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De fausses réponses à de vrais problèmes
AVANT-PROJET DE LOI SUR LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE
Publié dans L'Expression le 19 - 09 - 2005

«Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent on en cherche».
Il est pour le moins curieux de constater que tout le monde s'intéresse au mal de l'université et de la recherche sans prendre la «température» des enseignants- chercheurs qui sont sur le terrain .
Il est pratiquement établi qu'il n'y a pas eu un état des lieux exhaustif et sans complaisance de la malvie de la recherche, et partant des chercheurs. La crise chronique de l'enseignement supérieur et de la recherche se teinte peu à peu d'une nuance de fatalité...Après tant de «réformettes» avortées, l'idée s'est installée que décidément dans ce secteur, rien n'était possible.
Il n'y a rien de pire pour le moral de ceux qui forment notre Université et notre enseignement supérieur que le constat de cette impuissance. C'est un immense travail à entreprendre, ambitieux et long. Pour qu'il y ait une possibilité de réussite, il faut que la méthode soit originale et que la bonne foi anime toutes les parties prenantes interpellées par l'avenir de l'Université, et partant du pays.
Il faut savoir que c'est un miracle que l'école et l'université «fonctionnent» tant bien que mal après le tsunami de la terreur des années 1990.
L'émergence d'une nouvelle société
Qui se souvient de l'Algérie des années 1990? A bien des égards, c'est aux sociologues de nous le montrer, les événements de 1988 ont constitué, de notre point de vue, une rupture, le monde de l'insouciance, du PAP et du «socialisme de la mamelle» s'écroulait sur la dure réalité de la chute des revenus pétroliers, indexés à la disparition progressive du communisme et l'avènement d'un monde nouveau, celui d'une mondialisation à la fois économique mais aussi qui se teinte d'une invasion culturelle occidentale et cultuelle. Ne parle-t-on pas à ce propos de mondialatinisation? La malvie, et l'absence de perspective, l'errance identitaire corrélée avec le retour frénétique du religieux ont été les ingrédients de l'explosion sociale et de l'avènement d'un monde nouveau.
De cette Algérie qui a connu tous les traumatismes cette cascade de traumatismes est née une autre société. Cette nouvelle Algérie ne sait pas qui elle est, ni où elle va. Anxieuse, elle a perdu ses repères, s'en est fabriqué d'autres - l'argent en est un, majeur - s'en inquiète souvent, se flagelle parfois, et ne se retrouve pas dans les multiples contradictions qui l'agitent.
Comment «faire» de l'argent en un minimum de temps? La mentalité des jeunes, d'aujourd'hui, c'est que «tout s'achète et tout se vend». Il suffit d'être malin et de savoir tirer parti de sa position, que l'on soit fonctionnaire, homme politique, douanier ou journaliste. le langage de tous les jours a intégré des mots comme tchipa signifie «pot-de-vin» ou «dessous-de-table».
Les jeunes se rendent compte chaque jour que la combine rapporte plus que l'effort. Ils n'ont pas de modèle de réussite par le travail bien fait, la sueur, le mérite. Jusque dans les années 1970, il existait un espoir de promotion sociale par les études et le diplôme. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.
Les mentalités ont changé quand le chômage s'est mis à frapper tout le monde, au début des années 1990, et que des milliers de diplômés se sont retrouvés sans travail. La plupart d'entre eux émigrent et il est navrant de constater que l'Algérie a perdu depuis une bonne partie de sa matière grise qu'elle a eu tant de peine à former.
A titre d'exemple, entre le salaire d'un universitaire et celui d'un élu de la nation, il n'y a pas photo. Il en est de même des richesses fulgurantes dues à l économie parallèle. Les adolescents n'hésitent pas: ils vont se consacrer aux «affaires». Aujourd'hui, l'«économie de bazar» ne se situe plus en marge, mais au coeur de la vie économique en Algérie.
Le développement de l'informel est celui de l'import-import . 40.000 importateurs pour une poignée d'exportateurs. Les conteneurs qui encombrent le port sont, pour les jeunes, la preuve que la création de richesses, ce sont les autres. Les Algériens se contentent de survivre. L'Algérie continuera à financer l'emploi des pays qui nous vendent leur marchandise, bas de gamme, tant que les dollars du pétrole le permettront. A quoi sert de ce fait un diplôme?
