Comme bon nombre de pays en voie de développement, l'Algérie forme des élites, mais n'arrive pas à les conserver sur son sol faute de marché national qui ne répond pas à leurs désirs ou rêves, en termes notamment de développement des ressources humaines. Selon un rapport du Conseil national économique et social (Cnes), plus de 70 000 diplômés universitaires ont quitté l'Algérie entre 1994 et 2006, provoquant pour la nation un manque à gagner de 10 milliards de dollars par an. 10 000 médecins ont posé leur plaque en France, alors que 90.000 PME et PMI françaises seraient dirigées par des Algériens. Plus de 18 000 titulaires d'un diplôme universitaire travaillent aujourd'hui, dans des campus américains, selon la même source. Pour Ahmed Guessoum, le premier responsable de cette hémorragie est l'Etat algérien qui ne sait pas prendre en charge ses jeunes élites et ne leur concède pas une liberté d'initiatives indispensable pour l'épanouissement de leurs capacités. Privés de débouchés et de perspectives de carrières dans leur propre pays, les "cerveaux" algériens n'ont d'autre choix que de s'expatrier sous d'autres cieux plus cléments en termes d'offres d'emplois et de carrières. Ainsi, les étudiants formés dans l'Institut algérien du pétrole (IAP) et l'Institut national des hydrocarbures (INH) ne trouvent pas de débouchés, dit-il, sur leur sol, alors que la compagnie nationale recrute des cadres étrangers. La fuite des cerveaux n'est donc pas une simple vue d'esprit, mais une vraie hémorragie pour l'économie nationale qui n'arrive pas à ouvrir de nouvelles perspectives, a-t-il ajouté, en termes de recrutement selon les compétences exigées par les offres d'emploi publiées. Or, le marché international des compétences s'organise et cible les jeunes compétences marginalisées dans des pays en voie de développement pour accaparer ces ressources humaines en offrant des postes de travail selon les exigences et souhaits des candidats à l'émigration de luxe. Une nouvelle forme de conquête des nouvelles compétences issues de l'ex-bloc du Tiers-monde s'organise ainsi à l'échelle planétaire.