Morts par-ci, mutilés par-là, accidents de la route, pertes humaines et matérielles... L'effusion de sang est partout sur nos routes. Elle n'est pas spécifique à l'Algérie avec sa triste et peu enviable 4e place mondiale derrière les Etats-Unis, l'Italie et la France et sa 1re place au niveau du Maghreb et du monde arabe. Elle n'est pas l'apanage de milieux ou zones précis. Elle est partout la même dans le monde. Elle a fini ainsi par mériter l'appellation de terrorisme routier. La route tue et malheureusement, elle tuera encore. Les accidents de la route sont un danger permanent, a contrario des conflits et des guerres qui trouveront toujours en fin de compte une solution. La route tue de plus en plus de personnes sans qu'il soit possible d'y remédier efficacement avec les moyens déployés jusque-là. 3 205 morts, 48.410 blessés et 32.738 accidents en Algérie durant les neuf premiers mois de l'année écoulée. Aujourd'hui, tout le monde pointe du doigt l'élément humain (conducteurs et piétons) d'être responsable en grande majorité de cette hécatombe qui frappe nos routes. Le reste est imputé au mauvais état des routes, au manque d'infrastructures de base et surtout à la vétusté des véhicules. Justement, le chef de l'Etat, dans son discours d'inauguration à Blida lors du séminaire national sur les accidents de la route en mai 2004, avait attiré l'attention sur la prise en charge de l'accroissement important du nombre de véhicules en circulation, dans des conditions ne répondant pas aux normes internationales en termes de qualité et de sécurité, et sur le dispositif de contrôle technique des véhicules. Depuis, on a beaucoup parlé mais très peu agi. Annoncé en grande pompe en 2003, le contrôle technique automobile connaît actuellement une certaine léthargie qui risque de porter préjudice aux opérateurs qui ont souscrit un lourd investissement, à l'instar de l'Entreprise nationale de contrôle technique (Enacta), sous tutelle du ministère des Transports, et l'Entreprise publique de contrôle technique automobile (Cota). Cette dernière a développé un réseau national couvrant 17 wilayas (21 stations) pour un investissement avoisinant les 500 millions de dinars. Devant la concurrence déloyale, les PV de complaisance, diminution des tarifs et surtout l'arrêt du processus de contrôle des véhicules automobile que les pouvoirs publics se devaient d'étendre conformément à la loi à l'ensemble des véhicules de tourisme, le Cota se trouve aujourd'hui plus vulnérable par le rétrécissement du marché. Lui qui doit, dès cette année, rembourser près de 65 millions de dinars aux banques. Cette vulnérabilité est due essentiellement à la décision du ministère des Transports qui a dérogé à la loi initiale en confinant l'obligation de contrôle technique aux seuls véhicules de transport à activités réglementées (transports de voyageurs et de marchandises). En outre, les exigences de contrôle ne portent de surcroît que sur trois points (suspension, freinage et direction) au lieu des sept conditions arrêtées par la loi pour autoriser la circulation d'un véhicule. Cette mesure engendre des pertes énormes aux opérateurs publics et, du reste, devient aventureux pour son activité qui se réduit actuellement d'à peine 20% du marché, alors qu'elle est calibrée pour au moins 50%. Devant cette situation qui risque de compromettre les projets d'investissement, avec tout le lot de licenciements et de fermetures de stations que ce blocage pourrait engendrer comme conséquence, les opérateurs haussent le ton et exigent son élargissement à l'ensemble du parc roulant. En effet, l'obligation du contrôle technique à l'ensemble des véhicules de tourisme devrait porter ainsi le nombre de véhicules qui en sont assujettis de 700.000 à pas moins de 4 millions. De ce fait et dans une économie concurrentielle, il est aisé de comprendre le voeu des opérateurs de l'entrée en vigueur entière de la loi relative au contrôle technique de véhicules. Ce qui devrait aboutir à l'accroissement de leurs parts du marché. Le ministre des Transports, garant de l'application de la loi sur le contrôle technique automobile est à ce titre vivement interpellé. A ce sujet, on apprend que le chef du gouvernement, M.Ahmed Ouyahia, devrait annoncer le 1ermars prochain à l'occasion de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi relative au code de la route, la mise en oeuvre totale de la loi relative au contrôle technique de véhicule. Une décision, certes incitative, qui devrait dans une certaine mesure réduire le taux de mortalité sur nos routes. Or, chacun sait que les lois ne peuvent être effectives qu'à travers les textes d'application qui, normalement, devraient être préparés simultanément. Au lieu de cela, on repousse sans cesse les délais sans se rendre compte des dégâts que cela peut occasionner. Et dans le cas où les résolutions prises ne sont pas suivies d'une application stricte sur le terrain, toutes ces mesures resteront un simple habillage. Quant à la mauvaise conscience, la route est libre. Circulez, il n'y a rien à voir.