont lourdes. Elles le seront encore davantage en 2012 dont les perspectives de croissance s'annoncent sombres notamment pour les géants économiques du Vieux continent. L'accélération de la crise et sa propagation dans la zone euro font en effet craindre le pire. Chaque pays tente de se prémunir de cette crise. Si certains n'ont pas trouvé d'autre choix que de recourir à l'aide des institutions financières internationales, à l'image du Fonds monétaire international (FMI), d'autres ont opté pour les mesures protectionnistes comme ce fut le cas lors de la crise de 2008. A la faveur de cette crise, la question du protectionnisme revient avec force sur le devant de la scène internationale. Confrontés à un afflux d'importations bon marché, certains pays ont relevé leurs tarifs douaniers, une mesure protectionniste classique, afin de protéger leurs productions locales. Mais, les réactions n'ont pas tardé à suivre.D'ailleurs, la décision récente du Brésil de relever de 30% les taxes douanières sur tous les véhicules qui ne sont pas fabriqués à au moins 65% dans les pays du Mercosur a suscité des mécontentements. De même, les nouvelles taxes douanières sont également appliquées sur certains véhicules américains.Ce retour au protectionnisme commence à inquiéter sérieusement. Le directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), Pascal Lamy, n'a pas manqué d'afficher cette inquiétude. M. Lamy a indiqué dans ce cadre que le coût «de mesures protectionnistes importantes» pourrait s'élever à environ 800 milliards de dollars. «Votre tâche est de contribuer à restaurer un climat de confiance», c'est «une partie de la solution à la crise actuelle», avait-il noté le 15 décembre dernier à l'adresse des 13 ministres du commerce réunis à Genève. Et de poursuivre : «Nous sommes à la croisée des chemins, soit le système continue dans la voie du multilatéralisme, soit il s'arrête, et ce sera une défaite.»C'était à l'occasion de la 8e Conférence ministérielle de l'OMC, une rencontre durant laquelle les participants ont fortement dénoncé «cette solution du retour au protectionnisme». «Il y a des signes de protectionnisme un peu partout dans le monde aujourd'hui [...], mais ce serait la pire des réponses à la situation économique actuelle», avait déclaré à ce sujet le président de cette conférence, le ministre nigérian du Commerce Olusegun Aganga.Par la même occasion, il avait exhorté les 153 ministres du Commerce présents à la réunion à ne pas perdre de vue le fait que les règles de l'OMC ont pour but d'empêcher que les pays retombent dans une dépression comme dans les années 1930, provoquée précisément par des mesures protectionnistes.«Ce qui est le plus important, c'est que vous, ministres du commerce, envoient un message clair selon lequel l'ouverture (des marchés) est particulièrement importante dans une situation économique comme nous la connaissons aujourd'hui», avait-il noté.Pour les experts, la situation suscite réellement de l'inquiétude. D'où la nécessité de freiner cette vague de mesures protectionnistes. Ils avaient déjà averti en 2008 et en 2009. «Le protectionnisme s'est déplacé du terrain commercial vers le domaine financier», estime à ce sujet l'économiste français, Jacques Sapir, selon lequel la situation actuelle se résume en une «guerre des monnaies entre le dollar, l'euro et le yuan». «Une dépréciation monétaire permet en effet de bénéficier d'un avantage compétitif dans la conquête des marchés», dira-t-il avant de relever que l'autre forme de protectionnisme financier concerne les mouvements de capitaux transfrontaliers. Il expliquera à ce sujet que de nombreux pays ont introduit de nouvelles réglementations sur les entrées de capitaux à l'exemple de l'Indonésie, la Thaïlande, le Brésil et la Corée du Sud.S'ajoutent à cela d'autres mesures visant à surveiller les investissements étrangers.«Si ces initiatives devaient se multiplier, nous entrerions dans une nouvelle phase de protectionnisme, ce qui serait tout à fait dommageable, ainsi que l'a montré l'expérience historique de 1929», avertit l'économiste appelant l'OMC à jouer son rôle d'arbitre dans cette situation en faisant respecter les règles du libre-échange. Mais est-ce possible dans la situation actuelle ? C'est là le cœur du débat. S. I.