Portant sur les difficultés que rencontrent les insuffisants rénaux en Algérie, une conférence de presse animée par la Fédération nationale des insuffisants rénaux était à l'ordre du jour hier au siège d'El Moudjahid. Les difficultés et les obstacles que rencontrent les personnes atteintes de cette maladie ont été le sujet principal de la conférence. Sachant que le nombre d'hémodialysés est passé de 7864 en 2006 pour atteindre 13 000 en 2008 et considérant que cette maladie n'est pas toujours reconnue et considérée comme telle en Algérie, le président de la fédération en question, Mustapha Boukheloua, a souligné le manque de prise en charge des patients par les services concernés, engendré par la méconnaissance des mécanismes complexes inhérents à ce traitement. Les traitements de l'insuffisance rénale sont l'hémodialyse, la dialyse péritonéale et la transplantation rénale. Le président de l'association explique que le premier traitement nécessite un accès au sang appelé «la fistule artério-veineuse» (FAV) pratiquée généralement sur le bras. Il insiste sur le fait que cette fistule ainsi que le cathéter (accessoire de dialyse d'urgence) qui devraient être pratiqués en milieu strictement hospitalier, font l'objet de commerce sur la voie publique, dont le prix varie entre 10 000 et 25 000 DA pour la fistule et atteint les 8000 DA pour le cathéter. Les patients trouvent non seulement des difficultés à «se procurer» une FAV, mais ils ne peuvent même pas faire recours au greffon prothétique, cette prothèse artificielle disposée en sous-cutané (entre une artère et une veine de calibre différent) qui peut remplacer la FAV. Et ce, faute de moyens, sachant que cette prothèse coûte 700 euros, sans compter le prix de sa pose. «On demande au patient d'acheter ces outils médicaux de chez l'épicier du coin, alors que les hôpitaux sont censés disposer de ce matériel. Et tenez-vous bien, lorsqu'un patient part pour une dialyse, le même médecin l'oriente vers une clinique privée où il exerce». Ce qui a rendu cette maladie «un fonds de commerce lucratif». Pourtant, «un budget colossal a été dégagé par le président de la république». De plus, le peu de néphrologues qui sont au nombre de 235 pour 235 centres de dialyse sur le territoire national désertent les hôpitaux – c'est connu – pour travailler dans des organismes privés où ils sont mieux payés (l'on a offert 400 000 DA à un néphrologue à Annaba). Le manque de formation de personnes capables de prendre en charge les hémodialysés est à relever également, selon le président de la Fédération (24 personnes seulement ont été formées à ce jour). D'après notre interlocuteur, la cellule de conventionnement de la CNAS s'occupant des maladies chroniques devrait prendre également plus au sérieux cette maladie. Et ce, en formant des médecins habiles à faire des contrôles sur le terrain en matière d'hygiène et de conditions de travail dans les centres spécialisés. Un néphrologue intervient Un néphrologue possédant une clinique de renom, présent dans la salle de conférences, est intervenu en expliquant que le problème de dialyse dans les cliniques privées revient à la loi du marché. «Selon la légende, ces centres privées se font des dunes de gains. Il n'en est rien. En découvrant cela, certains néphrologues qui ont ouvert ces centres par avidité se retrouvent contraints de ‘‘trafiquer'' les outils médicaux afin de rentabiliser leur investissement. Ce qui devient un véritable fléau alarmant qui met en danger des malades.» Ce médecin a souligné également que le ministère de la Santé leur a strictement interdit de faire des consultations et exercer ainsi leur profession en tant que néphrologue au sein des cliniques privées. «Ce qui ne nous facilite pas la tâche pour améliorer la prévention contre cette maladie», s'est-il scandalisé en laissant la parole au président de la Fédération nationale des insuffisants rénaux. Celui-ci a fermé l'audience en évoquant le handicap des insuffisants rénaux, astreints à un traitement lourd nécessitant un minimum de 4 heures d'immobilisation près d'une machine, trois fois par semaine, sans compter les déplacements. «Il s'agit d'une maladie invalidante, d'un handicap masqué, car il se vit mais ne se voit pas».