Plan quinquennal ou troisième mandat ? La référence, dans un communiqué officiel, à un plan quinquennal à lancer en 2009 est loin d'être fortuite. En politique, c'est chose établie, le hasard n'a pas droit de cité. Aussi l'évocation d'un plan quinquennal 2009-2014 appelle-t-elle bien des lectures. Ceux qui ont longtemps supputé l'absence de volonté chez Bouteflika de briguer un troisième mandat en seront pour leurs frais. Du haut de ses 72 ans, le chef de l'Etat ne donne pas l'air d'être disposé à ravaler son ambition de s'offrir un autre bail présidentiel. Bien au contraire. En recevant dimanche en audience le ministre des Finances Karim Djoudi, le Président a clairement fait allusion au troisième mandat en donnant des instructions fermes pour une meilleure préparation du programme quinquennal 2009-2014. “Nous devons aussi renforcer notre visibilité sur l'avenir à moyen et long terme. J'entends donc que cette démarche soit mise en œuvre lors de la préparation du prochain programme quinquennal pour la période 2009-2014. J'entends également que ce futur programme accorde la priorité aux projets ayant fait l'objet d'études préalables pour leur lancement sans retard ni réévaluation”, a-t-il déclaré. Le président Bouteflika est revenu à la charge à l'occasion de l'audience accordée, lundi, au ministre du Commerce Hachemi Djaâboub en faisant, cette fois-ci encore, référence au programme quinquennal 2009-2014. “Le chef de l'Etat a chargé le gouvernement de veiller pour que le programme quinquennal 2009-2014 prenne en charge la réalisation d'un réseau de marchés de distribution d'envergure nationale, régionale, locale et même de proximité”, est-il mentionné dans le communiqué sanctionnant l'audience. Il est clair que la référence, dans un communiqué officiel, à un plan quinquennal à lancer en 2009 est loin d'être fortuite. En politique, c'est chose établie, le hasard n'a pas droit de cité. Aussi l'évocation d'un plan quinquennal 2009-2014 appelle-t-elle bien des lectures. La première est que le chef de l'Etat a l'assurance bien chevillée que le troisième mandat lui est d'ores et déjà acquis. Les oppositions à son ambition étant dans ce cas dissipées, il décide alors d'éventer, dès à présent, l'idée d'un programme pour les cinq prochaines années et, partant, faire part, à sa manière, de son ambition pour prendre de vitesse ses éventuels adversaires. La deuxième lecture est que le principe de la révision constitutionnelle est acquis, mais la question de la durée du mandat présidentiel — un septennat renouvelable une seule fois ou un quinquennat renouvelable à l'envi — n'est pas encore tranchée en haut lieu. En parlant d'un plan quinquennal 2009-2014, Bouteflika délivre ainsi un message sibyllin à qui de droit sur ses préférences. Il n'est pas exclu qu'il veuille faire entendre par son annonce qu'une rallonge de deux ans ne l'agrée point, et qu'il préfère plutôt un mandat plein de cinq ans comme il l'a été revendiqué par le secrétaire général du FLN Abdelaziz Belkhadem, son homme de confiance. Troisième et dernière lecture enfin : la sortie du président Bouteflika n'est, en fait, qu'une manœuvre politique. Son ambition n'ayant pas gagné le consensus nécessaire, il a décidé de passer à la grande offensive pour venir à bout des réticences des uns et des autres. Surtout que, cette fois-ci, il peut se prévaloir d'un argument de taille, réel ou supposé : l'onction américaine. En effet, l'évocation du futur programme quinquennal a coïncidé avec la fin de la visite de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, en Algérie. Visite marquée par les éloges dont Bouteflika a été couvert par Mme Rice. Et en vieux briscard rompu aux intrigues politiques, Bouteflika ne s'est pas fait prier pour mettre à profit ce providentiel “coup de pouce américain” pour mieux peser dans les jeux politiques internes. Ce cas de figure est d'autant plus plausible que le Président avait une belle opportunité d'annoncer sa volonté de lancer un nouveau plan quinquennal lors du Conseil des ministres du 31 août 2008 qui est, convenons-en, le cadre le plus approprié pour instruire le gouvernement sur une telle démarche. Il ne l'avait pas fait. Il est à se demander si, à six mois d'une élection présidentielle, il est judicieux pour un Président en exercice de mettre sur le tapis un plan quinquennal à mettre en œuvre durant un mandat qu'il n'a pas encore gagné. Voilà sans doute la meilleure façon de discréditer, à l'avance, et la révision constitutionnelle annoncée et l'élection présidentielle de 2009. Arab CHIH