�Je suis le ciseleur du verbe/Et lorsque se croise le fer/Je deviens ma�tre des situations.� Ainsi parlait Yusef U Qasi Nath Jennad, le po�teguerrier qui avait v�cu bien longtemps avant Si Mohand Oumhand. Mais � la diff�rence de l�illustre cr�ateur des �Issefra�, la vie et l��uvre de son pr�d�cesseur restent m�connues. La tradition orale n�a pas pu, pour ce qui concerne le fils des Ath Jennad, traverser ais�ment les si�cles pour en conserver toutes les traces dans la m�moire collective. Et pourtant, d�apr�s tous ceux qui, aujourd�hui, s�attachent � renouer le fil t�nu, Yusef U Qasi �tait un po�te de la grande esp�ce et qui m�rite grand int�r�t, hommage et reconnaissance. En nous pr�sentant son opuscule Yusef U Qasi, le cavalier po�te (�crit en tamazight, arabe et fran�ais), Mohamed Ghobrini nous aide � beaucoup mieux conna�tre le personnage. �M�me si dans cette contribution modeste, avertit-il dans le pr�ambule, les diff�rentes parties de l�ouvrage sont imagin�es, y compris le volet po�tique qui n�est que fiction, il n�en demeure pas moins que l�ensemble des textes composant cet ouvrage tirent leur source de la tradition orale.� Malgr� toutes les zones d�ombre entourant le po�te et qui g�nent consid�rablement un v�ritable travail de recherche, l�auteur n�a pas h�sit� � vouloir d�fricher le terrain et tracer des pistes de recherche pour les historiens et autres sp�cialistes. Une initiative louable, donc, et surtout une �uvre de pionnier qu�il faut saluer. A la lecture de l�ouvrage, l�on d�couvre que le po�te �n�est pas seulement guerrier et strat�ge, mais aussi un sage, un f�d�rateur attitr� et un meneur d�hommes. Personnage tr�s influent dans toute la r�gion de Kabylie, il fut l�un des principaux pr�curseurs du savoir � son �poque, maniant le fer et le verbe avec une dext�rit� d�concertante�. N� � Ath Gouaret (arch des Ath Jennad), vers 1680, Yusef U Qasi alliait tout � la fois les qualit�s de po�te, de strat�ge et chef de guerre (contre l�autorit� ottomane et son pouvoir beylical), d�homme sage et �clair� � l�esprit chevaleresque, d��rudit ( afsih) et de f�d�rateur aussi. C�est pourquoi sa vie s�apparente � une v�ritable �pop�e, de l�avis de Mohamed Ghobrini. L�a�de, philosophe et homme politique �tait particuli�rement �pris de libert�. Il le disait si bien dans un de ses po�mes : �La libert� nous interpelle/ Il fait jour, le soleil est au z�nith/R�servez-lui une place parmi vous� (p. 53). Mais comme c�est dans �l'adversit� que l�on reconna�t les vaillants� (p. 39), et que la libert� seule ne fait pas la force, il ajoute : �Je vous recommande l�union/Attachez-vous � celle-ci avec c�ur/Vous ne tomberez jamais.� (p. 45) Sur les derniers moments de la vie du po�te (il est mort au cours de la seconde moiti� du XVIIIe si�cle, sans autre pr�cision selon l�auteur) ne subsiste malheureusement aucune trace ni t�moignage transmis par la tradition orale. C�est le myst�re total, notamment sur les circonstances de sa mort, souligne Mohamed Ghobrini. Toutefois, on peut toujours se recueillir sur sa tombe � Ath Gouaret. Enorm�ment de travail reste donc � faire pour reconstituer un tel patrimoine culturel et historique. Selon l�auteur, les premiers jalons ont �t� pos�s, notamment gr�ce � l'association qui porte le nom du po�te. Les bonnes volont�s feront le reste. L��uvre de Yusef U Qasi m�rite d�autres efforts de recherche et de collecte pour qu'on s�y attarde. �Quand l�assiette est lav�e/La lampe est �teinte/Il n�y a plus de place pour les tartuffes.� (p. 33) : n�est-ce pas l� une belle preuve de cette sublime po�sie d�antan qu�il faut revivifier absolument ? Mohamed Ghobrini, ancien journaliste et animateur d��missions litt�raires radiophoniques, conf�rencier et conseiller � la communication et aux relations ext�rieures au bureau des Nations unies (PNUD) est �galement connu pour ses essais en po�sie berb�re. En 2011, il avait obtenu le premier prix national de litt�rature amazighe. Hocine T. Mohamed Ghobrini, Yusef U Qasi, le cavalier po�te, Editions El-Amel 2011, 94 pages.