C'est la «haute» saison «El harga» fait banal pour l'Algérie et anodin pour la Tunisie. Entre ces deux Etats, les coeurs des parents de harraga disparus, rongés par l'incertitude. Les autorités tunisiennes ont rapatrié, avant-hier, 14 émigrés clandestins apprend-on de source douanière. Selon cette dernière, l'opération a été accomplie au niveau du poste frontalier d'El Hadadda wilaya de Souk Ahras. En ajoutant que les 14 prétendants à l'immigration clandestine, ont été interceptés la semaine écoulée par les gardes-côtes tunisiens, dans les eaux territoriales tunisiennes, pendant qu'ils tentaient de traverser la Méditerranée, à bord d'une embarcation artisanale, via l'ïle de la Sardaigne dans le sud de l'Italie. Selon les explications apportées par la même source, les gardes -côtes tunisiens, en tournée de routine, ont repéré puis intercepté une embarcation de fortune, chavirant avec à son bord 14 harraga, luttant contre la furie des eaux de mer qui s'infiltraient de tous les côtés. Sauvés in extremis, les harraga ont été reconduits à la station maritime Est tunisienne où les prétendants à cette mésaventure ont subi toutes les mesures d'usage. Signalons que les 14 harraga, âgés entre 18 et 29 ans, et originaires de différents quartiers de la wilaya d'Annaba, ont embarqué vers la traversée de la mort au deuxième jour du mois sacré, depuis la plage de la cité Seybouse, après avoir échappé à la vigilance des gardes-côtes d'Annaba. Remis aux autorités algériennes, ces dernières ont procédé aux mesures d'usage, à savoir la présentation des jeunes devant les instances judiciaires, en l'occurrence le tribunal de la wilaya de Souk Ahras, qui comme à l'accoutumée et, en l'absence d'un texte de loi incriminant l'acte d'immigration clandestine, a condamné les 14 harragas à une amende de deux millions de centimes. C'est au bonheur de leurs familles qui n'auront pas à supporter leur disparition, comme c'est le cas des dizaines de familles de harraga, portés disparus depuis des mois, voire des années. Des familles qui ne cessent d'observer des sit-in devant le consulat de Tunisie à Annaba, dont le dernier en date le 11 mai 2016. Des actions motivées par leur conviction quant à la présence de leurs enfants dans les prisons tunisiennes. Bien évidemment, elles ne contestent pas les mesures souveraines des autorités tunisiennes, mais les familles trouvent injuste, le fait que les pouvoirs publics tunisiens observent un black-out sur la situation de leurs enfants, mais surtout sur leur lieu d'incarcération. Le seul souhait de ces familles est de savoir leurs fils vivants et pouvoir les voir, même s'ils sont incarcérés. Il faut dire que la situation commence à devenir de plus en plus insoutenable, notamment en l'absence d'une quelconque implication ou réaction des autorités algériennes. Les familles des harraga disparus ne ménagent aucun effort pour lever le voile sur le black-out imposé par nos frères tunisiens sur la question des centaines de harragas, sans doute aucun croupissant dans les pénitenciers de ce pays voisin. Aux dernières évolutions de la situation, les représentants des familles de harraga disparus, ont remis au consulat général de Tunis à Annaba qui les a reçus, une requête devant être remise par le diplomate aux autorités tunisiennes compétentes. Par ailleurs, une semaine, c'est le délai butoir donné tant aux autorités algériennes que tunisiennes, par l'avocat des familles des harraga disparus, Me Zerguine Kouceila, quant à une réaction; faute de quoi, un dépôt de plainte sera introduit à l'encontre de l'Etat tunisien au tribunal de Genève. Selon certaines informations, le recours aux mécanismes de protection des droits de l'homme, n'est pas à écarter, à savoir le recours aux procédures spéciales de l'ONU pour déposer une nouvelle fois 90 plaintes contre l'Etat tunisien devant le groupe de travail contre la disparition forcée. D'ailleurs, Me Zerguine Kouceila, qui était le 17 du mois écoulé à Genève en Suisse, a rencontré le président du groupe de travail contre les disparitions forcées. Rappelons que 10 plaintes ont été déjà déposées au mois de mai dernier auprès dudit groupe pour ce genre de crime qualifié. A en croire les démarches entreprises par l'avocat des familles de harraga disparus, rien ne présage une prise en charge probante. Pis encore, le phénomène de l'immigration clandestine 'harga'', est, aujourd'hui un fait banal pour ne pas dire anodin, puisque des deux cotés des frontières algéro-tunisiennes on persiste à laisser des parents vivre dans l'angoisse et l'attente de l'incertain.