Les anciens réflexes ont la peau dure Après avoir lancé le paiement électronique, le défi sera désormais d'ancrer chez les citoyens la culture du paiement par carte. Ce n'est pas gagné... 5 000 transactions électroniques effectuées depuis le lancement du e-paiement le 4 octobre dernier. C'est avec un certain dédain que l'a annoncé, hier sur les ondes de la radio nationale Chaîne III, le ministre chargé de l'Economie numérique auprès du ministère des Finances, Moutassim Boudiaf. Mais est-ce vraiment une fierté? Pour le ministre délégué oui. Mais pour toute personne ayant une petite logique économique, c'est non! Car, un petit calcul d'épicier nous montre encore plus l'insignifiance de ce chiffre. Cela fait 74 jours exactement que ce type de paiement a été lancé, ce qui nous fait un total d'a peine 68 transactions/jour! Le ratio n'est pas terrible, et ce n'est pas une question d'accessibilité ou de passage des clients à des cartes de paiement électronique puisque le ministre avoue qu'il a «été distribué, avec quelque retard, 930.000 mots de passe aux détenteurs de ce type de carte». Sur 930.000 clients aptes à faire ce genre de transaction seuls 5000 ont sauté le pas, et encore dans ces 5000 il y en a sûrement une ou plusieurs transactions. Certes, pour le moment la liste des Web marchands certifiés est limitée à une dizaine d'entreprises et institutions telles que les impôts, Ooredoo, Djezzy, Mobilis, Algérie télécom, Air Algérie, Tassili Airlines, la Cnas, Amana Assurance, la Seaal...Mais ces chiffres dénotent de la difficulté d'imposer le paiement électronique au pays de la «chkara». Il est bien beau d'avoir lancé, il faut le signaler, avec une décennie de retard, cette technologie, toutefois, le vrai défi sera d'ancrer chez les citoyens la culture du paiement par carte. Ce n'est pas gagné...Surtout quand on connaît l'amour que vouent les Algériens à l'argent liquide qui permet une «belle» opacité sur les transactions les plus douteuses. L'utilisation du chèque dans les grosses transactions pose déjà problème. En 2011, il avait même provoqué des émeutes. Il aura fallu attendre 4 ans et après de gros «combats» pour qu'il puisse être imposé pour les grosses transactions dépassant le milliard de dinars. Même la culture de la banque est inexistante chez beaucoup de nos citoyens. Selon la Banque d'Algérie, l'argent liquide circulant dans l'informel tourne autour de 1000 à 1300 milliards de DA. Vous voyez l'ampleur des dégâts! En cette période de crise financière, l'Etat a tout fait pour «récupérer» cet argent, offrant même une «blanchisserie» légal aux barons de ce secteur. Mais cela, n'a pas été suffisant pour les séduire. Le paiement électronique pourrait être la solution à ce problème, mais il faudra l'imposer dans notre culture. Il faut fidéliser les clients à ce mode de paiement. Comment? Il y a d'innombrables solutions telles que la carte de crédit qui permet des achats à paiement différé... Il faudra ainsi être des plus ingénieux pour trouver la bonne méthode. Pour le ministre chargé de l'Economie numérique, il y a lieu de sensibiliser, davantage, le grand public pour qu'il fasse usage de ce nouveau système de paiement, considérant que c'est celui-ci qui pourra contribuer à générer des transactions et à accélérer «l'appropriation» de la monétique en Algérie. Un discours très langue de bois qui n'offre pas de solutions concrètes qui laissent espérer de voir cette tant attendue révolution. La «chkara» semble encore avoir de beaux jours devant elle...