Pas moins de dix rapports faisant �tat de graves violations de la loi sur la monnaie et le cr�dit ont �t� �tablis par une �quipe d�inspecteurs diligent�e par la Banque d�Alg�rie entre 2000 et 2002. Ces rapports ont tous �t� transmis au gouverneur de la Banque d�Alg�rie de l��poque sans qu�aucune poursuite soit engag�e. L�audition de l�inspecteur g�n�ral au sein de la Banque d�Alg�rie a �t� l�occasion pour la pr�sidente du tribunal de Blida d�insister sur le r�le jou� par Abdelouahab Keramane qui ne s�est pas pr�sent� et qui fait l�objet d�un mandat d�amener. Appel� � la barre en tant que t�moin, M. Khemoudj est revenu sur ses missions au sein de la Banque d�Alg�rie et sur les conditions dans lesquelles il a �t� appel� � effectuer des inspections au sein d�El Khalifa Bank. C�est sur ordre du gouverneur d�Alg�rie qu�une �quipe a commenc� ses investigations. Un premier rapport avait fait ressortir que �la banque n��tait pas g�r�e comme telle. Tous les dysfonctionnements ont �t� notifi�s dans un rapport transmis au gouverneur d�Alg�rie�. Une seconde mission a, par la suite, �t� d�p�ch�e. M�me constat, �la banque �tait loin d�offrir des garanties de solvabilit�. Apr�s avoir re�u ce second rapport, Keramane avait convoqu� Abdelmoumen Khalifa dans son bureau. Au cours de cette entrevue, il lui aurait signifi� verbalement qu�il devait se conformer � la r�glementation. Une r�v�lation qui fera dire � la pr�sidente de la cour, s�adressant au t�moin : �Est-il l�gal qu�un gouverneur invite dans son bureau le PDG d�une banque pour lui demander de se conformer � la loi ? N�aurait-il pas d� d�poser une plainte ? A-t-il d�j� re�u des PDG de banque qui �taient dans le m�me cas que Khalifa ?� Silence g�n� du t�moin. Il deviendra plus prolixe lorsqu�elle lui demandera d��voquer le troisi�me rapport : les irr�gularit�s �taient encore plus nombreuses et la banque ne cessait de violer all�grement la l�gislation. �Pourquoi � ce moment-l�, la commission bancaire ne s��tait-elle pas r�unie pour prendre des mesures ?� R�ponse de Khemoudj : �J�ai transmis le rapport � ladite commission. Mes pr�rogatives s�arr�tent � ce niveau. Pr�cisions de la pr�sidente : Keramane portait la double casquette de gouverneur et de pr�sident de ladite commission. C�est alors que l�inspecteur g�n�ral est appel� � s�expliquer au sujet de la quatri�me mission d�inspection. Il affirme qu�il s�agissait d�une mission �transversale� qui avait concern� l�ensemble des banques avec comme objectif de v�rifier si ces derniers ne poss�daient pas des participations qui d�passeraient 50% de son capital. Les inspecteurs ont alors d�couvert que certains cr�dits d�passaient de 73,6% le capital d�El Khalifa Bank. �Ne fallaitil pas r�agir � ce moment�, interroge la pr�sidente. M�me r�ponse du t�moin : �J�ai transmis le rapport � M. Keramane.� Au sujet de la sixi�me inspection, il dira que les degr�s de solvabilit� d�El Khalifa Bank �taient toujours loin des normes. Une mission �sp�ciale� Au mois de mai 2001, Keramane avait charg� une �quipe d�inspecteurs d�une mission particuli�re : v�rifier les op�rations de commerce ext�rieur et les domiciliations. �Est-ce que la loi vous autorisait � faire ce genre de missions. N�y a-t-il pas des personnes plus habilit�es que vous pour le faire ? R�ponse de Khemoudj : �C��tait une premi�re. C�est une mission particuli�re. L�ordre verbal venait de Keramane en personne.