Les événements s'accélèrent à Tizi Ouzou qui vit depuis plusieurs jours au rythme d'une protestation quotidienne et qui prend plusieurs formes. Hier encore, et pour le deuxième jour consécutif, la capitale du Djurdjura, tous les autres centres urbains et les villages observaient encore l'opération villes et villages morts. Rien n'a fonctionné. Ni les transports, ni les administrations, ni les écoles, encore moins les entreprises relevant aussi bien du secteur public que privé ou encore les commerces. C'est dire que la paralysie était totale. Les robes noires sont revenues hier pour la seconde fois depuis le début du mouvement de protestation occuper la rue et crier leur rejet du 5e mandat et des élections et exiger le départ du système. Ils étaient environ 400 avocats à prendre part à la marche organisée dans la capitale du Djurdjura. La procession s'est ébranlée du parvis du siège de la cour de justice avant de sillonner le boulevard Larbi Ben M'hidi jusqu'au rond-point, et après l'avoir contourné, ont repris le même boulevard Larbi Ben M'hidi en le descendant jusqu'au point de départ. Les avocats ayant brandi d'innombrables banderoles ont aussi scandé une multitude de slogans comme «Système dégage !», «FLN dégage !», «Non au 5e mandat !», «Le peuple veut la chute du régime !», «Assa Azekka l'avocat yella yella !», «El-Djaïra hourra oua démocratia !», «Y'en a marre de ce pouvoir, y'en a marre !», etc. 20 sections syndicales UGTA se rebellent C'est un véritable séisme qui ébranle la Centrale syndicale et son secrétaire général. Réunis avant-hier jusqu'en début de soirée, et à l'issue de longs débats, 20 syndicats de la wilaya de Tizi Ouzou, affiliés à l'UGTA, ont pris position contre le 5e mandat du président Bouteflika, comme il a été consigné dans le communiqué consacrant cette réunion. Les syndicats ayant donc signifié leur défection et leur retrait de confiance au secrétaire général de l'Ugta, Abdelmadjid Sidi Said, ne sont pas des moindres. Il s'agit de ceux de Naftal GPL, Education, Formation professionnelle, Santé, Travaux publics, ADE, ONA, Algérie Télécom, Algérie Poste, Œuvres universitaires, ERIAD, ORAC, Sonelgaz, ONAPH, ENEL, l'IATIT, OPGI, BADR, Chemiserie LNI, Protection civile, Syndicats des artistes, les représentants des comités des retraites, et le Comité des femmes travailleuses. Ils demandent aussi le départ de Sidi Said qu'ils accusent sans ambages de «fuite en avant, d'agissement en solo et de concertations simulées contrecarrant de fait les règles d'usage statuaires en s'alliant avec un patronat hostile aux principes du syndicalisme pour soutenir un 5e mandat de Bouteflika». Les responsables de l'Université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, qui ont déjà rejeté la décision portant l'avancée des vacances du printemps du 10 mars au 4 avril prochain ont appelé à une marche des étudiants, des enseignants et qui sera élargie au public. Rendez-vous est pris pour demain mercredi, à partir de 11 h, devant le portail principal du campus Hasnaoua. Cette annonce a été précédée par un véritable coup de gueule du recteur de l'Ummto, le Pr Ahmed Tessa, qui ne veut pas décevoir la communauté universitaire et les responsables qui lui ont fait confiance. Tout en s'engageant à assumer son entière responsabilité par rapport à sa décision qui pourra être lourde de conséquences pour sa personnalité. «Je veux transmettre la réalité exacte dans laquelle se trouve cette structure universitaire que je gère. Nous avons dit la réalité à la tutelle que je respecte. Nous devrions respecter la loi pour éviter le chaos et la déstabilisation de cette enceinte. Je ne peux pas respecter la loi pour créer des troubles au sein de l'Université», dira le recteur. Ce dernier a estimé que ce calendrier de vacances prévu du 10 mars au 4 avril, alors qu'en réalité ça serait le 7 avril, puisque le 4 avril sera un week-end ne correspondant pas aux caractéristiques de son université. Ceci dit, rajoute-t-il, «les étudiants auront un mois de vacances, je me suis dit : est-ce que c'est un acte pédagogique ou une décision pour conjoncture bien déterminée ? Chaque université a ses spécificités et ses caractéristiques qui la distinguent des autres. Après moult réflexions et concertations avec les responsables de notre université, il est de mon devoir de prendre cette décision qui pourra être lourde pour ma personne qui ne compte pas devant l'intérêt de la communauté universitaire. J'explique à qui de droit ma décision que j'assume entièrement». De leur côté, les étudiants rencontrés au niveau du Campus Hasnaoua ont affirmé d'une seule voix poursuivre leurs cours jusqu'au 21 du mois en cours, comme cela été prévu dans le calendrier de vacances universitaires pour l'année 2018/2019. «Nous sommes convaincus que cette avancée des vacances a été annoncée par le ministère pour freiner la mobilisation estudiantine dans rue qui réclame le départ du système inique qui a outragé la République», lance une étudiante en licence en sciences économiques et de gestion.