Durant toutes les mutations nombreuses qu'a subies l'Algérie et elles sont nombreuses, à tort, les gouvernements de passage ont tenu l'école et l'université soigneusement à l'écart. Il fut même une triste époque où on nous promettait de fermer l'université pour mettre au pas des enseignants qui avaient le malheur de dire que l'université ne va pas bien. Pourtant, aux heures sombres qu'a connues le pays, ce sont les enseignants du système éducatif qui témoignaient au quotidien et au péril de leur vie que l'Algérie était debout. Il est de ce fait scandaleux de continuer à privilégier ceux des enseignants qui ont décidé de partir et ceux qui sont restés à demeure.
Une lueur d'espoir avait été entrevue avec la Commission de la réforme, je persiste à croire que sans être parfaite, les orientations auxquelles les experts étaient parvenus pouvaient tracer un chemin vers l'école et l'université du troisième millénaire. La réalité est tout autre. Il n'est pas question de nier ici, les efforts remarquables qui ont été faits par les deux départements ministériels - La formation professionnelle tente sans raison de faire double emploi avec l'enseignement supérieur. Mais il faut bien convenir que la démarche n'est pas novatrice, et ne s'appuie pas sur les enseignants qui constituent les chevilles ouvrières de l'école et de l'université. Si on devait donner un exemple sur les violences faites aux étudiants et aux parents, c'est le système des inscriptions par ordinateur, qui classe par concours sur titre, des bacheliers qui ont réussi à un examen: le baccalauréat. Les recours sont nombreux, les frustrations aussi.. On l'aura compris, il y aura beaucoup de candidats à l'échec. Ceux d'entre eux qui réussiront sont guettés par le chômage. Dans ces conditions, à quoi sert l'université si elle ne permet pas aux jeunes Algériennes et Algériens de s'épanouir en fonction de leur potentiel et non en fonction une quelconque ‘accabya? L'université doit-elle former pour l'emploi? ou pour habiliter le jeune diplômé à participer à son propre emploi? Pourquoi tous les jeunes avec de bonnes moyennes veulent aller en médecine, pharmacie, chirurgie dentaire, architecture et récemment informatique? la raison est simple au-delà du «prestige surévalué» des sciences médicales, l'autre raison est la garantie d'un emploi. Le jeune diplômé peut, en théorie, s'installer, ouvrir une officine, ou émigrer avec un diplôme d'informaticien.
En matière de développement culturel et scientifique, selon le dernier rapport du Pnud, le monde arabe est dernier. Savons-nous qu'en mille ans, les Arabes n'ont pas traduit plus de livres que les Espagnols en une seule année? A titre d'exemple, comment produire intellectuellement quand rien ne vous incite. On importe, sans discernement, des ouvrages de base pour être vendus à des prix qui défient l'imagination. Dans le même temps, les enseignants peinent à éditer leur ouvrage qui coûte dix à vingt fois moins cher.
Par ailleurs, pour contribuer à la création de richesse, les pouvoirs publics devraient mettre à la disposition des enseignants - chercheurs les soutiens logistiques et financiers qui leur permettraient de créer des entreprises innovantes. Les statuts des universités devront être amendés pour permettre cette flexibilité de l'enseignant-chercheur. L'université et l'entreprise devront créer et inventer un dispositif d'intelligence économique qui constituera un formidable champ de coopération. Dans le domaine des sciences et de la technologie, la mise en place de microentreprises, fruit de la recherche universitaire, permettront, à n'en point douter, de créer de la richesse et de donner un espoir aux milliers de diplômés au chômage. De plus, ces start-up pourraient prendre, progressivement, le pas sur les entreprises d'import-export dont la grande majorité parasite ne participe pas à un savoir-faire algérien, notamment par la conception et la réalisation d'outils pédagogiques et d'équipement médical.
La malvie en recherche
S'agissant de la mise en place d'une nouvelle loi sur la recherche, il y a lieu tout d'abord de faire le point sur ce qui a été fait dans le calme et la sérénité sur la base d'un questionnaire à chaque grande famille de discipline. Il est important à titre d'exemple, d'évaluer le nombre de thèses soutenues pour savoir si la précédente loi a accéléré cette production scientifique. Cependant, le problème capital de l'évaluation se pose, «Qui évalue qui? et comment?»
L'appréciation objective sur des critères acceptés par tous, de l'état d'avancement réel ne peut être faite que par celles et ceux qui vivent au quotidien la recherche, ses problèmes et les espoirs. Seuls des états généraux de la recherche mûrement préparés avec le consensus de la base pourront faire décoller la recherche.