� Au cours de leur mission, les inspecteurs feront des d�couvertes �tonnantes : le d�partement du commerce ext�rieur de la banque priv�e �tait tr�s mal g�r�. Lorsque Khemoudj parle de dysfonctionnements, la pr�sidente de la cour r�torque : �Vous �tes trop gentil�. Ce sont en r�alit� des dizaines de violations de la loi qui sont constat�es. El Khalifa Bank op�rait des transferts sans l�aval de la Banque d�Alg�rie. Sur les 20 dossiers �pluch�s par les inspecteurs, un seul disposait de l�accord de la Banque d�Alg�rie. Sans parler des dossiers de leasing absents. A l�issue de cette mission, les inspecteurs r�digent encore une fois des rapports. On est en 2001 et c�est Laksaci qui succ�de � Keramane � la t�te de la Banque d�Alg�rie. El Khalifa Bank transf�rait de l�argent apr�s le gel des op�rations ext�rieures Revenant � la charge, Mme Brahimi demande au t�moin ce que la loi stipule lorsque de telles infractions sont constat�es. Il bafouille un moment avant de r�pondre : �A l��poque, je ne disposais pas d�inspecteurs asserment�s pouvant r�diger des PV d�infractions qui auraient pu conduire � un d�p�t de plainte.� �Est-ce que le ministre des Finances de l��poque avait �t� saisi ?� �On lui a envoy� une copie du rapport pour information�, r�pond le t�moin � qui la pr�sidente rappelle que �la loi est claire. Toute personne ayant constat� des infractions doit d�poser une plainte. Rien ne vous emp�chait de tirer la sonnette d�alarme � ce moment-l��. M�me r�ponse : �Il n�y avait pas d�inspecteurs asserment�s.� Ce n�est qu�en 2002, suite � une mission d�expertise �approfondie� que la d�cision de suspendre les op�rations de commerce ext�rieur de la banque est enfin prise. �Par quel miracle y avait-il enfin des inspecteurs asserment�s ?� demande la juge. �Ils ont pr�t� serment � ce moment-l��, r�pond l�inspecteur. C�est � cette p�riode que 9 PV d�infractions ont �t� �tablis et transmis au ministre de tutelle. En parall�le, l�ordonnance 96/22 avait �t� modifi�e et donnait au gouverneur d�Alg�rie plus de pr�rogatives. Il pouvait, lorsque la n�cessit� se faisait ressentir, actionner la justice contre les contrevenants. Alors que l��quipe des inspecteurs effectuait son travail au niveau de la banque et que les op�rations du commerce ext�rieur �taient gel�es, la banque arrivait � transf�rer des sommes colossales vers l��tranger. �Par quel miracle cela s�est-il produit ?� s�interroge la juge Silence du t�moin, incapable d�expliquer pourquoi son �quipe n�a pas demand� � acc�der au syst�me Swift de la banque. Tout au long de la journ�e d�hier, le t�moin s�est content� de rappeler que ses pr�rogatives ne lui permettaient pas de d�clencher des poursuites judiciaires. A cela, la pr�sidente a fini par r�pondre que lorsque c�est la loi qui est aussi all�grement viol�e, une pareille attitude n�gative ne pouvait trouver de justificatifs. Elle dira �galement, pour resituer les responsabilit�s des uns et des autres que �si Keramane est poursuivi, c�est justement parce qu�il avait ferm� les yeux sur ces infractions�. Et son assistance de se demander pourquoi �la Banque d�Alg�rie a-t-elle fait preuve d�autant de compr�hension � l��gard d�El Khalifa Bank ?� Silence du t�moin. Au cours de la journ�e d�aujourd�hui, d�autres membres de la commission bancaire devront s�expliquer au sujet desdits rapports. L�actuel gouverneur de la Banque d�Alg�rie sera appel� � t�moigner dans les jours � venir dans l�affaire de la banqueroute d�El Khalifa Bank. C�est ce qu�a indiqu� la pr�sidente de la cour de Blida qui a fait savoir que Laksaci avait indiqu� qu�il ne comprenait pas que les inspecteurs n�aient jamais demand� � avoir acc�s au syst�me Swift de la banque. Il s�agit en fait d�un syst�me de communication permettant d'effectuer des virements internationaux par l'�change de donn�es �lectroniques des banques. Avantages de ce syst�me : les virements se font plus rapidement et d'une mani�re plus s�curis�e, ce qui aurait pu attirer l�attention des inspecteurs sur les op�rations toujours en cours en d�pit de l�interdiction.