La possibilité d'un accord sur le TTIP s'éloigne encore un peu plus: la France a annoncé mardi qu'elle demanderait à la Commission européenne d'"arrêter" les négociations sur ce vaste projet de traité de libre-échange entre l'UE et les Etats-Unis, les jugeant trop favorables aux Américains, afin qu'elles puissent repartir ultérieurement "sur de bonnes bases". "Il n'y a plus de soutien politique de la France" aux discussions sur ce traité entre l'UE et les Etats-Unis, et "la France demande l'arrêt de ces négociations", a déclaré le secrétaire d'Etat au Commerce extérieur Matthias Fekl, au micro de la radio RMC. Le dirigeant a justifié cette demande par le fait que les négociations, qui sont menées, côté européen, par la Commission européenne au nom des 27 Etats membres, souffraient d'un déséquilibre en faveur des positions américaines. "Les Américains ne donnent rien ou alors des miettes (...), ce n'est pas comme ça qu'entre alliés on doit négocier", a-t-il indiqué, ajoutant que "les relations ne sont pas à la hauteur entre l'Europe et les USA, il faut reprendre plus tard sur de bonnes bases". "Il faut un coup d'arrêt clair et définitif à ces négociations pour repartir sur de bonnes bases", a encore argumenté M. Fekl. La France exprimera cette position en septembre, lors d'une réunion des ministres chargés du commerce extérieur à Bratislava, a-t-il précisé. "C'est une très bonne chose", a immédiatement réagi sur France 2 l'ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg, candidat à la présidence en 2017. M. Fekl n'a pas précisé à quelles conditions ces négociations pourraient repartir, ni à quelle date. Mais alors que le président américain Barack Obama espère officiellement les conclure avant la fin de son mandat, tout laisse entendre que la question sera réglée par son successeur à la Maison blanche, début 2017. Les deux principaux candidats à la présidence, la démocrate Hillary Clinton et le républicain Donald Trump, ont déjà tous deux sévèrement critiqué le TTIP.
Vivement contesté en Allemagne Négocié dans le plus grand secret depuis mi-2013 par le gouvernement américain et la Commission européenne, l'accord TTIP (Transatlantic Trade Investment Partnership, également connu sous un autre acronyme anglais, Tafta), vise à supprimer les barrières commerciales et règlementaires de part et d'autre de l'Atlantique pour créer une vaste zone de libre-échange censée doper l'activité économique. Mais il a du plomb dans l'aile depuis plusieurs mois, notamment en raison de vives critiques d'ONG altermondialistes ou environnementales, qui craignent qu'il ne conduise à une déréglementation généralisée au profit des grandes entreprises. Et le traité est de plus en plus contesté au sein même des gouvernements européens. "A ce stade, la France dit non dans l'étape que nous connaissons des négociations commerciales internationales", avait ainsi affirmé le 3 mai le président français François Hollande. Dimanche, le ministre social-démocrate allemand Sigmar Gabriel a estimé que les discussions avec les Etats-Unis avaient de facto échoué car les Européens ne devaient pas céder aux exigences de Washington. La contestation en Allemagne est vive concernant l'accord en cours de négociation, y compris au sein de la coalition gouvernementale. Si les sociaux-démocrates, comme M. Gabriel, sont de plus en plus nombreux à ne plus y croire, la chancelière conservatrice Angela Merkel continue cependant de défendre ce projet. "La Commission européenne fait des progrès constants dans les négociations en cours sur le TTIP", avait également défendu lundi le porte-parole de la Commission européenne, Margaritis Schinas. En écho à ces propos, le représentant spécial américain au commerce extérieur Michael Froman a déclaré au magazine allemand Der Spiegel que "les négociations font des progrès constants", même si "rien n'est conclu tant qu'il n'y a d'accord sur tous les points".