Réunis en session extraordinaire, les chefs des diplomaties arabes cherchaient à trouver un moyen de sortir de la crise. Il ne fait pas de doute que la réunion extraordinaire de la Ligue arabe, avec pour seul point d'ordre la crise irakienne, ne se trouve devant un dilemme difficile: comment concilier le voeu de nombre de dirigeants arabes, de voir Saddam Hussein quitter le pouvoir volontairement, pour ouvrir la voie à une solution pacifique, et ceux qui cherchent cette même solution sans pour autant s'ingérer dans les affaires internes de l'Irak. Honni par de nombreux dirigeants arabes, le président irakien ne doit s'attendre à aucune circonstance atténuante, ou compréhension, de leur part. Plus, d'aucuns lui font porter la responsabilité exclusive (!) de l'actuelle crise qui pourrait induire une guerre dommageable pour toute la région arabe. Si la position pro-américaine du Koweït peut s'expliquer, à la limite, d'autres dirigeants arabes n'en conseillent pas moins aux «frères» irakiens de bien peser et comprendre la situation où ils se trouvent. Ainsi, le roi de Bahreïn, Hamad Ben Issa Al Khalifa, dans une déclaration rendue publique à Manama, peu avant l'ouverture de la réunion du Caire, incita à «appeler les frères arabes à expliquer avec franchise à l'Irak le sérieux de la situation» indiquant «Si aujourd'hui les Arabes ne conseillent pas à l'Irak, sincèrement et d'une seule voix, de ne pas aller à de fausses interprétations (des intentions de Washington), nous craignons que cela (ne donne lieu) à de nouvelles frappes». De fait, le roi bahreïni demande à Saddam Hussein de partir de son propre gré plutôt qu'il n'y soit obligé par l'armée américaine. Cette déclaration du souverain de Bahreïn semble résumer le sentiment général des pays du Golfe qui, peu ou prou, adhèrent à la nécessité du départ, d'une manière ou d'une autre, du président Saddam Hussein. S'il est possible de l'obtenir sans recourir à la force ce serait tout bénéfice, tant pour le peuple irakien que pour le bien-être de la région semblent-ils dirent. Sans être aussi direct que le roi de Bahreïn, le président égyptien, Hosni Moubarak, qui n'en pense pas moins, table sur une «solution pacifique» estimant: «Nous ne pouvons pas arrêter la machine militaire (américaine), mais nous pouvons influencer la situation et chercher une solution pacifique». Hier, dans les coulisses de la Ligue arabe un certain clivage était perceptible entre ceux croyant encore en la possibilité de sauver ce qui peut l'être et ceux faisant montre d'un pessimisme peu encourageant. En fait, peu de diplomates partageaient l'optimisme exprimé par le ministre irakien des Affaires étrangères, Najji Sabri, fort de la démonstration de force de la société civile internationale disant non à la guerre voulue par Bush. Affirmant que «tous les Arabes rejettent l'agression contre l'Irak» le chef de la diplomatie irakienne estime que «les chances existent toujours pour ceux qui croient à la paix». Ce qui recoupe quelque peu la position exprimée par le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, selon lequel les rapports des experts de l'ONU «a mis en évidence la coopération croissante entre l'Irak et les inspecteurs» Amr Moussa souligne le fait qu' «il faut donner une chance aux inspecteurs et aussi (donner) la chance au gouvernement irakien de désarmer conformément à la résolution (1441) du Conseil de sécurité». Les travaux du Conseil ministériel de la Ligue se sont poursuivis dans la journée d'hier, sans qu'aucune date de la tenue du Sommet extraordinaire ne soit donnée à l'issue de la première séance de travail. Dans une déclaration, Amr Moussa a affirmé «le rejet unanime des pays arabes de toute action militaire contre l'Irak» soulignant que «toute décision ressort du Conseil de sécurité». M.Moussa précise d'autre part, que les pays arabes «se sont mis d'accord sur la nécessité de ne fournir aucune coopération de nature à faciliter l'agression contre l'Irak». Notons que le ministre grec des Affaires étrangères, Georges Papandréou, président du Conseil des ministres de l'UE et le Commissaire européen, Chris Patten, ont participé au titre d'observateurs, une première, à une partie des travaux du Conseil ministériel de la Ligue arabe.