Il y a une opacité et un manque de transparence flagrant dans les opérations de privatisation des entreprises publiques. Ce sont là les propos d'experts qui n'ont pas hésité à tirer la sonnette d'alarme quant à " la mauvaise gouvernance " qui ne cesse d'engloutir, selon leurs propres propos, le dossier des privatisations.Réunis, hier, au forum d'El Moudjahid autour d'un débat sur la privatisation et la nouvelle stratégie industrielle, MM. Amrani , Ghernaout , Serrai et Benssassi respectivement expert économique, commissaire aux compte, consultant international et président du conseil consultatif de la promotion de la petite et moyenne entreprises (CNCP-PME) n'ont pas manqué de soulever un certain nombre de dysfonctionnements qui font qu'aujourd'hui une bonne partie des entreprises publiques n'arrive toujours pas à décoller alors qu'une autre partie, concernée par la privatisation notamment n'arrive pas à trouver preneur. D'emblée, les experts, à chacun ses argument, bien entendu, trouvent tout d'abord que la nouvelle stratégie industrielle, telle que définie par les pouvoirs publics, manque de maturité. Ils regrettent, à ce propos, que les principaux acteurs, dont les experts économiques nationaux, ne soient pas associés, encore moins concertés dans le processus de réflexion autour de cette démarche. Pour M. Ghernaout, commissaire aux comptes et expert financier, il n'y pas de secteur stratégique et de secteur moins stratégique. Dans l'industrie, toutes les branches sont importantes. " C'est une question de performance et non autre chose" dit -il. Quant à M. Amrani, expert économique, la nouvelle stratégie industrielle ne s'est pas faite sur la base d'une concertation et réflexion mûrement réfléchie. "Réindustrialiser le pays, c'est bien mais avec qui allons-nous le faire " s'est interrogé l'expert. "Avec des étrangers ? Je ne le pense pas " a-t-il martelé. Car pour cet expert qui ne manquera pas, d'ailleurs, d'appuyer ses dires par des exemples concrets, le partenariat étranger et l'attraction des IDE (investissements directs étrangers) sur lesquels comptent aujourd'hui les pouvoirs publics, ne sont qu'un complément. " On ne construit pas une économie nationale forte avec des IDE ", dit-il. La privatisation à outrance est aujourd'hui un fait, selon cet expert. " On privatise des entités qui relèvent d'une industrie à forte valeur ajoutée et dont notre main-d'œuvre a une parfaite maîtrise, c'est le cas des cimenteries, des câbleries, de la marine marchande … " a regretté M. Amrani avant d'ajouter " Tous les pays du monde soutiennent leurs industries. Je ne vois pas pourquoi l'Etat algérien ne le fera pas et il y a plusieurs façons de le faire ". A commencer par favoriser les entreprises publiques dans les appels d'offres concernant certains marchés bien précis où la compétence nationale est avérée, expliquera l'invité du forum d'El Moudjahid. Abordant le rôle de l'Inspection générale des finances (IGF) dans le contrôle des entreprises publiques, notamment celles proposées à la privatisation, les experts ont exprimé un point de vue différent sur la question. Pour M.Ghernaout, en sa qualité de commissaire aux comptes, l'implication de l'IGF dans le processus de privatisation d'une entreprise n'a pas lieu d'être. Selon lui, la tâche de contrôle revient au commissaire aux comptes avant tout. En plus, estime-t-il , il y a assez de contrôle au niveau des SGP, du CPE et si défaillance il y a , c'est à tous ces niveaux qu'il faudra vérifier. Un point de vue que ne partage pas forcément le président du CNCP-PME qui trouve , de son côté que c'est une bonne chose que l'IGF intervienne pour passer au peigne fin les dépenses des entreprises publiques, d'autant plus que nombres d'entre elles s'apprêtent à entrer en Bourses et d'autres à ouvrir leur capital. L'expert économique M. Amrani ne manquera pas d'emboîter le pas à son collègue pour dire que c'est justement " l'opacité qui prévaut dans la privatisation des entités publiques qui a propulsé au devant de la scène le rôle d' l'IGF ". Autrement dit, l'IGF a des missions bien définies qu'elle a toujours su accomplir. Ajoutons à cela, explique encore M. Amrani, les entreprises publiques se sont alignées avec la libéralisation du marché, sur le droit commun, c'est-à-dire que c'est le code de commerce qui détermine le mode de fonctionnement de chaque entreprise selon son statut juridique. En d'autres termes, il existe pour chaque type d'entreprise un certain nombre d'organismes de contrôle qui interviennent avant même d'arriver à l'IGF.