Par Nadia Salemi Dysfonctionnements, anachronismes, disparit�s sociales et d�s�quilibre r�gional en mati�re d�emploi, d��ducation, de logement, de transport, de sant� publique, de relation entre administration et administr�s et entre �lus et citoyens. C�est ce qui ressort en substance du rapport du Cnes sur le d�veloppement local qui a �t� remis au pr�sident de la R�publique. Il comporte cinquante recommandations et pr�ne �un plan d�urgence� pour sortir du marasme. Cependant, avec un gouvernement qui est logiquement en fin de mission, occup� par une campagne morose pour les �lections l�gislatives, les populations qui avaient entrevu une lueur d�espoir dans des assises in�dites qui leur ont �t� destin�es, sont toujours dans l�expectative, alors que leurs conditions de vie ne cessent de se d�t�riorer de jour en jour. Sur saisine du pr�sident Bouteflika et apr�s une tourn�e marathon du Cnes qui a sillonn� les quatre coins du pays pour palper de visu la r�alit� du terrain, l�institution que pr�side Mohamed Seghir Bab�s a, au terme de 7 rencontres r�gionales puis deux rencontres nationales, fait un constat sans complaisance. �Le changement doit �tre radical. Les m�thodes de gestion doivent changer afin de parvenir � une nouvelle dynamique apte � r�aliser un v�ritable d�veloppement local � la hauteur des aspirations des citoyens et de leurs ambitions.� Le Cnes, en qualifiant sa mission dans le rapport, dont nous avons obtenu une copie, de �d�marche visant � analyser et �valuer la probl�matique de d�veloppement local � travers l��coute des dol�ances des citoyens et de leur v�cu r�el et dans un v�ritable esprit critique�, rel�ve que �les Alg�riens demandent l�am�lioration de leurs conditions de vie, ce qui est une revendication l�gitime �. �Le rapport a g�n� bon nombre des membres du gouvernement, nous a-t-on dit, car il met le doigt sur leur mauvaise gestion et leur absence de vision.� Le document semble �tre un camouflet au gouvernement et avec lequel le pr�sident a voulu court-circuiter les notes optimistes de l�ex�cutif voyant que le front social est constamment en �bullition. La feuille de route du Cnes appelle � l�application de r�formes globales, � court, moyen et long terme, et met l�accent sur la n�cessit� de rattraper le retard et de rectifier le tir et ce, en int�grant ce plan dans l�action du gouvernement. Parmi les axes ayant eu un pan important de l�expertise du Cnes, nous citerons : Red�finition du r�le de l�Etat et de ses d�membrements Pour atteindre un nouveau syst�me de gouvernance dans une approche de la base au sommet, le Cnes recommande la d�centralisation des pouvoirs. L�objectif �tant de d�finir les missions et les r�les de chaque acteur pour �viter le chevauchement et les interf�rences entre l�administration centrale, l�administration locale et les �lus. La d�centralisation permettra �galement aux collectivit�s locales une autonomie d�action. Pour ce faire, le rapport insiste sur la �lib�ration des �nergies cr�atrices et innovantes, l�instauration d�une d�mocratie participative qui impliquerait la soci�t� civile�. La r�vision de la fiscalit� locale est �galement au menu des recommandations. Il est conseill� aussi plus de pr�rogatives aux walis pour qu�ils soient �en mesure de prendre des d�cisions, superviser la cr�ation d�entreprises et les accompagner, notamment celles cr��es par les jeunes promoteurs et ce travail pourra �tre renforc� par la cr�ation d�un observatoire national du d�veloppement local ayant pour mission l��tude, l�analyse et l��valuation des projets pour le compte des collectivit�s locales�. Une dynamique qui devra �galement �tre �expurg�e des contraintes de la bureaucratie, et apte � instaurer des canaux d'�coute et de dialogue avec l�administration et les �lus pour r�pondre � la demande sociale�. En outre, �le d�veloppement des villes doit se faire dans le respect des normes universelles et sur des bases scientifiques avec une plus grande implication du mouvement associatif, notamment des comit�s de quartier, et une cons�cration de la culture civique et celle du vivre-ensemble �. Inefficacit� des dispositifs d�emploi de jeunes Le document �labor� par le Cnes explique que �l�emploi est l�une des pr�occupations majeures des citoyens et suite aux pertes de postes d�emploi aussi bien dans le secteur public que priv�, la seule alternative notamment pour les jeunes reste les mesures d�cid�es dans le sens de la cr�ation d�emplois �, cependant note le Cnes, �en d�pit des co�ts exorbitants engag�s dans la lutte contre le ch�mage, les dispositifs mis en place n�ont pas prouv� leur efficacit�. Les jeunes qui ont eu � s�exprimer lors des consultations se sont dits exasp�r�s par ces dispositifs et ce, � cause des passe-droits, de la bureaucratie et la mainmise de certains r�seaux occultes�. Le Cnes recommande �la r�vision globale de tous ces dispositifs et la possibilit� de transformer les projets individuels en projets collectifs orient�s, sous l��gide de l�Ansej et de la Cnac, et d�inclure la notion de l�emploi p�renne dans l�essence m�me du d�veloppement local, tout en accompagnant les jeunes promoteurs en leur accordant des avantages incitatifs pour la cr�ation de PME (petite et moyenne entreprise), TPE (tr�s petite entreprise), ainsi que des start-up (entreprises �mergentes) �. Le rapport insiste sur �l��laboration d�une strat�gie politique en faveur des jeunes�. Si on part du principe que plus de 75% de la population est constitu�e de jeunes, on peut dire sans complexe que le peuple alg�rien est jeune et pourtant leur exclusion des domaines de la vie sociale, politique et �conomique est flagrante et ne r�pond � aucune logique. D�blocage du programme des 100 locaux par commune Le programme lanc� en grande pompe et qui devait constituer une bouff�e d�oxyg�ne pour les jeunes porteurs de projets est en stand-by et souvent quand les jeunes se rapprochent des APC pour s�en enqu�rir, ils ont cette phrase en guise d�explication �l�op�ration n�est pas encore termin�e�. Le Cnes a son point de vue l�-dessus et analyse la situation en mettant le doigt sur les dysfonctionnements qui entachent l�ex�cution dudit programme. Le document souligne que le programme pr�sidentiel des 100 locaux par commune �est une tr�s bonne initiative mais son application est truff�e de probl�mes�. Le Cnes pr�cise que �ce programme enregistre un grand retard inexpliqu� dans son ex�cution� et rel�ve �les choix inappropri�s des assiettes de terrain qui sont �loign�es des habitations, la distribution opaque des locaux, leur l�exigu�t� et les conditions inad�quates en rapport avec leurs activit�s�. Le Cnes conseille de �revoir l�application de ce programme et lui donner toute l�attention qu�il m�rite�. Outre le secteur de l�emploi, le Cnes, apr�s ses moult p�r�grinations, exhorte le gouvernement � ��laborer une strat�gie nationale en faveur des jeunes car il s�av�re que les efforts consentis dans les domaines de l��ducation, la formation, l�emploi, la protection sociale, la sant� et le sport ont donn� des r�sultats en de�� des attentes de cette frange de la population�. C�est pour cette raison qu��il faut revoir la perception que l�Etat a des jeunes et r�tablir la confiance entre les deux et ce, en faisant une �valuation d�taill�e des diff�rentes politiques pour d�celer les failles et �laborer une nouvelle politique en ad�quation avec la r�alit�. Et d�ajouter : �Il est imp�ratif d�inscrire la question des jeunes dans les priorit�s urgentes du gouvernement. � Parmi les propositions, on citera �l�organisation de congr�s nationaux de jeunes qui seront un espace de concertation aptes � concentrer les visions, notamment dans l��laboration des politiques en faveur des jeunes qui regrouperaient tous les secteurs de l�Etat et dans lequel le mouvement associatif sera un acteur principal�. R�vision profonde du code des march�s publics L�une des plaies de l��conomie nationale est incontestablement l�octroi des march�s publics qui est � l�origine de la corruption qui mine l�Etat, notamment avec le lancement des grands chantiers. Le rapport du Cnes voit dans �le code des march�s actuel un texte qui n�cessite une r�vision profonde�. Il est pr�cis� que �le d�veloppement local a besoin de ressources financi�res et de suivi pour la cr�ation d�annexes r�gionales de la commission nationale des march�s publics et afin de r�duire les d�lais s�agissant des �tudes techniques des projets d�investissements. Ce qui a pour objectif d�ouvrir le champ � la consultation et aux appels d�offres pour plus de souplesse, une plus grande participation des entreprises dans l�ex�cution des programmes. Ce qui �vitera les pertes de temps et d�argent �. Le Cnes souligne qu�il faut �galement �d�terminer de mani�re explicite la d�finition de la promotion immobili�re dans le nouveau code des march�s publics�. Et de poursuivre : �Il faut et de fa�on solennelle et d�termin�e utiliser les syst�mes �lectroniques dans les op�rations financi�res et l�octroi des march�s publics et ce, pour lutter contre la corruption et lever les obstacles qui entravent les responsables locaux dans leur action.