Nous allons franchir le passage d'une année à une autre, mais sans grand enthousiasme, pour ne pas dire sans aucun enthousiasme. Sur le plan national, le réveil est brutal, après que nous eûmes cru que la croissance du cours du baril de pétrole ne se casserait pas le nez, certains, et non des moindres, nous promettant un baril à 200 dollars. Le réveil est dur car il nous a été fait oublier que nous devions "nous retrousser les manches" après une abondance de réserves en devises qui avait fini par nous faire croire qu'il est possible et même faisable de nous développer en important tout. Le réveil est certainement dur quand nous découvrons que nos entreprises ont peur même de notre adhésion à la zone arabe de libre-échange et on s'étonne ainsi que nos entreprises se demandent ce qui va bien leur arriver dans cette guerre économique qui s'annonce sous des slogans de générosité, tels que réaliser la prospérité, développer des échanges commerciaux qui assurent le développement, qui réduisent la pauvreté dans le monde, alors qu'il s'agit d'une guerre qui va remplacer la guerre militaire en jouant le même rôle. Ce ne seront pas des armées étrangères qui vont occuper notre territoire mais des produits étrangers qui vont inonder notre marché et qui ne vont laisser nulle place aux produits made in Algéria. Nos industries ne vont pas être détruites par des bombardements mais fermées car ne pouvant supporter la concurrence des entreprises étrangères. N'est-ce pas que le résultat est le même, avec une différence surtout, à savoir qu'après une guerre militaire nous pouvons tout reconstruire au retour de la paix alors que la guerre économique ne finit pas pour nous permettre de respirer et reprendre à la case départ notre développement. Sur le plan international, bien des promesses nous ont été faites à nous, pays en éternelle appellation de pays en développement, et que de concepts furent inventés pour " moraliser " la mondialisation, tels que prospérité partagée, échanges favorisant le développement, réduisant la pauvreté, fin de l'ordre international de la misère, équilibres budgétaires. On nous avait promis qu'avec les réformes, si on acceptait d'aller vers les réformes, il nous serait très possible, nous pays du Sud, d'acquérir rapidement la capacité à affronter les économies développées, alors que les pays riches du Nord s'étaient préparés à ce combat depuis très longtemps et selon les règles du jeu définies par eux-mêmes. Faudrait-il continuer à croire en les vertus de l'OMC où furent promus de tels slogans alors qu'absolument rien pour le moment n'indique que de tels discours contiennent une part de crédibilité. C'était une idée bien généreuse que de s'engager à lier obligatoirement les échanges commerciaux à la réduction de la pauvreté. Ce n'est pas l'avenir des promesses qui compte, mais les effets d'annonce dans un contexte de contestations par la société civile internationale de la mondialisation dont le mode d'emploi est défini par des "puissants " et au service de leurs seuls intérêts. Les institutions qui régulent les relations internationales sur le plan des échanges et sur le plan des finances sont bien entre des mains des puissances occidentales, pour ne pas dire celles de l'alliance. Le président Bouteflika avait bien eu la franchise de dire que la mondialisation nous a été imposée et cet aveux sincère place encore plus les pays du Sud dans la situation où d'une part, ils doivent comprendre qu'ils devraient y aller en rangs serrés, solidaires, et que d'autre part, ensemble, avec la mise en commun de leurs complémentarités, ils devraient d'abord renforcer la coopération entre eux, s'aider mutuellement dans les efforts de développement afin de diminuer leur vulnérabilité. Comment affronter des pays qui violent eux-mêmes les règles qu'ils ont mises en place en finançant leur industrie et leur agriculture et qui nous demandent de ne pas le faire pour notre économie ? Que pourront faire nos entreprises face aux multinationales ?