La désolation change de camp. Elle était du côté du père Yaâqob et son fils aimé Youcef. Voilà maintenant que par un retournement de situation, ce sont les frères, les pires calculateurs et les pires envieux qui sont pris au piège par le jeu de celui-là même qu'ils avaient cru enterrer vivant au fond d'un puits ou du moins éloigner à tout jamais dans une terre étrangère. Toutefois, il s'agit de noter que ce n'est pas dans un esprit de revanche que Sidna veut les éprouver ou leur faire du mal. Ce n'était nullement son intention. Il avait tout un autre but, celui en plus de remuer leur remords et leur conscience, de faire parvenir à travers eux le message codé pour son père que lui seul peut déchiffrer. Ayant échoué à faire revenir l'intendant sur sa décision de retenir Benjamin, les frères se retirèrent dans un lieu pour se concerter sur ce qu'il y avait lieu de faire, sous la conduite de leur frère aîné. En voici comment la scène est rapportée par le saint Coran: «Lorsqu'il eurent perdu tout espoir de l'attendrir, ils se concertèrent. L'aîné dit: «Oubliez-vous que votre père vous a fait prendre un engagement devant Dieu? Oubliez-vous ce qu'antérieurement vous avez commis au détriment de Youcef? Jamais je ne quitterai ce pays, quant à moi, avant que mon père me l'ait permis ou que Dieu m'ait donné gain de cause, car il est le meilleur des juges.» (80) «Retournez auprès de votre père et dites-lui (Père, son fils a commis un vol !) Nous n'avions attesté que ce que nous savions et nous ne pouvions garantir l'imprévisible.» (81) «Questionne à ce sujet, les gens de la cité où nous sommes allés nous approvisionner, ainsi que la caravane avec laquelle nous étions partis et tu constateras que nous disons la vérité !» (82) Le reste nous montrera la justesse du jeu avec ses frères, auquel s'était adonné Sidna Youcef qui s'était rendu maître de la situation. Le deuxième message fut justement reçu cinq sur cinq par son père. Benjamin, pur produit de son éducation rendu coupable de vol de la coupe du roi ! Il ne restait que ça. La plaisanterie, grosse comme une couleuvre, avait assez duré. Pour lui, ce fut la preuve certaine que c'était bien la signature de son fils Youcef et que le dénouement total était proche comme nous le verrons dans le deuxième retour.