� Outre la r�vision des codes des march�s, le Cnes table sur la redynamisation du programme des 200 000 PME qui, selon l�entit� de Bab�s, �ne doit pas �tre improvis�e mais �manant d�une initiative locale partant des demandes exprim�es localement et soutenue par un accompagnement efficient, un suivi et un contr�le�. Le Cnes exhorte le gouvernement �� impliquer les grandes entreprises publiques ainsi que le priv� dans cette op�ration�. Le rapport du Cnes indique que �parmi les obstacles � l�investissement national et �tranger r�side la probl�matique du foncier industriel. Le manque de terrains pour la construction a eu pour cons�quence la concentration dans certaines villes urbaines et a caus� des dommages irr�versibles au foncier agricole, alors que les communes rec�lent un �norme patrimoine qualifi� de dormant constitu� de b�timents industriels et de terrains appartenant aux OPGI qu�il est utile d�utiliser � bon escient, surtout que ces biens sont d�j� �quip�s de toutes les commodit�s�. Ajoutez � cela, �l�autoroute Est- Ouest permet aux communes de s�ouvrir de nouvelles perspectives pour proposer des terrains industriels �. Le tourisme est l�un des moteurs du d�veloppement local et national et constitue le secteur par excellence � promouvoir pour pr�parer l�apr�s-p�trole, le Cnes souligne qu��en d�pit des tentatives pour relancer le tourisme, il subsiste beaucoup de points faibles, alors que l�Alg�rie dispose de ressources extraordinaires, � tous les niveaux, qu�il est urgent d�exploiter�. Programmes de logements insuffisants Il est clair que la crise du logement constitue l�un des n�uds gordiens, devant lequel l�Etat reste impuissant. Il ne se passe pas un jour sans qu�une liste de b�n�ficiaires ne fasse l�objet d��meutes et de m�contentements. Les programmes de logements accusent des retards consid�rables qui d�passent largement les d�lais de plusieurs ann�es sans que cela inqui�te les responsables. Le Cnes constate que �la question du logement est r�currente et elle attire particuli�rement l�attention de diff�rentes mani�res. Les programmes sont insuffisants et inadapt�s, les conditions d�acc�s ainsi que la distribution ne sont pas claires�. Le rapport insiste sur �la transparence et l��quit� dans la distribution des logements sociaux, l�augmentation des quotas r�serv�s aux jeunes. La red�finition des crit�res d�octroi du logement social pour permettre � un plus grand nombre de citoyens d�en b�n�ficier, l�augmentation des aides aux particuliers d�sireux de construire leurs propres maisons, notamment dans les zones rurales, ce qui leur permettrait une stabilit� et r�duirait les exodes, et enfin la construction de logements destin�s exclusivement � la location, notamment dans les grandes villes et les agglom�rations. Le rapport du Cnes s��tonne que �les formats de logements soient totalement inadapt�s au Sud, alors qu�ils doivent �tre int�gr�s � l�environnement saharien avec des cours, des terrasses, et des endroits am�nag�s pour les b�tes�. L�agriculture, un secteur sous-exploit� Les prix des produits agricoles ont grimp� de fa�on fulgurante ces derniers jours et aucune cellule de crise n�a �t� install�e pour en d�terminer les causes et y rem�dier. Il est vrai que le Premier ministre et les autres membres de l�ex�cutif ont plus important � faire que de s�occuper du pouvoir d�achat des citoyens. Ils sont en campagne pour glaner les voix de ces m�mes citoyens ! Le rapport du Cnes a cibl� les failles et place le secteur de l�agriculture en pole position des secteurs � forte valeur ajout�e. Il constate que ce secteur �rec�le des richesses colossales du nord au sud, d�est en ouest mais, malheureusement, elles sont sous-exploit�es et parfois inexploit�es �. Le document sugg�re de �proc�der en urgence � un balayage de toutes les terres agricoles sur tout le territoire national en tenant compte des sp�cificit�s de chaque r�gion. De prot�ger les terres agricoles en appliquant les lois avec rigueur, int�grer les �nergies renouvelables dans l�agriculture, moderniser et d�velopper toutes les formes d��levage en mettant en place un m�canisme de protection des races�. Le document pr�conise d��organiser des formations techniques en faveur des agriculteurs, encourager les jeunes � s�orienter vers le secteur de l�agriculture en leur octroyant des exploitations agricoles, organiser et cr�er des march�s pour les produits agricoles et appliquer un contr�le sur les b�n�fices des interm�diaires et mandataires afin d��viter la sp�culation, g�n�raliser l�assurance sur les risques li�s � la production agricole et, enfin, mettre en place un conseil consultatif sup�rieur de l�agriculture qui int�grerait toutes les parties prenantes aux fins d�une participation dans l��laboration des politiques agricoles�.