Députés et sénateurs vont rejoindre ce matin leurs bancs au Parlement dans une conjoncture politique, économique et sécuritaire très particulière. Finie la douce oisiveté pour les élus du peuple qui doivent signer aujourd'hui leur rentrée politique à l'ouverture de la session d'automne du Parlement dans un climat empreint d'incertitudes à tous les niveaux. L'été a été très chaud - au propre comme au figuré - avec un regain de la nuisance terroriste, une remontée au front de Madani Mezrag et une détestable embuscade contre la ministre de l'Education, mais aussi des déclarations tapageuses de certains leaders politiques. Les députés et sénateurs étaient évidemment loin de tout ce brouhaha, comme tous les Algériens… Beaucoup estiment, à juste titre d'ailleurs, que l'APN et le Conseil de la nation ne sont que des chambres d'enregistrement. L'exécutif évoluant en roue libre dans un Parlement outrageusement dominé par les deux partis au pouvoir, à savoir le FLN et le RND, il est quasiment impossible que le Parlement joue son rôle de contrôle. Le fait est que même la loi de finances complémentaire (LFC), le texte le plus important, a été adoptée par ordonnance présidentielle. C'est dire que les deux chambres du Parlement ne font pas grand-chose pour enrichir le débat. C'est tout juste si elles servent de décor au paysage institutionnel. On comprend mieux pourquoi certains partis décident à chaque rentrée parlementaire de bouder la cérémonie protocolaire en signe de mécontentement. C'est le cas cette fois encore du FFS, qui a décidé de briller par son absence ce matin, préférant aller planter son chapiteau du côté de Souk El-Thenine à Béjaïa où il ouvre son université d'été par une conférence économique et sociale. L'été se prolonge pour le FFS Dans un communiqué rendu public hier, le FFS souligne que ses parlementaires «ne participeront pas à une cérémonie purement protocolaire d'un Parlement qui persiste dans son incapacité à jouer un autre rôle que celui de chambre d'enregistrement». Oui, mais ce grief de chambre d'enregistrement est un peu vieux sans que les députés du FFS ne décident de marcher sur les pas de leur ex-collègue Mustapha Bouchachi qui a remis son mandat faute de pouvoir l'accomplir convenablement. Le Parti des travailleurs ne ménage pas lui aussi l'Assemblée où il compte une bonne vingtaine de députés. Sa patronne, Louiza Hanoune, ne rate aucune occasion pour tirer à boulets rouges sur une assemblée où elle siège depuis 1997… Mais au lieu de démissionner d'une institution qu'elle juge «inefficace», voire «inutile», elle continue avec ses collègues du PT à la fréquenter assidument. Il est vrai qu'être député de nos jours est un statut qui fait saliver plus d'un homme politique en raison de la rente qu'il procure et des privilèges en tous genre auquel il donne accès. La révision de la Constitution au menu ? Cela étant dit, et au-delà de ces doubles jeux politiques en vogue depuis des années, cette session d'automne du Parlement intervient dans un contexte délicat. Sans doute qu'on retrouvera dans les discours de Larbi Ould Khalifa et Abdelkader Bensalah les mêmes éléments de langage du discours de Abdelmalek Sellal à l'ouverture de la réunion gouvernement-walis. La chute inquiétante des cours du pétrole et ses dommages collatéraux sur les plans de l'investissement, la dévaluation du dinar, le regain de l'activité terroriste et les incertitudes qui pèsent sur l'Accord d'Alger pour la paix au Mali sont autant de sujets brûlants qui serviront de marqueurs à cette session du Parlement. Il va sans dire que le projet de révision de la Constitution devrait tenir le haut de l'affiche parlementaire, en ce sens que certaines sources laissent entendre que la mouture finale pourrait atterrir au palais Zighoud-Youcef d'ici la fin de l'année. C'est un peu l'enjeu majeur de la présente session du Parlement. Rien ne dit cependant que le projet présidentiel sera effectivement soumis à l'approbation des élus du peuple. Bensalah et Ould Khelifa ne semblent pas être au parfum de la date de présentation de cet important projet. A chaque fois qu'ils sont interpellés sur la question les deux «têtes» du Parlement, ils préfèrent botter en touche ou tentent de s'en sortir par des pirouettes. Faut-il alors attendre quelque chose de ce Parlement qui reprend du service aujourd'hui ? Bensalah et Ould Khelifa vont donner ce matin un début de réponse.