L'événement a eu pour théâtre le cinéma Djamel. La séance commence par un morceau de musique andalouse exécuté au oud par le mélomane Hrach Baghdadi. Après des paroles de bienvenue adressées par le président du café littéraire, M. Boudia Mohamed, à l'invité, le Dr Amin Zaoui, M. Saadoune Bouabdellah, modérateur, présente le programme. Sous les applaudissements d'une salle bondée, les poètes en arabe se succèdent comme Allali, Boudjaltia, Ghazali, Nekaf, Mokhtari, Melle Hamiche, Melle Benahmed. Ensuite Dr Amin Zaoui va prendre la parole pour apporter un éclairage sur la genèse de ses œuvres et faire l'état des lieux de la littérature en Algérie. Pour lui la préservation de l'unité du pays passe inéluctablement par le développement de la culture. Il préconise pour ce faire de dépasser le jacobinisme linguistique. Les artistes, les écrivains, les journalistes doivent engager un véritable dialogue entre les différents courants. Nul ne doit prétendre apporter à lui seul la lumière. Tout le monde est concerné. M. Zaoui pense que c'est à partir de l'écriture que nous arriverons à résoudre le problème linguistique. Il nous confie sa grande tristesse suite au décès d'un être qui lui était cher, M. Aït Salem Kaddour, responsable de la bibliothèque de Tlemcen. Ce dernier lui a permis de lire tous les livres contenus dans cette structure. Cette passion a commencé depuis sa plus tendre enfance. Sa vie n'a été que lecture à tel point qu'il ne peut respirer sans cela. Les chambres, le couloir et même la salle de bain sont «inondés» de livres. «Un peuple qui lit est un peuple qui ne connaît pas la faim et la soumission», clame-t-il. Le conférencier nous apprend que sa première lecture est celle de l'ouvrage La chèvre de Monsieur Seguin, écrit par Alphonse Daudet. Prix de la première place de la cinquième année primaire. Sa mère, chanteuse, animait des fêtes et lui récitait des contes le soir. Il trouvait qu'elle dépassait Daudet. A présent, confie-t-il, lorsqu'il écrit, il a l'impression que c'est la maman qui lui dicte son texte en l'accompagnant d'une musique. Au collège, il écrit un poème pour une revue dirigée par Malek Haddad. Il reçoit une réponse qui va être exposée et il sera nommé «poète du collège». Il soutient qu'il faut lire 3 livres au moins pour pouvoir en écrire. Celui qui ne suit pas cette règle ne peut prétendre devenir un grand auteur. En maths elem, il a eu des professeurs qui croyaient à la créativité et la lecture. Cette génération avait un rêve. Actuellement, on a perdu ce rêve, un capital incommensurable. Les jeunes n'ont plus cette possibilité. «Tu lis ou non, c'est la même chose». C'est un suicide collectif. L'Algérie doit avoir le rêve de la diversité. Il va citer ensuite les titres de ses romans. En français, les principaux sont Le sommeil du mimosa, La Razzia, Les gens du parfum, La chambre de l'impure, Le dernier juif de Tamentit, et en arabe, Le 8e ciel. Ce dernier connaît une mésaventure. Des barbus ont acheté tous les livres pour les brûler devant une librairie. Ils ont expliqué que le 8e ciel est incompatible avec la religion. Amin Zaoui explique que l'ouvrage raconte une rencontre entre copains du service national qui affabulent sur des aventures de leur vie, sans faire allusion d'aucune manière à la religion. Ainsi tout ce qui est lu dans notre pays est rapporté au livre sacré, ce qui entraîne des malentendus. Concernant les plumes qui montent, il citera Miloud Ibrir et pense que s'il continue sur cette trajectoire il aura un avenir radieux. Il ajoutera qu'il ne faut pas prendre en charge ces jeunes écrivains d'une manière paternaliste mais développer une vraie stratégie de commercialisation de leurs œuvres. Parlant de l'engouement pour le Salon du livre, il ne trouve pas que le nombre de lecteurs a augmenté à cette faveur. Il faudrait des salons dans toutes wilayas. Il s'aperçoit que chaque ville visitée en dehors des grands centres urbains montre que du temps a été perdu pour atteindre le lectorat en ces endroits. Il en veut pour preuve la totalité de ses livres achetés pendant la vente-dédicace. Concernant la langue arabe, il pense qu'elle est très riche mais le français est très présent dans le champ culturel. C'est une langue d'ouverture vers le monde. Nous avons la chance de posséder une langue qui peut faire bouger la chose culturelle en Algérie. Les Perses maîtrisent la langue arabe car ils ont peur de l'erreur. M. Zaoui était accompagné de M. Radjedal Riad, ancien directeur d'El djazaïria TV. «J'adore ses messages percutants. Il dit les choses telles qu'il les pense. Les questions ont été au niveau de l'événement. Les intervenants ont fait part de l'ostracisme dont sont victimes les écrivains.» M. Tsabet Abderahmane, éditeur, membre de la délégation trouve que la conférence a été un grand moment de culture et que M. Zaoui a bien répondu à des questions très pertinentes.