Il faut commencer par le commencement et cultiver l'humilité. Il faut un cap et beaucoup de transparence De plus et comme préalable à toute définition d'axe de recherche, il faut prendre le temps de définir ce qui est attendu de la recherche dans notre pays. Pour cela, il est recommandé de s'inspirer des politiques de recherche des grands pays et des pays qui ont un développement similaire au nôtre. Nous devrons avoir l'ambition de devenir un «pays émergent». Il est inconcevable de faire de la recherche sans chercheur, il est nécessaire de recruter d'une façon décente des chercheurs en thèses.
Cependant rien ne peut se faire sans une société apaisée. Nous sommes interpellés en tant qu'universitaires, qu'intellectuels que citoyens par ce thème. Nous devons apporter notre pierre. Dans cet ordre d'idées, il est regrettable que la Réconciliation nationale ne constitue pas un acte majeur en recherches. Plusieurs pays qui ont connu les mêmes événements que la Réconciliation en Algérie, ont confié à leurs universités et à leurs centres de recherche le soin d'imaginer, voire d'inventer les voies et moyens pour créer les conditions à même de contribuer à ramener la sérénité.
Ce ne sont pas les axes de recherche qui manquent, quelle que soit la discipline, c'est la nécessité d'un schéma d'ensemble, qui intègre une nouvelle vision de la recherche - formation, par la formation à l'université de créateurs de richesses et par conséquent de l'avenir de l'Université algérienne. Plusieurs axes de recherche flexibles sont à proposer. Indépendamment des axes de sciences sociales et humaines pour lesquels chacun de nous est interpellé tant leur abandon nous a conduits à ce no man's land où on ne connaît rien de la société algérienne, il est nécessaire d'avoir après étude un consensus sur de grands invariants : la sécurité alimentaire: la santé, la sécurité énergétique et environnementale, le problème de l'eau, le problème de l'éducation et de la formation, la sécurité au sens large, la Réconciliation: une société apaisée, les sciences sociales humaines commerciales, la mondialisation et ses retombées négatives ou positives dans tous les domaines.
Dans une Algérie en pleine mutation économique sociale et même existentielle, l'université est totalement absente du débat et n'a pas été consultée, elle continue sur sa vitesse initiale acquise dans les années soixante-dix, et aucune expertise en profondeur n'a été faite pour savoir où nous en sommes. Pour toutes ces raisons, le moment est venu pour un sursaut salvateur qui permettra de réétalonner les “ valeurs ” et rétablir la morale, le moment est venu pour que le peuple se réapproprie ses repères.
Il a aussi besoin d'âme d'abord, il a besoin d'espérer et de savoir dans quel projet de société il peut s'épanouir dans le temporel tout en vivant ses repères religieux d'une façon apaisée. C'est dire que ces considérants sont de loin plus importants que toutes les petites choses pour lesquelles nous nous agitons tant. Il faut pour cela une intransigeance de tous les instants.
L'université a aussi besoin qu'on lui fasse confiance, L'université a besoin qu'on libère les énergies qui sont en elles, et les initiatives qu'elle est capable de prendre. En réaffirmant le rôle du corps enseignant comme cheville ouvrière de l'université, en renforçant ses prérogatives bien comprises, et en revalorisant d'une façon significative sa position salariale pour le faire atteindre le niveau auquel la société devrait normalement le placer, l'Etat crée du même coup un état d'esprit propice à la création intellectuelle qui sera forcément différente d'un enseignant à l'autre. Il sera alors nécessaire de récompenser l'effort et le mérite sous toutes ses formes, le salaire est l'un des mécanismes de discrimination. La méritocratie doit remplacer petit à petit les légitimités autres que celles du savoir et de l'effort. Il est cependant de la plus haute importance que l'enseignant fasse son autocritique. Si nous voulons servir de repère et d'exemple à suivre pour la société, pour nos assistants et pour nos élèves, nous devrions être irréprochables. La mise en place rapide d'un Conseil de l'Ethique devrait rapidement fixer les critères moraux. En définitive, quand l'effort est récompensé, quand les enseignants s'approprieront leur université, pour le meilleur et le pire, quand la société comprendra enfin ce qu'elle doit aux formateurs de son élite, et placera les enseignants à la place qu'ils méritent en termes de position sociale et de dignité, quand on mettra fin aux ascensions sociales suspectes fulgurantes et qui ne sont pas le fruit de l'effort, quand chaque Algérien se sent concerné par ce que fait le gouvernement qui doit indexer, continuellement, son action sur l'approbation du peuple, alors, on pourra dire que les Algériens se sont réconciliés avec leur pays et ne rêveront plus de le quitter, croyant naïvement, trouver le salut ailleurs. C'est dire si l'université doit montrer la voie et s'impliquer dans cet événement majeur, sans qui rien vraiment de fondamental ne sera construit durablement.


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