Gérer c'est prendre le risque. C'est dire aussi que la frontière entre la faute pénale et la faute de gestion n'est pas claire. L'Algérie fait, cependant, face à deux éléments, notamment dans le cadre de la mondialisation. La connaissance et la réactivité. La première consiste, selon Nana Ahmed, président de l'association des ressources humaines, qui intervenait, avant-hier, à l'émission hebdomadaire économique de la Chaîne III de la Radio nationale, à connaître le marché ainsi que ses concurrents. Une veille stratégique qu'il faut développer. Selon lui, beaucoup d'entreprises développent cette veille au départ à fonds perdus. C'est-à-dire qu'ils investissent pour cette connaissance mais ils ne la rentabilisent que bien après. En ce qui concerne, en revanche, le deuxième élément, la réactivité, une entreprise doit, selon le président des RH, doit absolument être en mesure de répondre immédiatement aux exigences du marché. Ces deux attitudes d'un responsable d'une entreprise nécessite, en effet, une flexibilité dans la prise de décision, que ce soit vis-à-vis de son assemblé générale ou de son conseil d'administration que sur le plan de l'investissement. Or, le problème qui se pose, c'est dans quelle mesure peut-on donner une liberté de gestion au manager sans remettre en cause effectivement l'encadrement juridique qui est absolument nécessaire. Surtout quant on sait que le risque management existe sur plusieurs plans. Il n'existe pas exclusivement sur le plan pénal, mais en terme de gestion, il pèse sur l'efficacité de l'entreprise par rapport à des actions qui sont engagées, mais aussi, au risque qui a été pris. Pour Me Brahimi, avocat, le droit des affaires serait très en retard. Des pans entiers du droit des affaires n'ont pas connu d'avancée en Algérie. La procédure de sauvetage des entreprises en difficulté, par la technique du redressement judiciaire, n'existe toujours pas en droit algérien. Sur le plan juridique, l'avocat souligne que "l'État n'assume pas la protection qu'il doit aux gestionnaires, notamment publics. L'Algérie est en train de sortir d'une gestion collectiviste de l'économie nationale qui s'est accompagnée par cette pénalisation de l'acte de gestion qui est consubstantiel à l'économie dirigée et à l'économie administrée" souligne-t-il. Les pouvoirs publics veulent contrôler le secteur économique par la justice. Selon lui, c'est une erreur fondamentale qui a conduit à une déviation totale des textes de loi qui en eux-mêmes sont correctes. "Ce qui nous pousse à dire que c'est n'est pas un problème de textes mais de leurs applications", dira-t-il. Plus précis, Me Brahimi dira que l'acte de gestion n'a rien à voir avec le contrôle de la justice. Ce que la loi veut protéger c'est la corruption, le vol, le détournement, et lorsqu'une personne est coupable d'une corruption active ou passive, elle doit être sanctionnée quel que soit son poids dans l'entreprise. Sorti de ces actes flagrants, la justice ne devrait pas, selon l'avocat, se mêler des actes de gestion. Il citera l'exemple de Sider, avant d'évoquer ses cadres incarcérés dans des prisons pour des fautes de gestion qui, selon lui, n'ont, " rigoureusement ", rien à voir avec la sanction judiciaire. N'empêche que ce dernier s'oppose catégoriquement à la dépénalisation de l'acte de gestion. Tout en reconnaissant le risque de gestion en Algérie, Me Brahimi estimera que "L'infraction pénale ne peut naître que de la commission d'actes d'escroquerie, de détournements et de corruption". Selon lui, cette situation (la pénalisation de l'acte de gestion) encourage les dirigeants des entreprises à une attitude de refus systématique du moindre risque de gestion.