La grande majorité des Algériens ont, depuis quelque temps, lâché prise sur les mesures sanitaires. L'abandon du port du masque et du respect de la distanciation physique dans les lieux publics et les espaces fermés est criant. Les spécialistes dénoncent cette «négligence», et appréhendent une importante propagation virale et l'enclenchement d'une troisième vague de la pandémie de Covid-19. Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Depuis plusieurs semaines, le relâchement de la population quant au respect des mesures sanitaires contre la pandémie de Covid-19 est flagrant. La plupart des Algériens ont abandonné les gestes barrières. Dans la rue, très peu de personnes continuent à porter le masque et la distanciation physique a été bannie dans les lieux publics. Les regroupements ont repris de plus belle. Même les services de sécurité, censés faire respecter le protocole sanitaire, font preuve d'un grand laxisme. Les contrevenants ne sont plus rappelés à l'ordre. L'avènement du mois de Ramadhan a accentué cette tendance. Dès le premier jour du jeûne, tous les commerces sont pris d'assaut. Les marchés de fruits et légumes sont noirs de monde, les boucheries bondées de clients, et les supérettes ne désemplissent pas. Commerçants comme clients, personne ne se soucie du respect des gestes barrières. Les bavettes sont devenues un simple accessoire posé sur le menton, et la distanciation physique n'a plus sa place dans ces hauts lieux de commerce souvent exigus. Alors que les clients ne pensent qu'à remplir leurs paniers, les vendeurs eux, se concentrent uniquement sur leurs gains. Même scénario dans la majorité des bureaux de poste de la capitale. La distanciation physique est aux abonnés absents, et les bavettes sont rares. De longues files d'attente serpentent et débordent sur le trottoir. Entassés les uns contre les autres, des hommes, des femmes, des jeunes et des moins jeunes attendent avec impatience leur tour pour retirer de l'argent. Les interminables dépenses du mois de Ramadhan ont apparemment mis à rude épreuve leurs épargnes. Souvent implantés à l'extérieur de la poste, les distributeurs automatiques de billets sont, eux aussi, pris d'assaut. C'est la course aux billets avant que l'appareil ne se vide. En cette période qui coïncide avec le versement des salaires des fonctionnaires des communes et des pensions des retraités, la récente grève des employés d'Algérie Poste n'a fait qu'accentuer ces scènes d'affolement des titulaires des comptes postaux. Les transports qui devaient respecter un remplissage de 50% ont retrouvé la «normalité». Sur la route, des bus bondés de passagers circulent au vu et au su de tout le monde. À bord, certains clients portent le masque, la plupart se contentent de le disposer sur le menton, alors que d'autres ont complètement oublié cette mesure barrière obligatoire. Même les compagnies aériennes nationales Air Algérie et Tassili Airlines qui assurent les vols domestiques, ont lâché prise sur le protocole sanitaire mis en place pour endiguer la propagation du virus Sars-CoV-2. A À l'aéroport d'Alger, ni agents des deux compagnies, ni ceux de l'Etablissement de gestion de services aéroportuaires d'Alger (EGSA), encore moins les passagers ne portent de bavettes. Sauf, quelques rares exceptions qui se distinguent. Le soir, c'est au tour des mosquées. Autorisées à reprendre les prières de tarawih pendant ce mois de Ramadhan, certaines d'entre elles enfreignent les règles sanitaires de rigueur. Situées hors de la vue des autorités, ces mosquées, souvent des quartiers populaires, ont carrément bafoué la distanciation physique. Ici, retour aux rangs serrés des fidèles, coude contre coude. Seuls les établissements de santé où les responsables sont à cheval sur le respect des mesures sanitaires et maintiennent le protocole sanitaire. Tout le personnel médical, paramédical ainsi que les agents de sécurité continuent à porter la bavette. Le cri d'alarme des spécialistes Ce laisser-aller généralisé inquiète sérieusement les spécialistes. Ils appréhendent une troisième vague de la pandémie de Covid-19, plus virulente, notamment avec l'émergence de nouveaux variants du virus. Le Pr Ryad Mahyaoui, membre du Comité scientifique de suivi de l'évolution de l'épidémie du coronavirus, fait remarquer que peu de personnes observent les mesures barrières : le port du masque, pourtant obligatoire, et le respect de la distanciation physique, dans les espaces publics, mais aussi dans les espaces fermés. Une négligence qui peut, selon lui, déboucher sur une situation inquiétante. «Nous ne sommes pas à l'abri d'une troisième vague», s'inquiète-t-il. Pour le spécialiste, la hantise est que nous nous acheminons vers cette situation grave que vivent d'autres pays, surtout en présence des variants connus». Ry. N.