La hantise que tout ce qui a été construit depuis une année et demie soit remis en cause, commence petit à petit à s'estomper. Les deux poids lourds de l'Opep, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis, ont en effet décidé de mettre de l'eau dans leur vin, et plancher sur un accord au sujet des quotas de production dans le cadre de l'Opep+. L'incertitude induite par l'absence d'accord au sein de l'Opep d'abord, et de l'Opep+ ensuite a pesé sur le marché mondial du pétrole. Soupçonnant que cette absence d'accord ouvre la porte à de l'indiscipline dans le respect des quotas de production, les investisseurs et autres intervenants sur le marché ont accusé le coup, jeudi. À l'arrivée, le baril de Brent a perdu 1,29 dollar de son prix de clôture de la veille sur le marché de Londres, alors qu'à New York, le baril de WTI a cédé 1,48 dollar du prix qui était le sien à l'issue de la séance de mercredi. Le spectre d'une guerre de production pour s'accaparer plus de parts de marché au détriment des prix n'en finit pas de prendre forme, du moins jusqu'à jeudi, malgré les informations persistantes sur la tenue de négociations en coulisses entre les deux principaux protagonistes, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis. En fait, la chute des prix de jeudi n'a été qu'un prolongement de la difficile journée de mercredi pour le marché, après que des informations eurent révélé que l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis étaient en bonne voie pour résoudre leur contentieux sur les niveaux de production de référence en augmentant le quota des Emiratis. Il faut dire, toutefois, que cette tendance à la baisse des prix n'est pas seulement la conséquence de la mésentente entre les deux compères de l'Opep, le rapport hebdomadaire de l'Agence américaine d'information sur l'énergie (EIA) y est également pour quelque chose. Selon celle-ci, les stocks ont été soulagés de 7,9 millions de barils jusqu'à la fin de la semaine se terminant le 9 juillet pour les besoins de la production d'essence. La plupart des analystes s'accordent à dire que les pertes de ces derniers jours par le pétrole ne devraient pas remettre en cause les perspectives optimistes pour le court et le moyen terme. Ceci d'autant que le compromis n'est pas loin entre les Emirats arabes unis et l'Arabie Saoudite, les deux rivaux de ces derniers jours ont commencé à trouver les grandes lignes d'un accord sur une hausse des quotas de production dont bénéficiera Abu Dhabi. On rappelle que l'objectif de l'accord consiste à faire augmenter la production de l'Opep et de ses alliés de 2 millions de barils/jour d'ici au mois de décembre, soit une hausse d'environ 2% de l'offre mondiale. La progression serait de 400 000 barils par mois à partir du 1er août, mais les Emirats arabes unis ont fait volte-face et bloqué les discussions qui devaient entériner cette augmentation de la production de 400 000 barils/jour. Selon diverses sources américaines, les Emiratis exigent le droit de produire davantage de pétrole l'année prochaine, en échange d'un soutien à la prolongation de l'accord Opep+ actuel d'avril 2022 à décembre de la même année. Au début du désaccord, Abu Dhabi avait demandé de porter son quota à 3,80 millions de barils par jour, alors qu'il est actuellement de 3,17 millions. Un compromis aurait été trouvé à 3,65 millions de barils quotidiens. Donc, désormais, si un accord est effectivement conclu, les Emirats arabes unis seront autorisés à augmenter leur niveau de production de référence à 3,65 millions de b/j, mais uniquement lorsque l'accord actuel expirera en avril de l'année prochaine. Cela représenterait une augmentation par rapport à 3,17 millions de b/j comme référence de production actuelle pour le troisième producteur de l'Opep, les Emirats. Saoudiens et Emiratis proches d'un accord Quoi qu'il en soit, bien que la mauvaise passe traversée durant la première moitié de ce mois de juillet ait quelque peu déteint sur les prix, il n'en demeure pas moins que la suite s'annonce on ne peut plus prometteuse pour le pétrole. En effet, selon le dernier rapport de l'Opep, publié jeudi, la demande mondiale de pétrole devrait dépasser la barre des 100 millions de barils par jour (bpj) au second semestre 2022, grâce à une croissance économique solide et aux attentes d'un succès continu dans la maîtrise de la pandémie. Pour cette année, l'Opep voit la demande mondiale de pétrole augmenter de 6 millions de bpj, c'est-à-dire sans changement par rapport à l'évaluation du mois dernier. La demande totale de pétrole devrait atteindre en moyenne 96,6 millions de barils par jour en 2021. En 2022, la demande mondiale de pétrole augmentera de 3,3 millions de bpj supplémentaires par rapport à 2021 pour atteindre en moyenne 99,86 millions de bpj, c'est-à-dire pratiquement le niveau de la demande moyenne de 2019, avant la pandémie. Ainsi, la barre hautement significative de la reprise, les 100 millions de b/j, sera dépassée au second semestre 2022, selon les toutes dernières perspectives de l'Opep qui s'attend à une augmentation de la demande dans les économies développées de 1,5 million de b/j en 2022 par rapport à 2021, la demande aux Etats-Unis étant la plus forte, bien que celle-ci soit légèrement inférieure aux niveaux de 2019. Azedine Maktour