Maintenant que les Etats-Unis et la Chine sont passés des menaces aux actes en matière de droits de douane, les investisseurs vont pouvoir commencer dès cette semaine à disséquer les résultats et surtout les prévisions des entreprises américaines pour se faire une première idée de l'impact concret du conflit commercial entre les deux premières économies mondiales. Les investisseurs craignent que cette confrontation avec la Chine, premier partenaire commercial des Etats-Unis, n'amène les entreprises américaines à reporter des projets d'investissements, lesquels ont bondi au premier trimestre après l'abaissement du taux de l'impôt sur les sociétés dans le cadre de la vaste réforme fiscale adoptée en décembre. Les Etats-Unis et la Chine se sont mutuellement infligé vendredi des droits de douane sur 34 milliards de dollars (29 milliards d'euros) d'importations respectives, ce qui pourrait être le déclenchement d'un conflit commercial plus vaste. Pour l'instant, les secteurs de l'industrie ou de l'aéronautique ont été les plus affectés en Bourse. L'indice S&P-500 des valeurs industrielles a perdu plus de 5% depuis que le président américain Donald Trump a annoncé le 1er mars qu'il allait imposer des droits de douane sur les importations d'acier et d'aluminium. Le Standard & Poor's-500, indice de référence des investisseurs, a pris plus de 1% sur cette période. "Casse-tête" Après l'adoption de la réforme fiscale, l'idée largement répandue était que les entreprises allaient augmenter non seulement leurs rachats d'actions et leurs dividendes mais aussi leurs investissements en 2018, rappelle Quincy Krosby, responsable de la stratégie de marché chez Prudential Financial. "Ce que nous entendons de la part d'un certain nombre de directeurs financiers, c'est que si la question commerciale continue de dominer l'actualité et de créer encore plus d'incertitudes, ces projets pourraient être suspendus", dit-elle. Au premier trimestre, les dépenses d'investissement des entreprises cotées au S&P-500 ont connu leur plus forte croissance annuelle depuis 2011, montrent les données de S&P Dow Jones. Les stratèges de DataTrek Research écrivent dans une note récente que le "casse-tête principal en terme d'organisation" au deuxième semestre pour les chefs d'entreprise américains porte sur les incertitudes liées à la question commerciale. "La principale inquiétude porte sur la chaîne d'approvisionnement. Tellement de petits composants de pratiquement tout sont fabriqués en Chine et il peut y avoir un véritable ralentissement dans le secteur manufacturier à cause de ces droits de douane", dit Tim Ghriskey, responsable de la stratégie d'investissement chez Inverness Counsel, tout en ajoutant: "Pour chaque entreprise pénalisée, il y a une entreprise qui est avantagée. Ce n'est en aucun cas négatif pour tout le monde." La publication des résultats du deuxième trimestre débute vraiment cette semaine à Wall Street avec les banques JPMorgan Chase, Wells Fargo et Citigroup vendredi. Plus de 200 entreprises du S&P-500 publieront leurs résultats trimestriels au cours des deux semaines suivantes.
Bénéfices trimestriels attendus en hausse de 20,7% Parmi elles, certaines risquent de se retrouver piégées au milieu d'une guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, comme Boeing, Honeywell, Whirlpool ou Western Digital. Caterpillar annoncera ses résultats le 30 juillet. Des analystes estiment que la croissance des bénéfices au deuxième trimestre pourrait égaler voire dépasser celle du premier, qui, à 26,6%, a été la plus forte depuis le quatrième trimestre 2010 selon les données de Thomson Reuters. Mais ces performances pourraient être éclipsées par les prévisions pour les trimestres à venir et l'impact potentiel des droits de douane. "Ça domine le paysage pour le moment. L'impact ne sera pas sur les bénéfices déjà réalisés, cela pourrait cependant avoir un impact sur les prévisions qui accompagneront (les résultats), dans la mesure où les dirigeants ont fourniront", dit Mark Luschini, responsable de la stratégie d'investissement chez Janney Montgomery Scott. Certains investisseurs pensent cependant que les mauvaises nouvelles sont déjà intégrées dans les valorisations boursières et que Wall Street pourrait progresser durant la saison des résultats. Les anticipations des analystes concernant les bénéfices sur le S&P-500 au deuxième trimestre se sont de fait améliorées depuis avril. Les bénéfices des entreprises sont désormais attendus en hausse de 20,7% sur la période avril-juin selon les données de Thomson Reuters.
