Ferveur et mobilisation intenses ont marqué la 52e marche du vendredi 14 février 2020. Une animation particulière, à la fois festive et militante, qui a donné à ce rendez-vous des allures de répétition de la célébration de l'an un de la révolution citoyenne, qui « en bouclant, le 22 février 2020, le cycle d'une année, aura démontré toute sa vigueur et la farouche volonté du peuple d'imposer le changement », nous dira Kamel, un vieux militant du FFS et hirakiste invétéré. Hier, les manifestants étaient encore des milliers à investir le parcours habituel de la marche qu'ils continuent à décorer aux mêmes couleurs. Celles de l'emblème national et du drapeau amazigh qui flottent au-dessus de l'immense cortège où l'on peut repérer des dizaines de pancartes, tags et banderoles, et d'où montent les mêmes mots d'ordre qui décrivent les objectifs et les contours politiques de la révolution et, surtout, la même détermination à poursuivre la lutte pacifique pour le changement. « Nous sommes là, on ne lâchera rien!» semblent dire les marcheurs qui crient haut et fort leur volonté de rompre avec un ordre politique oppressant. D'un carré à l'autre, on continue à entonner les mêmes chants et les mêmes refrains. Des slogans que la rue réactualise pour mieux «coller» aux événements et aux évolutions politiques, et adapte au gré du bras de fer engagé, depuis une année, avec le pouvoir dont le discours d'ouverture et l'absence de mesures pour traduire ses promesses de changement sont contredits par la réalité du terrain. De fait, on a dénoncé la poursuite de la répression des militants et des activistes du Hirak, à l'exemple de Karim Tabbou et Fodil Boumala, dont l'incarcération est, juge-t-on, injustement prolongée. L'instrumentalisation des médias et de la justice est rejetée avec vigueur par les participants à la marche qui réclament toujours le retrait des militaires du champ politique et l'instauration d'une période de transition qui permettra la mise en place d'un véritable Etat de droit qui respecte les libertés et consacre la séparation des pouvoirs. Hier, la sanction prononcée à l'encontre du magistrat Mohmed Belhadi du tribunal de Sidi-M'hamed, muté au tribunal de Guemmar dans la wilaya d'El-Oued, a fait la «Une» du Hirak tiziouzien. L'indignation a été la hauteur d'une mesure que l'on a qualifiée d'injuste et d'arbitraire et qui constitue, pour beaucoup, une preuve de l'absence d'une justice libre et de l'immixtion de parties extérieures dans le travail des juges. «La Kabylie soutient le procureur adjoint du tribunal de Sidi-M'hamed !» a écrit un citoyen sur une grande pancarte accrochée au mur d'un jardin du centre-ville. Un message partagé par de nombreux marcheurs qui ont vu dans le plaidoyer du procureur un geste de bravoure et de résistance. D'aucuns se sont mis à souhaiter pour que le geste de M. Belhadi puisse inspirer les autres magistrats. S. A. M.