Les prix à la production en Chine, baromètre de la demande industrielle, ont enregistré en septembre leur première hausse depuis plus de 4 ans, signe d'un timide sursaut de l'activité, tandis que les prix à la consommation accéléraient plus fortement qu'attendu. L'indice PPI des prix sortie d'usine, qui reflètent l'ampleur de la demande pour les produits industriels dans la deuxième économie mondiale, a progressé de 0,1% sur un an en septembre, a annoncé vendredi le Bureau national des statistiques (BNS). Cette très légère reprise, inattendue, met un terme à 54 mois de recul consécutifs: une demande atone, une conjoncture morose et des surcapacités de production obligeaient les entreprises à casser les prix. Cette glissade sans fin, depuis janvier 2012, contribuait en retour à plomber davantage le secteur, les clients ayant tendance à reporter des commandes dans l'attente de meilleures offres, tout en asséchant les ressources de firmes productrices déjà fortes endettées. Depuis le printemps, la baisse de l'indice PPI ralentissait de manière frappante, avec un repli de seulement 0,8% en août. Les analystes sondés par Bloomberg misaient sur une nouvelle légère baisse (-0,3%) en septembre. Ce répit, traduisant une possible embellie de la demande intérieure, est bienvenu pour les entreprises industrielles qui devraient pouvoir continuer d'améliorer leur rentabilité à court terme. Elles avaient déjà vu leurs bénéfices grimper de 19,5% en août, contre 11% en juillet et 5% en juin, à la faveur d'une accélération de la production industrielle durant l'été. Matières premières Yang Zhao, économiste de la banque Nomura, se veut néanmoins prudent: "Le rebond du PPI s'explique par le renchérissement des cours internationaux des matières premières, ainsi que par une base de comparaison favorable après 54 mois de recul". Même si "les producteurs parviennent enfin à récupérer une marge de manœuvre pour accroître leurs prix de vente, parallèlement à leurs efforts pour sabrer leur surcapacités", notamment dans la sidérurgie, ajoute-t-il. De l'avis des analystes, l'indice PPI, sur sa lancée, devrait continuer de progresser au cours des prochains mois. Poursuivant leur hausse, "les cours du charbon, des métaux ferreux et non-ferreux, etc., vont être le principal moteur de la reprise", observe David Qu, analyste d'ANZ. "Cela dit, la persistance de capacités de production largement excédentaires devrait continuer de peser sur les prix" de vente et d'enrayer leur rebond, avertit-il. Et ce particulièrement face à une demande toujours précaire: les exportations de la Chine, pilier de l'économie, se sont encore effondrées de 10% sur un an le mois dernier. De leur côté, les données sur l'inflation, également publiées vendredi, offrent une autre bonne nouvelle. La hausse des prix à la consommation, principale jauge de l'inflation en Chine, s'est établie en septembre à 1,9% sur un an, selon le BNS, rebondissant très fortement après être tombée en août à 1,3%, son plus bas niveau depuis près d'un an. Là encore, l'accélération de l'inflation --dopée par les prix alimentaires, ceux des légumes frais notamment-- est plus rapide qu'attendu par les experts sondés par Bloomberg qui misaient sur une hausse de 1,6% seulement. Embellie précaire Toute modeste amélioration de la demande des ménages pourrait s'avérer précaire, suspendue au reste de la conjoncture. "On s'attend à ce que l'inflation se stabilise désormais pour le reste de l'année et jusqu'en 2017", sans accélérer plus avant, estime Julian Evans-Pritchard, analyste du cabinet Capital Economics. Une stabilisation au troisième trimestre de la croissance du produit intérieur brut (PIB), dont le chiffre sera publié mercredi, est envisagée, mais elle sera elle aussi des plus fragiles. De fait, les déboires du commerce extérieur, les surcapacités massives, les douloureuses réformes des entreprises étatiques et surtout l'épineuse question de la dette des entreprises assombrissent toujours le tableau. L'accélération de l'inflation ne devrait probablement pas s'accentuer au point "d'inquiéter les autorités chinoises", tempère toutefois M. Evans-Pritchard, le chiffre actuel restant bien en deçà de l'objectif d'environ 3% que s'est fixé Pékin. Cela pourrait donc laisser le champ libre au régime pour accroître des mesures de relance via des assouplissements monétaires supplémentaires. Mais également, selon Julian Evans-Pritchard, "pour se concentrer sur des problèmes plus urgents, comme la stabilité financière et les réformes structurelles" visant groupes étatiques et monopoles d'Etat.