Oran s'apprête à se laisser bercer par la félicité des vacances. L'été s'installe à petites touches et avec lui, la ville prend des tons chauds. Les agences de voyages, les hôtels, les gérants de solariums , d'établissements touristiques et d'agences immobilières sont plongés dans les derniers préparatifs de la saison estivale, que certains qualifient déjà de tronquée, en raison du ramadhan qui aura lieu au mois d'août prochain. Pour le commun des oranais, les vacances se limiteront à des virées vers les différentes plages que propose la corniche. Que voulez-vous, je ne peux pas offrir des vacances à l'étranger pour ma nombreuse famille. Je me limite à les emmener à la plage pour barboter dans l'eau, c'est le seul moyen d'évasion qui est dans mes cordes. Je n'ai pas de budget spécial vacances et les folies que je me permets parfois sont financées à partir de mon salaire», avouera Saïd qui ne manquera pas de souligner que les rares endroits qui échappent au contrôle des plagistes sont interdits à la baignade. Un élu de Bousfer, une localité balnéaire, estime que pour cette année, les gérants de solariums seront strictement contrôlés. «Ils ont signé un cahier des charges et ils doivent le respecter scrupuleusement. Le temps de l'accès payant à la plage est révolu. Ce sont les prestations qui doivent être payantes», fera-t-il remarquer. Cette localité qui compte plusieurs plages, dont la très fréquentée Bomo, apporte les dernières retouches à son programme pour la saison estivale. «Vous savez, durant l'été, la population de la commune double, voire elle triple. Il s'agit d'offrir aux vacanciers les conditions d'un séjour agréable parmi nous. Nous avons entamé une opération d'embellissement de la ville. Nous avons nettoyé les plages et nous sommes fin prêts pour accueillir déjà les premiers vacanciers», dira fièrement cet élu. Un empêcheur de bronzer à fond nommé plagiste Plusieurs oranais que nous avons contactés sont unanimes à dénoncer ce qu'ils qualifient de méfaits de certains plagistes. «C'est une véritable mafia qui prend possession des plages et autres sites de baignade. Même si l'accès est gratuit, ils prennent possession de toute la plage pour vous empêcher de planter votre parasol. C'est une façon pour eux de vous faire payer une table et quatre chaises au prix fort de 500 dinars voire plus. C'est une arnaque et les services des communes doivent réagir. Certains de ces plagistes proposent même la location de jet-ski qui est en théorie interdit au niveau des plans de baignade. Les responsables de la commune doivent intervenir. «signer un cahier des charges ne veut pas dire forcément qu'on va le respecter», peste Houari qui ne manquera pas de pimenter son récit par des anecdotes sur ses multiples bagarres avec les gérants des plages. «Une fois, ils m'avaient attaqué avec des chiens et des battes de base-ball, ce sont des voyous. La plage est fréquentée par des familles et la vue de ces fiers-à-bras les repousse», dira-t-il. Kadda, le gérant d'une plage non loin du complexe des Andalouses, explique pour sa part qu'il fait partie d'une nouvelle corporation qui s'installe en Algérie. «Ce nouveau métier est chahuté par les occasionnels, ceux qui ne sont mus que par l'appât du gain. Moi je suis très bien organisé. Je prévois tout dans la panoplie de services que je propose aux familles. Je vends même les cartes de recharge téléphonique et j'ouvre mon espace aux représentants des opérateurs de téléphonie mobile. Plagiste est un métier qui souffre autant que les autres. Moi j'ai fait des virées sur les plages de la Côte d'Azur et du chapelet de plages espagnoles pour m'imprégner de ce qui se fait à l'étranger. Les vacanciers sont les bienvenus, ils sont notre raison d'être. Gai, gai l'écolier, c'est déjà les vacances... Les enfants auront pour cette année l'occasion de gambader, comme chaque été, sur les plages oranaises. La direction de la jeunesse et des sports va ouvrir 19 centres de colonies de vacances prévus pour pas moins de 6381 enfants répartis à travers plusieurs sessions. « L'opération plan bleu, entamée le 7 juin dernier, permettra cette année à plus de 22 000 enfants issus des quartiers populaires et de familles démunies de profiter des joies de la mer. L'année dernière nous avions fait profiter 20 826 enfants de cette opération