Depuis seulement quelques années, l'université de Béjaïa a pu devenir un pôle de formation et de recherche important. L'Expression: Comment s'est déroulée la rentrée universitaire à Béjaïa? Pr.Djoudi Merabet : Avant de parler de la rentrée universitaire, je tiens à revenir sur la réussite de l'année académique 2003-2004 qui s'est déroulée dans de bonnes conditions. Ce qui a permis de réaliser la totalité des programmes, de tenir les différentes séries d'examens et de soutenir les mémoires de fin de cycle dans les délais. Donc le retard habituel est indéniablement atténué. Cela est le fruit des efforts fournis par toute la famille universitaire. Je saisis l'occasion pour souhaiter la bienvenue aux nouveaux étudiants de l'université de Béjaïa et de les féliciter de l'avoir choisie ou d'y être orientés. Nos nouveaux étudiants doivent savoir que l'enseignement dispensé est de qualité reconnue. Nos licenciés et ingénieurs brillent toujours lors des concours de magistère ou d'accès aux grandes écoles et même dans leurs études à l'étranger. Pour revenir à votre question, d'abord je souligne, que l'université de Béjaïa en réceptionnant la deuxième tranche du campus d'Aboudaou, offre un nombre de places pédagogiques qui dépasse le nombre d'étudiants inscrits. C'est pourquoi, il est nécessaire d'indiquer que tous les nouveaux étudiants ont été pris en charge sur le plan pédagogique. Sur le plan oeuvres universitaires, nous enregistrons un retard dont les conséquences se répercutent directement sur la pédagogie. Qu'en est-il de l'intégration du système LMD? Je dirai que le dispositif LMD est une chance pour l'étudiant. En effet, l'intérêt majeur de cette réforme c'est qu'elle place l'étudiant au coeur du dispositif. Il en découle une flexibilité des parcours de formation, une mobilité nationale et internationale, un choix du parcours pédagogique, un accompagnement des équipes pédagogiques, un tutorat, etc. Dix établissements d'enseignement supérieur dont Béjaïa, sont habilités à mettre en place le dispositif LMD et seulement dans certains domaines. En effet, l'université de Béjaïa est habilitée pour le MIAS (mathématiques et informatique appliquées aux sciences), le ST (sciences et techniques), le SM (sciences de la matière), SNV (sciences de la nature et de la vie), langue anglaise et langue française. Dans ces domaines ouverts, l'université enregistre plus de 1600 inscrits. Ce chiffre est important, puisque nous avons le fonctionnement des deux systèmes. Il n'y a plus d'orientation par l'échec dans les domaines ouverts. Le plan de développement de l'université sur le plan pédagogique et scientifique est revu sur la base du nouveau dispositif. Il est important de signaler qu'au départ, l'université de Béjaïa a déposé au niveau de la commission nationale un dossier pour l'ouverture de 33 licences dont 19 professionnelles. L'accord est donné pour un certain nombre de domaines, ainsi je rassure les étudiants que la mise en place de ce dispositif sera menée à bien et dans les normes requises. Vous avez toujours insisté sur l'enseignement de qualité et le niveau des formateurs. Qu'en est-il de l'effectif enseignant à Béjaïa? L'effectif enseignant titulaire s'élève à 650. Un nombre honorable par rapport même à beaucoup d'anciennes universités. Pour cette année, nous disposons de 108 postes à pourvoir dans l'immédiat en plus de la première session que nous avons dotée de 47 nouveaux enseignants. Le manque d'enseignants touche essentiellement quatre départements: français, anglais, droit et informatique. Le déficit dans ces disciplines est d'ordre national. D'ailleurs, il n'est point dû à des contraintes de postes budgétaires, mais seulement à l'absence de candidatures. Pour pallier ce manque, nous avons accordé un grand intérêt à la post-graduation en multipliant le nombre des inscrits dans les 24 spécialités. Nous avons accéléré les soutenances des thèses en renforçant l'encadrement. Les deux écoles doctorales en informatique et en français, permettront à l'avenir de combler ce déficit. Le recours à la coopération internationale est aussi envisagé. Avez-vous entamé des démarches de partenariat international? Nous considérons la coopération comme un catalyseur de la qualité de l'enseignement et de la formation des formateurs. Plusieurs programmes de coopération