La Ligue arabe a annoncé lundi dernier que les ministres arabes des Affaires étrangères, qui se réuniront aujourd'hui, procéderont à l'élaboration d'un plan politique d'urgence pour arrêter l'agression israélienne contre Ghaza et relancer la construction des différentes infrastructures notamment sanitaires. Cette réunion, qui se tiendra après cinq jours d'agression et plus de 370 morts, devra permettre, à en croire le secrétaire général adjoint aux affaires palestiniennes, M. Mohamed Sbih, de dégager un nombre de décisions, dont «l'arrêt immédiat de l'agression contre la population de Ghaza et l'acheminement de l'aide humanitaire à celle-ci». Quel est le procédé miracle que les pays membres de la Ligue arabe suivront-ils pour réussir à arrêter «immédiatement» l'holocauste qui se poursuit dans l'impunité la plus totale ? Si cette manœuvre est possible, la question qui s'impose alors est celle de connaître les raisons de l'apathie pour ne pas dire l'inertie que cette organisation enregistre depuis le début de l'agression ? M. Sbih avait appelé à «l'unification de la position arabe face à cette situation». Une demande difficile à concrétiser sachant que la tenue d'un sommet arabe vendredi prochain à Doha n'est même pas acquise. L'adage qui dit que «les Arabes se sont mis d'accord pour ne pas être d'accord» est assurément approprié dans cette situation. L'Egypte, qui a fermé ses frontières à des Palestiniens meurtris, n'est pas favorable à la tenue d'un tel sommet. Selon le chef de la diplomatie égyptienne, «la tenue du sommet peut être dangereuse et critiquable surtout si cela n'aboutit pas à des mesures pratiques». Que peuvent attendre les civils qui sont massacrés quotidiennement dans la bande de Ghaza d'un tel sommet ? Il leur a sûrement suffi d'entendre le secrétaire général de la Ligue arabe, M. Amr Moussa, qui a appelé les Palestiniens «à prendre immédiatement la décision politique de réaliser la réconciliation […] à aller au dialogue». Courageuse position que celle de Amr Moussa mais qui reste non explicite surtout si l'on tient compte de la dernière déclaration du Premier ministre israélien, Ehud Olmert : «L'offensive en cours d'Israël dans la bande de Ghaza contre le Hamas est la première phase parmi plusieurs.» Qu'attendre donc des chefs d'Etat arabes à part les dénonciation, condamnation, peine et désolation habituelles ? Les actions émanent, malheureusement, des peuples arabes qui, faute d'avoir le pouvoir de décision, n'ont pas manqué de mettre la pression -sans succès- sur leurs gouvernants. De Beyrouth à Khartoum, des milliers de manifestants sont dans les rues depuis samedi dernier pour crier leur indignation face aux raids israéliens, mais aussi leur colère contre des dirigeants arabes qualifiés de «traîtres» et de «complices» des assaillants. A Damas, Amman, Doha, Sanaa, Rabat, Baghdad, Le Caire, les mêmes scènes se répètent : drapeau israélien brûlé, régimes arabes qualifiés de «collaborateurs» et appel au djihad. Les politiques, eux, semblent avoir tout le temps pour se réunir. Pourquoi se presser ? Même les chefs d'Etat des monarchies pétrolières du Golfe, qui ont appelé hier à un arrêt des attaques israéliennes dans la bande de Ghaza et à une protection internationale du peuple palestinien, au terme de leur sommet annuel à Mascate, préfèrent la parole à l'acte. De l'inquiétude, ils en expriment mais sans plus. Et dire que les chefs d'Etat des monarchies pétrolières du Golfe peuvent avoir plus d'un tour dans leurs mains pour faire pression sur l'agresseur et ses alliés. Il apparaît, aujourd'hui, clairement que le camp des uns et des autres est choisi : les régimes arabes sont dans un camp et leurs peuples dans un autre. Pour l'Egypte, les dés sont jetés et les choix faits : le terminal frontalier de Rafah restera fermé, Tsahal peut poursuivre son massacre. H. Y.