A, comme Amazigh. Peuple premier de l'Afrique du Nord qui, malgré les multiples invasions, n'a jamais été absorbé. S'il a plié, comme le roseau de la fable, il n'a jamais été brisé. L'Histoire lui retient ce trait de caractère, comme elle retient le fait que sa langue, le tamazight, n'a jamais été éliminée de son sol natal. Malmené, fustigé et combattu, le peuple amazigh a toujours su rester debout face à l'adversité. Aujourd'hui encore, on tente de le phagocyter pour mieux le cerner et mieux le maîtriser ; sauf que ces mauvais élèves de l'histoire amazighe n'ont pas encore appris la leçon que la liberté coule dans son sang. B, comme Belmadi. Calme dans sa gestuelle, discipliné sur la touche lors des matchs, il a su inculquer à ses joueurs ce qu'est l'esprit de groupe. S'il est vrai qu'il a à sa disposition des joueurs talentueux, il n'en demeure pas moins qu'il représente, en sa qualité d'entraîneur, le véritable treizième homme ; celui qui porte le ballon, assure la passe, élimine son adversaire et marque le but. Belmadi est, à mon sens, l'âme de cette fringante équipe algérienne, qui montre un nouveau visage. Son choix de sélectionner Guedioura a été contesté ; comme a été contesté le choix de Kaci Saïd, dans une autre époque, remplaçant le sorcier du ballon, Ali Bencheikh. C, comme canicule. Je crois qu'il faut trouver un terme plus fort que canicule, pour exprimer cette fournaise. On parle de « s'khana », de « ch'hili », de « aghamach », de « lahmou », selon les régions d'Algérie. Sauf que le génie populaire a trouvé le vocable correspondant : la « kanicoule », ya kho ! La kanicoule exprime une chaleur torride, insupportable et suffocante. Alors que la canicule exprime un semblant de tiédeur. Je suis sûr que les immortels français s'en rendront compte, maintenant que l'Hexagone affiche des températures avoisinant les quarante degrés. C'est sympathique une canicule ; par contre, une kanicoule c'est franchement invivable. Il faut donc un « klimatisour » pour mieux lutter contre une kanicoule, surtout celle de cette semaine. D, comme dindou. A l'époque, l'Algérien ne connaissait pratiquement pas ce volatile. Là-bas, la dinde (c'est plus français, non ?) se consomme à Noël. Nous, ici, on s'est rendu compte que le dindou (c'est le mâle) peut rapporter gros. Il est venu concurrencer le pauvre poulet. Désormais, « les scalopes » de dinde fait fureur sur nos tables. Et dans les bonnes gargotes. Ah, la femelle, il faut l'appeler « dinda ». Puis, ce n'est pas donné les escalopes de dinde. Il faut casquer pour se les farcir. Adieu donc le poulet rôti. Voila les escalopes de dinde (dindou ou dinda, c'est kif-kif !) pour remplir la panse. Même les fameuses frites-omelette ne font plus recette, ya kho. En attendant de trouver mieux, il y a le dindou qui occupe le haut de la chaîne alimentaire. E, je pense sauter ce caractère. Je ne vais pas quand même vous proposer la formule de Sherlock Holmes : « Elémentaire, mon cher Watson ! » Il n'est pas de chez nous. Il ne nous rappelle rien, principalement à la nouvelle génération. J'aurais aimé que notre commissaire national, Llob, qui, lui, n'a aucune formule précise ; même si c'est un fin limier. F, comme filet. Chez nous, on dit « fili ». Ça peut être le filet de pêche, même si la sardine, en Algérie, continue de mourir de vieillesse en Méditerranée. Ça peut être, pour les plus anciens, ce fameux filet (ou fili) qui peut remplacer un couffin (kouffa pour les Algérois ou gouffa pour les autres). Désormais, pour les emplettes, le plastique a supplanté le reste. Il est inutile d'aller au marché un fili à la main ou une gouffa. Il faut aller, en dilettante, les mains dans les poches ; le commerçant mettra à votre disposition un sachet, de couleur noire principalement, pour transporter à bonne maison la « khoudra ». Et le « dissir » ! Sachets noirs qui iront grossir le fameux néo-continent. G, comme gilet jaune. Attention, je ne confonds pas les révolutions. Chacun a la révolution qui lui convient. Vous remarquerez que les gilets jaunes ont remisé leurs gilets. Eh oui, les vacances sont sacrées « là-bas-chez-eux ». Ils se sont bien défoulés, les Français. Et Macron (lui est Président pour de vrai) a su parler à son peuple. Et le peuple, là-bas, a cessé la lutte. C'est vrai qu'on dit facilement, dans notre parler quotidien, « jili » pour signifier le gilet. Je le dis, aussi. Bref, à l'Académie française de s'en occuper ! H, comme hirak. Le Hirak, ce sont nos gilets jaunes. Des gilets jaunes, made in bladi, pur jus. Générosité. Exubérance. Volonté. Jeunesse. Humour. Sens de l'à-propos. Ténacité. Malgré les embûches. Les coups. Les gaz lacrymogènes. Les arrestations. La prison. Le Hirak, chez nous, est multicolore. Il épouse les couleurs algériennes. Il a su faire du vendredi plus qu'un jour de prière. Il refuse la violence. Il ne veut pas de casse. Il veut juste de la démocratie, de la liberté, de l'alternance au pouvoir, des élections garanties par le peuple, le « dégagisme » de tous ceux qui symbolisent le système postindépendance… Le Hirak veut récupérer l'Algérie, c'est aussi simple que ça ! I, comme « i ». Cette lettre ne m'inspire pas. Du tout alors ! Ce n'est pas un caprice de chroniqueur, c'est juste un constat. Il y a bien des mots qui me viennent en tête. Il n'y a rien d'intéressant, néanmoins. Allez pour la frime : Icare s'est cassé la gueule. Ifis est une hyène, en tamazight. Itou vient dire aussi. Imbécile, on dit de lui qu'il est heureux. Je me demande comment. Importance, il y a beaucoup qui veulent en avoir, alors qu'ils volent au ras des pâquerettes. Passons pour le « i », mais si vous avez des idées, elles sont les bienvenues. J, comme jumbo. C'est une trouvaille géniale. Jumbo, la viande du pauvre. Au prix où c'est, jumbo est le bienvenu. Il suffit d'un cube. Et le fumet est, tout simplement, fameux. Nos cordons-bleus cathodiques ne l'utilisent pas souvent. Mais la ménagère lambda, elle, ne se casse pas la tête. Pour faire passer le plat de « spaguiti », yellah, un jumbo et l'estomac est bien rempli. Qui a dit que la cuisine n'est pas une alchimie ? Plus que ça, c'est une science. Au fait, peut-on utiliser un jumbo pour la sauce d'un couscous ? A méditer ! Je m'arrête là. J'espère n'avoir pas sauté un caractère. Sinon, j'y reviendrai la semaine prochaine. De toutes les façons, je n'ai pas fini de danser avec les lettres. C'est une manière comme une autre de se tenir en forme. Y. M.