sont à un stade avancé avec de nombreuses universités étrangères, essentiellement européennes. Nous avons aussi une expérience avec les universités maghrébines. Sur ce plan de coopération, la France figure en première place, notamment avec les accords CMEP, CNRD et DEF et l'enseignement à distance. Ce partenariat a renforcé l'encadrement en post-graduation et en écoles doctorales. Il est important de signaler que cette option nous a permis de créer et d'entretenir de bonnes relations avec nos compétences à l'étranger. La coopération nationale est aussi privilégiée et ce avec les universités et les écoles algériennes chacune dans sa spécialité. Le partenariat est également élargi au secteur économique avec 13 conventions signées et mises en pratique avec des entreprises publiques et privées. Les compétences et l'expérience dont disposent ces sociétés sont à rentabiliser en matière de formation et d'encadrement des études et des thèses. Depuis quatre ans, l'université de Béjaïa a connu un remarquable développement, notamment en matière d'infrastructures pédagogiques et sociales. Où se trouve le secret, Mr le recteur? Si vous le dites, tant mieux pour l'université de Béjaïa et pour la région. Monsieur le wali de Béjaïa a joué un rôle primordial dans la réussite des projets de l'université. Une coordination étroite existe entre les services de la DLEP et l'université. Un groupe de travail mixte (DLEP - université) suit quotidiennement les travaux. Effectivement de septembre 2000 à septembre 2004, il est réalisé plus de 14.000 places pédagogiques et 7000 lits. Ces réalisations sont conformes aux normes internationales et dotées de toutes les commodités de l'enseignement et de la recherche. C'est le cas du nouveau pôle d'Aboudaou et de la cité universitaire d'Iryahen. Il n'y a pas de formule magique. Le secret est certainement dans la meilleure conjugaison des efforts et des idées. Dans notre université, nous avons toujours privilégié le dialogue, la concertation et une gestion de rassemblement, mais nous insistons sur la discipline et la rigueur. Par ailleurs, nous sommes convaincus que les cadres de concertation (comités pédagogiques, conseils scientifiques et autres) constituent des centres de propositions importantes qu'il faut savoir valoriser et exploiter. Vous avez évoqué un concept nouveau dans le jargon universitaire. Au juste qu'est-ce que vous entendez par rentabiliser les infrastructures? L'université doit ouvrir ses portes la nuit pour plus de rendement. L'expérience de Béjaïa est à prendre au sérieux dans ce registre. Travailler de 18 heures à 20 heures permettra d'offrir 2 000 places pédagogiques supplémentaires. L'ouverture de la bibliothèque, des points informatiques et des laboratoires jusqu'à 23 heures, est aussi possible. Ce qui atténuera la pression habituelle le jour sur ces endroits, surtout la bibliothèque et permettra à chaque étudiant d'utiliser et de manipuler suffisamment les supports pédagogiques. L'amélioration de la sécurité interne dans les campus est un facteur encourageant. D'ailleurs cette démarche permettra de créer une nouvelle dynamique tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des campus. Réaliser des milliers de places pédagogiques à coup de milliards nous interpelle pour rentabiliser les infrastructures. Fermer ces infrastructures quatre mois par année, doit nous pousser à réfléchir. De même pour les résidences universitaires. L'université de Béjaïa a vécu plusieurs mouvements de protestation ; travailleurs, enseignants et étudiants. Quels sont les rapports que vous entretenez avec ses parties? Notre slogan et notre entière conviction reposent sur le dialogue comme meilleur et unique moyen pour régler les problèmes. Mais cela ne peut aucunement être compris comme une concession ou abdication aux contestations entraînant pratiquement sous forme de chantage et généralement des dépenses gratuites de temps et d'énergies pour tout le monde, notamment les étudiants. Car la genèse de la majorité des conflits est d'ordre national. Les éléments dénominateurs sont le logement pour les enseignants et travailleurs et les oeuvres universitaires pour les étudiants. Concernant les enseignants, avec le concours de la Wilaya et du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme, il est octroyé 60 logements F1 