Les actions européennes dans le vert Les principales Bourses européennes évoluent en hausse lundi en début de séance, les derniers chiffres de l'emploi américain continuant d'assurer un soutien appuyé aux actions dans le monde entier tout en faisant baisser le dollar, ce qui donne notamment un coup de pouce aux valeurs liées aux ressources de base. À Paris, l'indice CAC 40 prend 0,78% à 5.417,94 points à 07h55 GMT, au plus haut depuis le 17 juin. À Francfort, le Dax gagne 0,48% et à Londres, le FTSE progresse de 0,4%. L'indice EuroStoxx 50 de la zone euro avance de 0,65%, le FTSEurofirst 300 de 0,67% et le Stoxx 600 de 0,7%. La plus forte hausse sectorielle dans les premiers échanges est pour les ressources de base, dont l'indice Stoxx prend 1,82%, soutenu notamment par les minières comme Antofagasta (+2,71%), BHP Billiton (+2,18%) et Anglo American (+1,87%). L'une des plus fortes hausses du Stoxx 600 est pour Air France-KLM, qui prend 6,34% après ses chiffres mensuels de trafic et une information du Figaro selon laquelle Catherine Guillouard, la PDG de la RATP, serait pressentie pour prendre la tête du groupe aérien. Non loin derrière, Atlice Europe gagne 2,74% après avoir été intégré par RBC Capital Markets dans sa liste de petites et moyennes capitalisation européennes préférées.
Hausse en Asie La Bourse de Tokyo a fini la journée sur une progression de 1,21% et l'indice MSCI regroupant les valeurs d'Asie-Pacifique hors Japon progresse de 1,34%. En Chine, l'indice SSE Composite de Shanghai s'est adjugé 2,49% et le yuan s'apprécie face au dollar. L'autorité boursière chinoise a annoncé dimanche son intention d'assouplir la réglementation encadrant les investissements étrangers sur les Bourses de Shanghai et Shenzhen. Les places asiatiques amplifient ainsi la progression enregistrée vendredi par Wall Street (+0,85% pour le Standard & Poor's 500 et +1,34% pour le Nasdaq Composite, sa meilleure séance depuis le 1er juin) après les statistiques mensuelles de l'emploi aux Etats-Unis, marquées entre autres par une augmentation du taux de participation et une hausse moins marquée qu'attendu des salaires. Ces chiffres "décrivent une sorte de meilleur des mondes: de la croissance économique, sans que pour autant le marché du travail ne se tende davantage, et pas d'accélération de l'inflation par les coûts", résume Hervé Goulletquer (LBPAM). Le rapport sur l'emploi a relégué au second plan, au moins temporairement, les tensions commerciales entre Washington et Pékin. Mais le sujet devrait de nouveau faire la une cette semaine à l'occasion du voyage officiel du président américain, Donald Trump, en Europe, pour le sommet de l'Otan. Côté chinois, les prochains jours seront marqués par la publication des chiffres mensuels de l'inflation et de la balance commerciale. Sur le marché des changes, le dollar recule de 0,13% face à un panier de devises de référence, poursuivant le repli entamé sur les deux dernières séances, qui l'a ramené à son plus bas niveau depuis le 14 juin. La hausse limitée des salaires américains en juin a remis en cause chez certains investisseurs le scénario de quatre hausses de taux de la Réserve fédérale cette année. Les cambistes attendent désormais les chiffres des prix à la production et à la consommation aux Etats-Unis, qui seront publiés respectivement mercredi et jeudi.
Draghi attendu au parlement européen Le président de la BCE, Mario Draghi, doit s'exprimer ce lundi au Parlement européen, à partir de 13h00 GMT; sur le front des indicateurs, les chiffres de la balance commerciale allemande montrent une progression plus marquée qu'anticipé des exportations et une hausse inattendue des importations. L'euro a profité de ces chiffres pour amplifier sa progression et franchir brièvement le seuil de 1,1775 dollar, qu'il n'avait plus atteint depuis la dernière réunion de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), le 14 juin. Du côté des emprunts d'Etat, le rendement du Bund allemand à dix ans a débuté la journée en légère hausse, autour de 0,3%. Les statistiques de l'emploi américain ont par ailleurs eu pour effet un aplatissement de la courbe des rendements des Treasuries, l'écart entre les rendements à deux et dix ans revenant sous 30 points de base. La livre sterling, elle, repart timidement après cédé un peu de terrain face à l'euro à la suite de l'annonce de la démission du ministre britannique chargé du Brexit, David Davis, en désaccord avec le plan de sortie de l'Union européenne présenté la semaine dernière par la Première ministre, Theresa May. "Cela va placer la Première ministre May sous forte pression et certains se demandent combien de temps elle pourra rester en poste", note David Madden, analyste marchés de CMC Markets à Londres. Sur le marché pétrolier, les cours hésitent, autour de 77,40 dollars le baril pour le Brent et 73,70 dollars pour le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI), sur des signaux contradictoires avec d'un côté le niveau anormalement bas des stocks aux Etats-Unis, et de l'autre la hausse attendue de la production et les craintes de baisse de la demande liées aux tensions commerciales.