Dans un discours prononcé lundi soir, le président Trump a clarifié la position des Etats-Unis sur l'Afghanistan Donald Trump a ouvert lundi soir la porte à l'envoi de soldats américains supplémentaires en Afghanistan tout en accentuant la pression sur le Pakistan accusé d'être un repaire pour «des agents du chaos» et évoquant un possible dialogue entre Kaboul et les taliban. Dans un discours à la tonalité solennelle d'une vingtaine de minutes, le président américain n'a donné aucun chiffre ou aucune échéance dans le temps, jugeant que c'était «contre-productif», mais martelé sa conviction qu'un retrait précipité d'Afghanistan créerait un vide qui profiterait aux «terroristes», d'Al Qaîda comme du groupe Etat islamique. Seize ans après les attentats du 11-septembre qui avaient poussé les Etats-Unis à lancer une vaste offensive pour déloger le régime taliban au pouvoir à Kaboul, le fragile édifice démocratique afghan est menacé par une insurrection déstabilisatrice. «Mon instinct initial était de se retirer (...) mais les décisions sont très différentes lorsque vous êtes dans le Bureau ovale», a d'entrée souligné le président américain dans une allocution très attendue depuis la base de Fort Myer, au sud-ouest de Washington. Un haut responsable américain a souligné que M. Trump avait donné son feu vert au Pentagone pour le déploiement de jusqu'à 3.900 soldats supplémentaires. Si la hausse n'est pas spectaculaire (les Etats-Unis comptaient 100 000 soldats sur place il y a sept ans), elle marque cependant une inversion de tendance par rapport aux dernières années. Le secrétaire américain de la Défense Jim Mattis a de son côté immédiatement annoncé qu'il consulterait le secrétaire général de l'Otan et les alliés, soulignant que plusieurs d'entre eux s'étaient également engagés à augmenter le nombre de soldats déployés. Quelque 8.400 soldats américains sont actuellement déployés en Afghanistan au sein d'une force internationale qui compte au total 13 500. Revenant sur la plus longue guerre de l'histoire des Etats-Unis, M. Trump a lancé une vive mise en garde à Islamabad, accusé de servir de facto de base arrière aux taliban. «Le Pakistan a beaucoup à gagner en collaborant à nos efforts en Afghanistan. Il a beaucoup à perdre en continuant à abriter des terroristes», a-t-il asséné. «Cela doit changer et cela va changer immédiatement!». Consciente que Washington pourrait une nouvelle fois durcir le ton, l'armée pakistanaise avait pris les devants. Quelques heures avant le discours présidentiel, elle avait martelé que le Pakistan n'abriterait plus «aucune structure organisée d'aucun groupe terroriste». Le mois dernier, le département américain de la Défense a suspendu 50 millions de dollars d'aide militaire, jugeant qu'Islamabad ne faisait pas assez contre le réseau Haqqani, allié des taliban afghans. Ce réseau basé à la frontière pakistano-afghane, a longtemps été considéré comme lié aux services secrets pakistanais, l'ISI. Mais le président américain a aussi lancé un avertissement au régime de Kaboul. «Notre engagement n'est pas illimité, notre soutien n'est pas un chèque un blanc», a-t-il martelé. «Les Américains veulent de vraies réformes et de vrais résultats», a-t-il lancé dans ce discours qui lui offrait une occasion d'adopter une posture plus présidentielle après deux semaines chaotiques qui ont considérablement terni son image. Quelque 2.400 soldats américains sont morts en Afghanistan depuis 2001, et plus de 20.000 y ont été blessés. En 16 ans, les Etats-Unis ont versé plus de 110 milliards de dollars d'aide à la reconstruction. Donald Trump a laissé la porte ouverte à un dialogue avec certains rebelles: «A un moment donné, après un effort militaire efficace, peut-être qu'il sera possible d'avoir une solution politique incluant une partie des taliban en Afghanistan.» «Mais personne ne sait si où quand cela arrivera», a-t-il ajouté. Son secrétaire d'Etat Rex Tillerson a précisé peu après que les Etats-Unis étaient prêts à soutenir des pourparlers de paix entre le gouvernement afghan et les taliban «sans condition préalable». Il s'agissait de la première annonce présidentielle depuis le départ, vendredi, de Steve Bannon, conseiller stratégique très controversé. Ce dernier, chantre de «L'Amérique d'abord» et avocat d'une ligne résolument isolationniste, était opposé à un nouveau déploiement de soldats dans la région. Avant d'accéder à la Maison-Blanche, Donald Trump avait plusieurs fois exprimé sa préférence pour un retrait du pays. «Quittons l'Afghanistan», écrivait-il sur Twitter en janvier 2013. «Nos troupes se font tuer par des Afghans que nous entraînons et nous gaspillons des milliards là-bas. Absurde! Il faut reconstruire les USA».