Entretien réalisé par Tarek Hafid Accusé par Amar Saâdani d'être utilisé par le général Tewfik pour déstabiliser le Front de libération nationale, Abderrahmane Belayat dément et affirme se limiter aux attributions que lui a conférées l'article 9 du règlement intérieur du Comité central. Le coordinateur du Bureau politique du FLN affirme ne recevoir d'instructions de quiconque. Le Soir d'Algérie : Amar Saâdani vous accuse d'être manipulé par le général Tewfik dans le but de déstabiliser le FLN. Que répondez-vous à ces accusations ? Abderrahmane Belayat : Je dois répondre à ce qui est écrit dans cette interview. Il est écrit qu'un groupe, avec à sa tête Abderrahmane Belayat déstabilise le parti. Je réponds donc en disant que je ne déstabilise pas le parti, j'exerce mes attributions. Ces attributions m'ont été confiées en vertu de l'article 9 du règlement intérieur du Comité central. Je n'ai pas besoin de recevoir d'instructions de qui que ce soit, pour quoi que ce soit. Bien au contraire, la déstabilisation vient de ceux qui sont à l'origine de la réunion du 29 août (celle qui a permis à Saâdani de prendre les commandes du FLN) et de la réunion du 16 novembre (qui a confirmé le soutien à la candidature de Abdelaziz Bouteflika). L'action de déstabilisation provient de ceux qui ont limogé les mouhafedhs. Ce n'est pas l'exercice de mes attributions qui déstabilise le parti. Et je n'ai besoin de qui que ce soit pour voir où commence et où s'arrête ma responsabilité. Je ne reçois d'instructions de personne. Cette accusation est gratuite et vaine. Voilà ma réponse. Qui est «Si Ali» ? Il faut poser la question à celui qui a dit cela. C'est des enfantillages. Que cache la sortie médiatique de Saâdani ? Je viens de prendre contact avec les membres du Bureau politique et nous avons convenu de différer notre réaction sur ce sujet jusqu'à la tenue d'une réunion. Ce sujet a dérangé la scène médiatique, nous devons donc procéder à un échange d'informations pour permettre au parti de se prononcer sur cette question. Est-ce que l'initiative de Saâdani démontre l'existence d'une crise politique au plus haut sommet de l'Etat ? Je ne peux pas vous donner mon impression personnelle. Ce n'est pas parce que je ne l'ai pas mais nous devons avant tout tenir cette réunion du Bureau politique du FLN. L'interview de Amar Saâdani comporte des accusations très graves. Il accuse le DRS de ne pas avoir protégé Abdelaziz Bouteflika, Mohamed Boudiaf et les moines de Tibhirine. Il affirme même que Chakib Khelil est une victime du DRS... Je ne veux pas m'embarquer sur cette histoire sans aucune importance par rapport à ce que dira le Bureau politique. Vous pouvez vous exprimer en qualité d'observateur de la scène politique... Je ne peux pas, j'ai une responsabilité. Je ne fais pas dans l'aventurisme et je n'ai nullement besoin de scoop dans les médias pour pouvoir exister. Est-ce que l'Algérie est aux portes d'une crise politique ? En tout cas, il faut éviter les ingrédients qui peuvent attester ces assertions. Je n'ajouterai pas quelque chose à ce qui vient d'être commis dans cette situation. Je réunirai le Bureau politique et bientôt le Comité central pour élire un secrétaire général et remettre de l'ordre dans le parti. Est-ce que le DRS s'est déjà immiscé dans les affaires du FLN ? Pourquoi cette question ? C'est ce que dit Amar Saâdani... Je ne suis pas obligé de le suivre, ce sont des turpitudes. Dire cela consiste à ignorer la trajectoire du FLN depuis 1954. Et ignorer aussi la nature du système politique depuis 1962, 1988 et 1989. On ne doit pas aborder ces questions à la légère. Il ne faut pas porter d'accusations contre ceux qui servent le pays et la sécurité du pays. Nous n'avons aucun complexe à évoquer les responsables des services de sécurité. Je connais personnellement ceux qui ont dirigé les services de sécurité du pays. Depuis Mahdi Chérif, un compagnon d'armes dans la wilaya I, jusqu'à Kasdi Merbah et Yazid Zerhouni, qui étaient avec nous au Comité central du FLN. Nous avons géré des affaires politiques ensemble. Il y a eu aussi Ferhat Zerhouni, Ali Tounsi, Khaled Nezzar. J'ai dirigé des services de l'Etat, de grands ministères, il y avait à l'époque à la tête des services de sécurité Lekhal Ayat puis Mohamed Betchine et maintenant le général Tewfik. Qu'est-ce donc que cet amalgame qui vise à jeter le doute ? Pour ma part, je n'ai eu que les relations que m'attribuaient mes fonctions. Pourquoi vouloir complexer les gens sur ce sujet ? Allez dire à un ministre en Italie ou en France pourquoi il a des relations avec tel service. En tout cas, dans les affaires du parti, je mène mes attributions en toute indépendance, en toute conscience et avec beaucoup de courage. Si réellement j'avais obéi aux instructions, je serais allé à la réunion innommable du 29 août et encore plus à la réunion du 16 novembre. Je n'y suis pas allé et c'est ma décision propre et individuelle. Je l'ai fait ! Je n'ai pas cédé. Il y a donc eu des instructions. Qui en est l'auteur ? Moi je n'ai pas reçu d'instruction. Mais eux savent. L'essentiel est que moi je n'ai pas pris de décisions politiques sous la menace. Je ne cède ni à des pressions amicales, ni aux actes comminatoires, ni même aux menaces.