Dès son arrivée à la tête du ministère de la culture, Azeddine Mihoubi fait parler de lui en décidant la limitation des dépenses pour certains festivals. Lors du festival d'Annaba du cinéma méditerranéen, tout le monde a remarqué que la grande ville où s'est tenue cette manifestation n'est pas dotée de la moindre salle de cinéma. Le ministre a bien raison de changer la périodicité de certains festivals annuels qui seront désormais organisés tous les deux ans pour limiter les dépenses et mieux préparer ces manifestations. La décision de Mihoubi nous a mené à nous poser des questions sur les dépenses souvent inutiles auxquelles nous ont habitués les responsables du secteur culturel depuis plusieurs décennies. On se souvient qu'il y a quelques années seulement, la chanteuse libanaise Nancy Adjrem et Wafa Wahbi étaient invitées à se déhancher devant le public algérien à plus d'un milliard de centimes chacune pour une soirée seulement. Partant de ce chiffre, on peut se poser la question sur le nombre de ces chanteurs trop onéreux invités chaque année par nos organismes et payés avec l'argent du peuple. C'est vrai que l'organisation de festivals est nécessaire et doit avoir son budget mais certaines dépenses donnent à réfléchir. Puisque l'Algérie peut faire appel à ses chanteurs résidents ou émigrés qui acceptent volontiers d'être payés en dinars, pourquoi se résigne-t-on à ramener des chanteurs et chanteuses pas forcément bons qu'on paye en milliards ? On se demande pourquoi nos chanteurs de valeur vivant en Algérie ou à l'étranger ne sont, pour certains, jamais invités. On se demande pourquoi le chanteur de valeur international Larinouna ne passe ni à la télévision ni sur scène. Pourquoi s'occupe-t-on à faire des fêtes grandioses alors que nos centres culturels, nos maisons de jeunes et nos écoles manquent d'instruments de musique ? L'art pour tous Au lieu de consacrer tout le budget à faire la fête, ne peut-on pas en consacrer une partie pour relancer la musique à l'école ? Il faut rappeler qu'au début des années 1970, la musique était une matière obligatoire dans tous les lycées et collèges d'Algérie. Ces lycées et collèges étaient également dotés d'au moins un piano. Que reste-t-il de ces classes de musique et de ces pianos ? Qu'a-t- on gagné en éliminant la musique et le dessin de nos programmes scolaires ? C'est vrai qu'on veut relancer ces matières mais cela reste insuffisant tant qu'elles ne sont pas obligatoires. Espérons que le ministre qui a pensé à limiter les dépenses pour l'organisation de certaines manifestations presqu'inutiles placera cet argent là où il faut. Il faut savoir qu'avec un milliard de centimes offert à une chanteuse, on pourrait acheter 1000 guitares ou violons de bonne qualité à nos enfants. Si on gelait tous les festivals une seule fois, on pourrait doter toutes nos écoles et nos lycées de pianos et instruments de musique. On pourrait même se permettre d'offrir des formations aux jeunes. Chaque enfant et chaque jeune devrait avoir droit à un instrument de musique ou à une trousse de peinture et une palette. C'est ainsi qu'on pourrait vraiment investir dans le secteur culturel.