Ne comprenant pas les motifs ayant amené les autorités à vouloir démolir leurs villas encore en chantier, les propriétaires demanderont audience, ce matin, au wali délégué de Draria pour préserver leurs biens. Le président de l'APC de Khraïcia sera aussi reçu en audience ce matin à la wilaya déléguée à ce sujet. Les arrêtés de démolition sont prêts, il ne reste que la signature du président d'APC. uelque quatre-vingts familles occupant des villas individuelles dans l'extension au lotissement Chérifi Saïd, dans la localité de Sidi Slimane II, commune de Khraïcia, ne savent plus où donner de la tête. Depuis la fin du mois d'avril dernier, elles vivent avec la hantise de voir leurs maisons démolies. Le nouveau quartier était en ébullition hier matin. Les résidents se sont en effet engagés dans une véritable course contre la montre afin de préserver leurs habitations, encore en chantier, de la casse, du moins suspendre la démolition afin de voir plus clair et défendre leur cause y compris devant la justice. Pour commencer, ils ont l'intention de se rendre, ce matin, au siège de la wilaya déléguée de la circonscription administrative de Draria, territorialement compétente, pour demander audience. C'est ce matin aussi que les élus de l'APC de Khraïcia se réuniront avec le wali délégué au sujet de la décision de démolir les villas de ce lotissement, apprend-on de source au fait du dossier. Les arrêtés de démolition, indique-t-on, sont sur le bureau du président de l'APC. Il ne reste que sa signature afin de commencer la casse. Les élus locaux seraient mis sous pression par la wilaya déléguée afin de les amener à signer les arrêtés. La réunion de ce matin serait ainsi décisive pour le devenir de quelque quatre-vingts familles. La décision de démolir sera-t-elle entérinée ? Tout a commencé avec Afak III Afak III est une nouvelle coopérative mise en chantier sur un immense terrain dans le lotissement Chérifi Saïd. C'est dans les alentours immédiats que des particuliers ont acheté des terrains, dès les années 1990, et ont commencé à construire sans permis. La semaine dernière, une bonne partie de la clôture de la coopérative Afak a été démolie pour des raisons que le voisinage dit ignorer. Les esprits commencent toutefois à se révolter. «Nous, nous n'avons rien avoir avec la coopérative Afak III. Nous sommes des particuliers. Chacun a acheté un terrain avec actes de propriété et a commencé à construire sa villa. Nous ne comprenons pas pourquoi les autorités veulent coûte que coûte démolir nos maisons alors que nous sommes dans nos droits», tempêtent plusieurs habitants rencontrés, hier, par le Temps d'Algérie. Les concernés, des retraités de la haute administration publique, ont perdu toutes retenue depuis le 27 avril dernier. Ce jour-là, l'APC les a rendus destinataires de mise en demeure de suspendre tous les travaux de construction en cours. C'est la police de l'urbanisme qui s'est chargée de s'assurer du suivi de cette mesure. Dans les parties en chantier des carcasses, les maçons ont abandonné leur matériel juste après le passage des agents de cette police. Les taloches et les pelles sont jetées un peu partout, en signe de mécontentement. "Ils nous ont notifié des mises en demeure d'arrêt des travaux et en même temps ils nous ont invités à déposer des dossiers portant demande de régularisation des constructions conformément à la loi du 6 mai 2008 y afférente. Si les autorités considèrent que notre cas relève de la procédure de régularisation, pourquoi cherchent-elles à démolir le plus vite possible?», s'interroge-t-on. «Il faut savoir aussi que la loi de mai 2008 accorde un délai de 5 ans afin de se conformer aux normes, soit jusqu'en 2013, pourquoi les autorités n'appliquent pas cette clause ?», renchérit-on. Toujours dans le cadre de l'application de cette loi, des résidents ont pris les devant en déposant leurs dossiers de régularisation au niveau de l'APC. «On nous reproche le fait de disposer de permis de construire. Or, les autorités locales elles-mêmes reconnaissent que 95% des constructions à Khraïcia sont faites sans permis et que leur cas relève de la loi de mai 2008», précise-t-on. Nouveau découpage administratif Après la notification des mises en demeure d'arrêt des travaux de construction, les concernés ont adressé au wali délégué de Draria, le 6 mai dernier, une correspondance d'explication, accompagnée d'une pétition (49 signatures). «Nous portons à votre connaissance que le quartier a été créé dans les années 1990. A l'époque, nous étions rattachés à la wilaya de Tipaza et nous avons introduit une demande d'intégration du quartier dans le tissu urbain. Nous avons également introduit auprès de l'APC, de la daïra et de la direction de l'urbanisme de la wilaya de Tipaza un dossier relatif à notre quartier. Le dossier a été accepté par la commission de wilaya réunie le 8 août 1994. Sur ce, une instruction a été donnée à toutes les administrations afin de procéder à la régularisation», écrivent-ils. Les pétitionnaires rappellent toutefois que le processus de régularisation n'a pas abouti du fait de l'entrée en vigueur, en 1997, d'un nouveau découpage administratif qui a fait rattacher la commune de Khraïcia au gouvernorat du Grand Alger. Le dossier de régularisation n'a jamais été transféré de la wilaya de Tipaza à Alger, regrettent-ils. Enfin, ils signalent que le bureau d'étude portugais Expo 98, chargé par la wilaya de la révision du Pdau d'Alger, a expertisé le quartier en juin 2009 pour les besoins de son étude. Les autorités considèrent le quartier comme construction illicite, mais cela ne les a pas empêchées d'alimenter une bonne partie des foyers en gaz de ville, en eau potable et en électricité, ironie-t-on. «On n'est pas près de baisser les bras. Nous avons construit nos maisons brique par brique, pendant des années et avec notre propre argent», s'emporte un retraité.