Le 20 janvier dernier, le ministre des Finances, Mohamed Djellab, a annoncé, lors d'une audition devant la commission des affaires économiques et financières au Conseil de la nation, qu'une nouvelle démarche était en cours d'élaboration au niveau du gouvernement visant à donner "un aspect économique et commercial" au service public au lieu de "l'aspect social" qui "alourdit la charge du Trésor public en raison de l'importance des subventions" destinées aux transferts sociaux lesquels, selon lui, représentent 30% du PIB annuellement. Et au ministre de préciser que le citoyen doit payer dans un hôpital public. La réaction du Dr Mohamed Bekkat Berkani, président de l'Ordre des médecins, qui était, hier, l'Invité de la rédaction de la radio Chaine 3, est très significative dans la mesure où il s'oppose à la proposition de remettre en cause la gratuité des soins. "Je ne crois pas que l'Etat algérien puisse se départir, un jour, de la gratuité des soins. Il y a des pays plus libéraux que nous, mais ils ont gardé ce système social de santé", a-t-il déclaré. Le président de l'Ordre national des médecins, Mohamed Bekkat Berkani, a insisté mercredi sur la nécessité de maintenir la gratuité des soins médicaux, tout en se prononçant pour une "redéfinition" de la complémentarité entre les secteurs public et privé dans le domaine de la santé. Il faut rappeler que le ministre des Finances avait précisé au mois de janvier dernier qu' "A l'avenir, le citoyen paiera ce qu'il doit payer dans un hôpital public (en contrepartie de ses soins) ou bien son loyer pour le logement public (...). Chacun doit assumer ses responsabilités", a souligné le ministre, précisant que l'Etat veillera à ce que les subventions "soient réservées progressivement aux couches défavorisées". "Nous n'allons pas abandonner ces couches (défavorisées), mais nous devons les préparer à l'insertion économique (...). Mais il viendra le jour où nous devrions rationaliser l'intervention sociale du gouvernement", a ajouté le ministre. Saisissant donc l'occasion de son passage à la radio chaine III, hier, M. Bekkat Berkani a plaidé pour que l'Etat maintienne la gratuité des soins et pour que les missions de chaque intervenant dans le secteur soient "mieux définies". "Il faut redonner cette sacralité à l'hôpital public, qui doit être ouvert à tout le monde", a déclaré M. Berkani, estimant qu'il était "important" de "redéfinir" la place du privé dans le système national de santé. S'agissant des prix des prestations de soins jugés "excessivement chers" dans les cliniques privées, il s'est montré favorable pour une révision de la réglementation en vigueur en ce qui concerne le niveau de remboursement, une phase dans laquelle intervient la sécurité sociale. C'est ainsi qu'il appelle, toutefois, à l'amélioration des prestations. "Il faut faire des comptes pour savoir pourquoi nous injectons autant d'argent et qu'au bout du compte on n'a pas le rendement ?… Si on a des prestations budgétivores, comme la restauration, il faut essayer de les rentabiliser" D'autre part, le président de l'Ordre des médecins estime que les prestations de soins et les conditions d'accueil dans les hôpitaux publics restent "en deçà des efforts et des moyens consentis", avant de juger "nécessaire" le rétablissement de la confiance entre le citoyen et le système national de santé. Il a, en outre, exhorté les pouvoirs publics à accélérer le rythme de réalisation des nouveaux centres hospitalo-universitaires, afin de réduire la pression sur les établissements existants. Pour le Dr Bekkat Berkani, la refonte du système de santé doit passer par "l'injection de plus de moralité dans la profession des médecins et l'amélioration de leur situation sociale", par "résolution du problème de gestion des hôpitaux en redéfinissant les missions des gestionnaires" et par "la construction dans les plus brefs délais de nouveaux hôpitaux". Revenant sur le travail complémentaire des médecins publics chez le privé (le temps complémentaire), désormais soumis à autorisation, le Dr Bekkat Berkani a qualifié la décision du ministère de positive, car, estime-t-il, "cette situation a contribué à diminuer l'efficacité du service public". L'invité de la Chaine 3 demande, par ailleurs, la légalisation définitive de cette loi et de prévoir des mesures compensatoires pour les médecins exerçant dans le service public. Enfin et au sujet de médicaments, le Dr Mohamed Bekkat Berkani, a mis en évidence l'"importance capitale" de l'Agence nationale du médicament, qui n'est pas encore opérationnelle.