Les banlieues en France ne décolèrent pas, depuis l'agression de la part de policiers dont aurait été victime, Théo, un jeune Noir A deux mois de l'élection présidentielle, le président François Hollande et son gouvernement s'emploient à calmer le jeu dans les banlieues et sur le terrain politique, après des violences urbaines déclenchées par le viol présumé d'un jeune noir lors d'un contrôle policier. «On ne peut pas accepter, à cause d'un drame que j'ai moi-même dénoncé, qu'il y ait de la casse», a déclaré François Hollande lors d'un déplacement à Aubervilliers, une banlieue défavorisée au nord de Paris. «Je refuserai aussi toutes les provocations, tous ceux qui veulent diviser, qui veulent séparer, qui veulent opposer, qui veulent briser ce qui est la vie en commun», a-t-il ajouté après avoir inspecté un dispositif pour favoriser l'emploi des jeunes. En dépit de plusieurs milliards d'euros d'investissement de l'Etat, notamment dans la rénovation et la construction de logements, les habitants de banlieue, comme ceux d'Aubervilliers, ne se montraient guère convaincus par la visite du président socialiste. Lors de la présidentielle de 2012, ce dernier avait réalisé de bons scores en banlieue mais, très impopulaire, il a renoncé à solliciter un nouveau mandat. «Il aurait dû venir avant», estime Nadia, 50 ans, mère de 4 enfants. «Il n'y a rien pour nos enfants ici». Dans les 1.436 quartiers «prioritaire», le taux de chômage est de 26,7%, contre 10% ailleurs et 42% des habitants y vivent sous le seuil de pauvreté (fixé à 11 871 euros par an). Malgré une décennie de volontarisme politique, les disparités entre les quartiers en difficulté et le reste du territoire sont loin d'être comblées en France, ce qui avait conduit l'ancien Premier ministre socialiste Manuel Valls à évoquer un «apartheid social». Depuis plusieurs jours, certaines banlieues défavorisées de Paris connaissent des violences sporadiques, avec des incendies de voitures ou des jets de pierre visant les forces de l'ordre. Au moins 25 personnes ont encore été interpellées dans la nuit de lundi à mardi pour des violences urbaines. Ces incidents font suite à l'arrestation violente le 2 février par la police de Théo, 22 ans, lors d'un contrôle d'identité. Le jeune homme noir, qui dit avoir été violé par un policier avec une matraque, a dû être opéré et hospitalisé. Cette affaire a envenimé des rapports déjà conflictuels entre jeunes et policiers dans les quartiers sensibles en France, où vivent de nombreux jeunes issus de l'immigration africaine et maghrébine et où la police est souvent perçue comme une force hostile. Cette question était déjà au coeur de graves émeutes qui ont enflammé en 2005 le pays pendant trois semaines, après la mort de deux adolescents électrocutés dans un transformateur, où ils avaient voulu se cacher de la police. Le gouvernement craint désormais une multiplication des incidents dans les banlieues déshéritées, dont la situation était jusque-là largement absente des débats à deux mois de l'élection présidentielle. «Il faut que la justice passe», a insisté hier François Hollande, qui s'était rendu le 7 février au chevet de Théo à l'hôpital. «Il est très important de montrer que nous sommes capables de vivre ensemble dans une société apaisée mais où le respect est la règle et où nous devons être fermes à l'égard de ceux qui s'éloignent de ce principe». Le gouvernement est sous le feux «des critiques de l'extrême droite, dont la candidate à la présidentielle Marine Le Pen est en tête des intentions de vote pour le premier tour du 23 avril, et qui a toujours fait de la sécurité son cheval de bataille. «Le gouvernement se mure dans un silence qui reflète autant sa lâcheté que son impuissance», a accusé Marine Le Pen, qui lancé une pétition pour soutenir la police. «Les banlieues vont provoquer un de ces quatre matins une guerre civile et communautariste en France par la faute de ces gouvernements qui depuis des années et des années ont tout laissé faire», a renchéri Gilbert Collard, un député du même parti Front national. Le Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve a de son côté défendu le bilan du gouvernement. «Ce n'est pas nous qui avons supprimé 13.000 postes de policiers et de gendarmes, nous en avons créé 9 000», a-t-il déclaré, dans une attaque visant le précédent gouvernement de droite de Nicolas Sarkozy (2007-2012).