«si la Kabylie a été visée en 2001, c'est en réalité le pétrole du sud du pays qui est convoité.» Louisa Hanoune n'est ni une femme de fer comme Margareth Tatcher, qui a laissé mourir de faim les militants irlandais ni une pasionaria espagnole qui enflamme les foules par ses discours pleins de feu. Et pourtant, bien des pays nous l'envient. Parce que non seulement cette femme qui a connu les affres de la prison sous l'ère de Chadli Bendjedid, a toujours été fidèle à ses idées, mais en outre, elle a su marquer le multipartisme de son empreinte indélébile. Pour toutes ces raisons, elle est l'Algérienne en or (sans jeu de mots avec son nom louisa qui signifie louis d'or). Depuis 1988, juste après le chahut de gamins, elle a surfé avec délicatesse sur les événements et les contradictions de ce pays, tiraillée entre son attachement à ses traditions et ses aspirations à la modernité. La montée en puissance de l'ex-FIS, son occupation des rues, puis l'interdiction de ce parti, ne l'ont pas impressionnée outre mesure. Beaucoup s'attendaient à voir en Louisa Hanoune une adversaire acharnée de l'intégrisme, vu son idéologie trotskiste, marxiste, qui considère la religion comme l'opium du peuple. Elle s'est révélée au contraire comme la meilleur alliée d'Ali Benhadj et d'Abassi Madani, leur meilleure avocate en tout cas, auprès de l'opinion publique et des institutions internationales. Ce faisant, elle a sûrement obligé les chouyoukh à revoir l'image qu'ils se font de la femme algérienne. Sans hidjab et sans niqab et sans renoncer d'un iota à ses convictions de femme militante laïque, elle a amené les leaders les plus machos du pays à s'incliner devant elle. D'Abdallah Djaballah qui a contresigné avec elle le contrat de Sant Egidio à Ali Benhadj qui lui a rendu une visite de courtoisie à sa sortie de prison. Tout cela parce que par la cohérence de son discours, la fidélité à sa ligne travailliste, son attachement à une véritable démocratie, mais surtout son respect de l'opinion contraire, fût-ce celui des intégristes, elle a montré une continuité et une cohérence qui n'ont jamais été prises en défaut. Nous ne parlons pas ici de son bagout et de son charisme qui sont certains, comparativement à d'autres leaders politiques dont le discours est rasant, pour ne pas dire soporifique. Non, nous parlons de ses positions politiques qui sont claires et qui sont basées sur des principes. C'est une femme qui ne marchande pas. Et elle n'a pas de fil à la patte. Cela est si important que les électeurs ne s'y sont pas trompés, qui lui ont permis, face aux éléphants du FLN, du RND et du MSP, d'être élue à l'Assemblée populaire nationale avec plusieurs de ses compagnons. Le fait même que le siège du PT soit situé en plein coeur d'un quartier populaire à Alger, (El Harrach pour ne pas le nommer) en dit long sur l'implantation populaire de ce parti. Qui plus est, Louisa Hanoune est la première dame de ce parti. Sur le plan politique, ses idées sont sans ambiguïté. Vis-à-vis de la question amazighe par exemple, elle affirme qu'elle prône son officialisation sans passer par le référendum, même si elle égratigne les archs au passage, en disant que «si la Kabylie a été visée en 2001, c'est en réalité le pétrole du sud du pays qui est convoité». Là, bien sûr, nous entrons dans le détail de la politique du PT, basé sur le rejet des multinationales, du FMI, des privatisations, etc. Elle a raison sur plusieurs aspects, quoique sur le plan économique, elle développe un discours qui rappelle quelque peu les années 70. Mais le monde évolue à une grande vitesse et les recettes d'antan sont dépassées aujourd'hui. Néanmoins, on ne le dira jamais assez : en entrant dans l'arène électorale, Louisa Hanoune est la première femme du monde arabe à briser un tabou millénaire. Par son courage et sa pugnacité, elle a montré la voie à suivre à toutes les femmes de ce pays et du Maghreb. Et bien des Algériennes vous le diront: au matin du 8 avril, c'est à Louisa Hanoune qu'elles donneront leurs voix. Beaucoup d'hommes aussi.