La rencontre avec les pêcheurs européens a été houleuse, mais la Commission européenne est restée inflexible : la pêche au thon rouge est interdite. Les ministres de la Pêche de l'UE ont eux aussi leur mot à dire...Ils l'ont démontré dans une rencontre hier. La Commission européenne n'a pas donc fléchi : la pêche au thon rouge en Méditerranée et en Atlantique est bel et bien stoppée. La population est au plus bas. Et les quotas ont déjà été atteints. Les avis des pays de l'UE divergent ne sont pas tous d'accord sur la question de fermeture de la pêche au thon.L'Espagne s'est clairement démarquée hier mardi. "Il n'y a aucun problème pour fermer la pêche en Espagne" car les quotas nationaux sont atteints, a affirmé à la presse la ministre espagnole de la Pêche, Elena Espinosa. Madrid a, il est vrai, obtenu une semaine de plus de pêche que la France et l'Italie. Quant au Portugal, son ministre Jaime Silva a aussi pris ses distances en soulignant que la polémique sur la pêche au thon concernait "principalement la France". Plus au nord, la ministre néerlandaise Gerda Verburg a estimé que la décision de Bruxelles était "nécessaire", arguant que la sauvegarde de l'espèce était de la responsabilité de l'Union européenne. Seule l'Italie, également visée par l'interdiction, soutient la position française.Face à ce front du refus qui s'étiole, même la France semble avoir mis de l'eau dans son vin. En arrivant à la réunion, le ministre français de la Pêche, Michel Barnier, a reconnu que l'interdiction proclamée mi-juin par Bruxelles ne pouvait plus être remise en cause malgré la colère des thoniers français. Il a néanmoins fait état d'"une incompréhension sérieuse" face à cette décision "brutale". Une colère pour l'honneur, donc. Par ailleurs, la bataille autour du thon rouge de Méditerranée risque d'affecter le Japon, premier consommateur de thonidés du monde. Mais elle touchera surtout la minorité de Japonais qui consomment le thon de meilleure qualité. Le prix des thons, quelle que soit l'espèce, a augmenté de 20 % depuis mars, se plaignent les restaurants de sushis (boulettes de riz surmontées d'une tranche de poisson cru) autour du marché aux poissons de Tsukiji, à Tokyo. Chaque jour, 2 300 tonnes de produits de la mer, dont des thons dodus, congelés dans leur linceul de givre, transitent sur ce marché. La hausse du prix du thon est due à celle du carburant. En juillet, un quart de la flotte japonaise restera à quai. Le Japon consomme chaque année près d'un quart des 2, 5 millions de tonnes de thon pêché à travers le monde, et il en importe les trois cinquièmes. Il dispose de gigantesques entrepôts où sont stockés 60 000 thons congelés venant de l'Atlantique, de l'océan Indien et du Pacifique. L'étiquetage est l'une des mesures du plan de réglementation mondiale de la pêche au thon adopté à Kobe en janvier 2007. L'envolée de la consommation de thon au Japon, phénomène relativement récent, est due à plusieurs facteurs. Le sushi s'est développé au début du XIXe siècle à Edo (ancien nom de Tokyo) et, longtemps, les Japonais ont préféré la bonite. Avec la modernisation, le thon est devenu un mets de choix.Néanmoins, les Japonais ne sont plus les seuls responsables de la surexploitation des thons. L'engouement pour la cuisine japonaise dans le reste de l'Asie riche a popularisé le poisson cru et créé une demande. En particulier pour le thon, dont la chair rouge - couleur symbole de la fortune dans le monde chinois - est devenue un signe de prospérité. Les groupes nippons sont entrés avec appétence sur ce marché.