à titre provisoire au sein de la ville de Béjaïa et 100 logements (F 3, F4) au niveau de la ville d'El kseur. Par ailleurs, il est proposé le logement social participatif et même des formules d'achat immédiat par des prêts bancaires. Comme vous le constatez, l'université n'est pas responsable de tout cela. Je dis aux collègues enseignants que celui qui est dans la nécessité ne refuse rien et celui qui refuse, suppose qu'il est dans des conditions meilleures que ce qu'on lui offre. Il va sans dire que l'université ne doit pas être détournée de sa vocation, elle n'est pas et elle ne doit pas être une agence sociale. La culture d'université prend plus de temps que le formatage des disques durs, mais la culture d'assisté a fait beaucoup de mal à l'université et à notre pays. On veut bien pour une fois s'occuper de ceux qui travaillent, de ceux qui soutiennent leurs thèses en un temps acceptable, de ceux qui préparent leurs polycopiés, de ceux qui publient, etc. La lecture du plan de développement quinquennal de votre établissement annonce un projet si ambitieux et un avenir si prometteur. Comment comptez-vous le réaliser? La tutelle a toujours répondu positivement à nos sollicitations. Car nous les avons clairement formulées, solidement argumentées et tenacement défendues. Puis, nous savons ce que nous voulons. Nous avons pour ambition à très court terme de devenir une université moderne, de former des cadres de qualité, de normaliser nos tâches de gestion et de certifier nos laboratoires pédagogiques et de recherche. Par ailleurs, nous maîtrisons la majorité des paramètres d'évaluation de notre établissement depuis sa création. Nous comptons beaucoup sur le programme complémentaire de soutien à la relance économique qui va éventuellement nous permettre de finaliser le campus Aboudaou. Lors de sa dernière visite à Béjaïa, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a mis l'accent sur les résidences universitaires. Quelles appréciations faites-vous des résidences? Oui, Monsieur le ministre a mis l'accent sur certains comportements négatifs au niveau des résidences universitaires de Béjaïa et il a demandé à ce que la réglementation soit appliquée. Il a par ailleurs, accordé une enveloppe budgétaire conséquente pour la rénovation de toutes les anciennes résidences de Béjaïa. Il est important de signaler qu'en matière d'infrastructures, 50 % des opérations inscrites pour l'université de Béjaïa sont réservées aux oeuvres universitaires (les 50 % restants concernent les infrastructures pédagogiques). Concernant mon appréciation personnelle sur les résidences universitaires de Béjaïa, je crois être en résonance parfaite avec l'ensemble des remarques faites par Monsieur le ministre. Béjaïa détient le triste record en matière de taux d'hébergement 72 %. En plus j'ajouterai que personnellement je souhaite que l'aide directe soit accordée à l'étudiant méritant et nécessiteux. Le prix de revient de l'étudiant aux oeuvres universitaires est supérieur à celui de la pédagogie. Je souhaite que l'argent soit donné directement à l'étudiant pour qu'il apprenne à se prendre en charge. Cette démarche permettra de résoudre tous les problèmes que subissent aujourd'hui les étudiants, les gestionnaires et même les travailleurs des oeuvres universitaires. Continuer à assister les étudiants, les enseignants et les travailleurs, ne peut que se répercuter négativement sur l'université. Et pour conclure... Je lance un appel à toute la famille universitaire de Béjaïa pour fédérer et doubler les efforts afin de préserver les acquis et les réalisations. Les investissements consentis par l'Etat et les efforts fournis sont énormes. La démarche c'est l'innovation, la création, la liberté du choix, le compter sur soi, l'encouragement de l'excellence et des compétences, la liberté, la rigueur... Je dis aussi qu'il est nécessaire qu'on s'occupe de ceux qui travaillent, de ceux qui soutiennent leurs thèses en un temps acceptable, de ceux qui préparent leurs polycopiés, de ceux qui publient, et enfin de ne pas nous empêcher de travailler. L'université en chiffres Nombre des nouveaux étudiants : 7294 Effectif global : 21 624 Capacité d'accueil globale : 21.972 dont 10.152 à Targa Ouzamour et 11.820 à Aboudaou. Nombre d'options ouvertes :43 Effectif enseignants : 650 Effectif ATS:480.