Sans surprise, le projet de loi de finances 2017 a été adopté hier par la majorité parlementaire de l'Assemblée populaire nationale (APN). Les députés du FLN et du RND n'ont pas trouvé de difficultés à faire passer le controversé texte, malgré le rejet de tous les partis de l'opposition siégeant à la Chambre basse du Parlement. «Comme une lettre à la poste», «sans trop de bruit» ou «passage en force», le PLF 2017 a été adopté par les partis de l'allégeance dans une séance plénière boycottée par les députés du FFS et d'El Adala, au moment où ceux du PT ont assisté et voté «contre», tandis que l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) s'est retirée après avoir défendu «en vain» ses amendements proposés. Dans son rapport complémentaire, la commission des finances, dominée par la majorité, a enregistré 65 propositions d'amendements mais n'a retenu qu'une dizaine dont celui relatif à l'introduction de l'article 130 bis portant réduction de 65% de la facture d'électricité au profil de familles et agriculteurs habitant des wilayas du sud du pays et de 25% pour les autres activités commerciales dans la même zone. Tension entre le PT et le RND Le tapage, le chahut, l'accrochage et l'échange d'accusations qui ont caractérisé le vote de l'actuelle loi de finances à la fin de l'année dernière n'a, cette fois-ci pas eu lieu. Pourtant, à un moment du vote des articles proposés à l'amendement, les choses ont failli déborder lorsque le député du RND, Belgacem Azouaou, s'en est vertement pris aux députés du PT les accusant «d'avoir un double discours» et de ne faire que dans «l'insulte». C'est alors les Djoudi, Taâzibt, Chouitem et autres qui se lèveront de leurs sièges pour remettre le député du RND qui est venu protester devant le pupitre, à sa place, avant que Ould Khelifa n'intervienne pour calmer les esprits. Dans les couloirs de l'hémicycle, l'atmosphère était aussi tendue qu'à l'intérieur, puisque les députés de l'opposition ont manifesté leur rejet du PLF 2017 qu'ils ont qualifié d'«antisocial» en brandissant des pancartes aux slogans multiples. «Non à l'appauvrissement des Algériens», «le mépris social mène à l'explosion», pouvait-on lire chez les députés du PT, alors que ceux de l'AAV brandissaient «carton rouge au gouvernement», «le PLF 2017 et une déclaration de guerre contre le citoyen» et «le peuple ne doit pas payer les frais de la crise». À signaler que les députés du bloc islamiste se sont retirés avant le vote final. Opposition entre boycott et retrait Contrairement à l'année dernière, les groupes parlementaires de l'opposition n'ont pas fait front commun. Chacun a été avec sa voix. Dans une déclaration, les députés d'El Adala, qui ont boycotté la séance, ont exprimé leur rejet pour un projet qui prône plus de taxes et d'impôts sur les citoyens comme solution de facilité pour combler l'échec des gouvernements à trouver une alternative à la rente pétrolière. «Nous avons opté pour le boycott pour ne pas donner de la crédibilité à cette séance», a fait savoir Lakhdar Benkhellaf, chef du groupe parlementaire du parti d'Abdallah Djaballah. Ce vote, estime-t-il, «ne donne aucun espoir qui puisse aider le citoyen à sortir de sa misère». Ramdane Taâzibt du PT a, pour sa part, dénoncé «un PLF qui aggrave les désespoirs dans le pays», avant de s'adresser au nom du PT, au chef de l'Etat à qui il demande «une seconde lecture du projet». Le député de l'AAV, issu du MSP, Nacer Hamdadouche, à qui la proposition d'amendement portant sur une réduction de 20% des salaires de parlementaires et des hauts fonctionnaires a, tout en accusant le gouvernement «d'avoir échoué», estimé que «les élus de l'APN devaient donner l'exemple aux citoyens en ces temps de crise en baissant leurs salaires». Hélas, son cri n'a pas trouvé une oreille attentive ni au sein de la commission, ni en plénière. En tout état de cause, le vote du PLF 2017, et malgré quelques échanges verbaux entre la majorité et l'opposition, n'a pas créé l'évènement. Dans le calme et après l'intervention du ministre des Finances, Hadji Baba Ammi, qui s'est contenté de «remercier tout le monde», la séance fut levée. Dans les regards des députés se lisait une seule question : «Quelles conséquences aura cette adoption ? ». Le FFS dénonce un «texte méprisant» Le FFS rejette la loi de finances 2017, adoptée, hier, par l'APN, considérant qu'elle porte «gravement atteinte aux intérêts du pays et méprise la population». «Le FFS considère que cette loi est une tentative de faire face à une débâcle économique et politique, en recourant au plus haïssable des procédés qui consiste à faire payer les couches sociales les plus démunies», a souligné le groupe parlementaire du parti dans un communiqué. Qualifiant le texte «d'antinational et d'antisocial», le plus vieux parti de l'opposition a accusé le gouvernement d'avoir décidé de faire payer les Algériens et d'épargner les barons. «Car les barons ont des entrées au gouvernement, ils sont au gouvernement. Ils risquent de devenir tout le gouvernement», explique-t-il. Aux yeux du FFS, le gouvernement préfère s'attaquer au pouvoir d'achat des Algériens, déjà fragilisé par l'inflation et la dépréciation du dinar «au lieu d'aller chercher les milliards détournés dans la surfacturation, les transferts illégaux de devises et la fraude fiscale et les restes à recouvrer». «C'est parce que le système est basé précisément sur l'absence de démocratie, de contrôle, de rigueur et de transparence qu'il a permis l'accaparement illégal, la gabegie, la corruption, le dévoiement de tous les principes de la bonne gouvernance au profit d'un clientélisme ajoutant l'arrogance au gaspillage », dénonce le FFS. Pour lui, la crise est économique autant que politique parce qu'elle concerne une économie qui, des décennies durant, a été rendue totalement dépendante de la rente des hydrocarbures. «Une économie rentière qui a créé de ce fait, au sein de l'élite politique et économique du pays une classe de rentiers. La crise que le gouvernement prétend résoudre n'est pas la crise dans laquelle se débat le pays depuis des années », explique le même parti, ajoutant qu'avec une telle loi de finances qui vient couronner tout le processus entamé avec la constitution, «on voit bien pourquoi le pouvoir n'a pas voulu entamer un vrai dialogue et prendre le risque d'aller vers des mesures qui remettrait de l'égalité devant la loi entre Algériens ». Dans ce contexte, le FFS réitère son initiative de reconstruction de consensus national, estimant que ce projet «est indispensable pour faire face à la crise multidimentionnelle qui n'est pas liée seulement à cette baisse des revenus de la rente pétrolière». Il appelle à en finir avec l'unilatéralisme et aller dans une démarche consensuelle pour sauver le pays et préserver son avenir. Pour le FFS, à l'origine de la crise nationale il y a la hogra et l'injustice et la loi de finances 2017 ne fait que légaliser la hogra et l'injustice.