encadrée par nos agents et nos animateurs», fera remarquer Hadj Cherdoudi. Pour lui, les vacances sont pour les enfants synonymes de plages et de colonies et tout sera mis en œuvre pour agrémenter leur quotidien. «Nous allons tenter de les extirper de l'oisiveté qui les menace dans certains quartiers démunis», précisera-t-il avant d'ajouter : «nous allons animer les sites de baignade et les communes balnéaires. Nous comptons organiser, à partir du 4 juillet prochain au théâtre de verdure Hasni Chekroun, le festival national de la musique moderne qui regroupera plusieurs formations musicales venues des quatre coins du pays». Un programme spécial vacances pour les hôtels Certains complexes hôteliers de la corniche oranaise affichent déjà complet pour le mois de juillet. «Que voulez-vous durant le ramadhan, l'activité sera relâchée. Nous proposerons durant le mois d'août des soirées festives ouvertes aux clients de passage. Les réservations connaîtront une chute durant ce mois», dira le gérant d'un complexe privé dans la commune de Aïn El turck. La vingtaine de bungalows que compte son établissement affiche déjà complet pour le mois de juillet . «C'est une clientèle composée d'émigrés et de vacanciers venus des autres wilayas. Nous proposons des formules de séjour d'une semaine, quinze jours et d'un mois en fonction des budgets de la clientèle, en demi-pension ou en pension complète. Notre souci n'est pas uniquement la rentabilité, mais nous veillons aussi au confort de notre clientèle. L'année dernière nous avions enregistré de grosses pertes à cause du mois sacré et cette année, ça risque d'être la même chose. Nous allons tenter de varier nos prestations pour compenser le manque à gagner», dira-t-il avec une moue. Les agences immobilières, aussi bien de la corniche que du centre-ville, veulent prendre elles aussi leur part du gâteau. «Nous proposons des locations aux familles en fonction de leurs moyens et de leurs désirs. Elles peuvent louer une villa, un appartement meublé offrant toutes les commodités, ou une simple chambre dans une location groupée. Nos prix sont fixés en fonction des montants exigés par les propriétaires. Ils peuvent aller de 60 000 dinars pour un mois pour une chambre en location groupée à 150 000 voire 200 000 Dinars pour un appartement cossu ou une villa les pieds dans l'eau. Nous ne sommes que des intermédiaires dans un marché que nous ne contrôlons pas», fera remarquer le gérant d'une agence immobilière. Les voyages organisés, une formule attractive L'agence Bel Eden, un pionnier dans le domaine du voyage et des séjours organisés aussi bien en Algérie qu'à l'étranger propose pour cet été plusieurs formules, dont la plus prisée est la destination Istanbul-Antalya( Turquie). «C'est une destination qui attire une clientèle variée. Les feuilletons turcs lui ont servi de support. Nous proposons des séjours de 11 jours (7 nuitées à Antalaya et 3 à Istanbul). C'est une destination à la mode qui attire beaucoup d'étudiants», fera remarquer un responsable de cette agence. Pour lui, les événements qui se sont déroulés en Egypte et en Tunisie n'ont pas grandement influé sur la demande pour ces destinations. «Certains de nos clients continuent pour cet été de nous réclamer ces destinations», dira-t-il. Les étudiants entre la plage et la débrouille Les étudiants veulent passer des vacances utiles. Joindre l'utile à l'agréable est leur crédo. « Moi j'ai besoin aussi de travailler comme surveillant de baignade pour passer des vacances et gagner un peu d'argent qui me sera utile à la rentrée», dira Ali. Saïd, quant à lui, s'est improvisé DJ pour animer les fêtes de mariage. «J'ai mon carnet de commandes déjà plein. C'est de bon augure. Je pourrais travailler et m'amuser», dira cet étudiant en traduction. Plusieurs autres étudiants et jeunes oranais partageront leur quotidien entre des virées vers les plages et le travail comme vacanciers. Et dans ce registre, les pizzerias, les magasins, et beaucoup d'entreprises privées proposent des postes temporaires pour faire face au flux estival et pour remplacer leurs personnels partis en congé annuel. Et en attendant que les vacances soient bien lancées, le directeur du tourisme de la wilaya affirme que tout a été fait pour permettre à Oran de défendre son image de ville accueillante.