Mme Louisa Hanoune dénonce fortement l'implication des corps constitués dans ce scrutin électoral Crainte, bagarre, colère, manipulation, jeux tactiques, joie: ambiance des élections. Il pleut sur la ville. Il fait très froid à Rouiba (banlieue est d'Alger) en ce jeudi 29 novembre 2012, jour des élections locales. Il est 8 h du matin, le bureau de vote des Orangers ouvre ses portes. L'affluence est quasi nulle. C'est la panique! Les partis politiques et les responsables du bureau craignent le désastre, celui de voir les conditions météorologiques dissuader les citoyens à aller voter. «Je ne pense pas que les gens se déplaceront en masse. En tout cas, si j'étais à leur place, je resterais bien au chaud à la maison», murmure la représentante d'un parti politique à une de ses «consoeurs». 8h15, hop un ouf de soulagement. Un vieil homme, panier de provisions à la main, entre dans la cour de l'établissement. «Enfin!», lâchent les observateurs des partis politiques pour lesquels ce quart d'heure paraissait une éternité. Juste après ce vieillard, d'autres électeurs suivirent. «El hadj nous a apporté sa baraka», lance avec un sourire un surveillant de boîte. Plus les minutes passent, plus le nombre de votants augmente. «Mais cela reste insuffisant», soulignent, dans leur majorité, les candidats à ces élections. Insuffisants, car les enjeux sont énormes dans cette petite commune qui est la plus riche d'Algérie avec les taxes et autres impôts provenant de sa zone industrielle qui s'étale sur une superficie de 1000 hectares. Mais le cadre de vie ne reflète en rien les «800 millions de dinars du budget annuel additionnés aux milliards des budgets qui n'ont pas été consommés lors du précédent mandat», soulignent un candidat du Mouvement des nationalistes libres (MNL). Louisa Hanoune voit rouge Même le jour du scrutin, certains partis continuent à faire campagne. Ils ont mobilisé leurs troupes pour accoster les citoyens aux alentours des bureaux de vote, à la sortie des quartiers, mais aussi devant les commerces. Les personnes âgées étaient les plus ciblées. On leur chuchote à l'oreille le numéro à glisser dans l'urne. Dans les autres bureaux de vote à Rouiba l'ambiance est pratiquement la même: rien d'anormal à signaler, tout se passe dans de bonnes conditions. Seulement voilà, aux environs de 11 h, c'est l'effervescence au centre M'hamed Ishak de la même commune. Deux bureaux de vote de ces centres sont pleins de monde. Des jeunes inconnus de Rouiba. Les partis politiques et les citoyens sont surpris par ces «intrus». La tension monte d'un cran lorsque les citoyens ont appris qu'il s'est agi de corps constitués. «Ils sont près de mille à s'être inscrits dans le fichier électoral!» L'information fait le tour de la ville. Les citoyens commencent à crier leur colère. «Comment des gens qui n'habitent pas dans la commune vont choisir au même titre que moi les élus locaux?» peste Aâmi Slimane. Ce citoyen a été rejoint par d'autres. «Ne vous inquiétez pas, ne vous inquiétez pas, on a voté blanc», se sont excusés ces jeunes «intrus». Au même moment, 23 partis ont saisi par écrit la Cnisel pour dénoncer le vote «collectif et orienté» des militaires. «Seuls le FLN, le MSP et Ennahda n'ont pas signé le document», révèle un candidat du MN. On prend la direction vers le siège du Parti des travailleurs, à Belfort. A l'intérieur du siège, des journalistes attendent un point de presse de Mme Hanoune, le porte-parole Djelloul Djoudi fait patienter les journalistes. Hanoune, sourire contrarié arrive. Courroucée, elle dénonce fortement l'implication des corps constitués dans ce scrutin électoral. «Plusieurs militaires ont été acheminés de leurs casernes vers des bureaux de vote pour accomplir leur devoir électoral, alors qu'ils sont censés voter par procuration», a dénoncé, avec insistance la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune. «On ramène des militaires par bus», a accusé Mme Hanoune. «Ce vote des militaires a été relevé dans plusieurs wilayas, selon des rapports des observateurs et des responsables locaux du parti», a-t-elle souligné avec colère. Elle cite, PV à l'appui, plusieurs wilayas où a été signalé le vote des corps constitués: Djanet, Illizi, Blida, Béjaïa, Laghouat, Oum El Bouaghi, Béchar, Jijel et Oran. «Les représentants des partis ont demandé l'annulation du vote dans ces bureaux», a-t-elle dit. Après ce constat, Mme Hanoune qui a précisé que «l'instrumentalisation de l'armée» était la plus grande anomalie de la journée, nous continuons notre tournée dans les bureaux de vote de la banlieue Est d'Alger. El Harrach, Bab Ezzouar, Aïn Taya...force est de constater que toutes les conditions étaient réunies pour la réussite de ce scrutin. Tout s'est passé dans de bonnes conditions, mis à part le fait que les foules ne se bousculaient pas! Ici votent les corps constitués La journée s'est poursuivie au même rythme jusqu'à 20 h, moment de fermeture des bureaux de vote. C'est l'heure du dépouillement au bureau de vote M'hamed Ishak. «Nul, nul, nul, nul, FLN, FLN, RND et quelques bulletins des autres partis...», sont les bulletins majoritaires tirés au fur et à mesure des urnes. Le gagnant de ce bureau a été le FLN avec 46 bulletins, le RND, 22 bulletins et enfin le PT, le MNL, le parti Noor el Djadid avec une dizaine de bulletins chacun. Le nombre élevé de bulletins nuls avait quelque peu calmé les esprits. Dépouillement terminé, les partis prennent la direction de leur «QG» de campagne. C'est l'heure des comptes. La journée électorale s'est achevée dans une ambiance de fête, quand même..