Le constat est éloquent. Les jardins de la ville de Tizi Ouzou se clochardisent, de jour en jour malgré le fait qu'ils soient réaménagés et refaits à coups de milliards. Sur place, la situation est désolante. A l'exception du jardin Mohand Oulhadj utilisé pour la tenue des salons et autres foires organisées par les pouvoirs publics, les autres espaces verts sont à l'abandon. Au lieu de servir de lieu de détente, la majorité des jardins dégage l'odeur de pisse et de déchets nauséabonds. L'insécurité jointe à ces mauvaises conditions d'hygiène finissent par dissuader les citoyens les plus téméraires à venir passer un moment de détente. Ces derniers temps, cette situation a fini par alerter les pouvoirs publics qui ont commencé à s'intéresser à ces lieux pour trouver des solutions. La semaine dernière, les responsables de la direction de l'environnement de la wilaya de Tizi Ouzou ont effectué une visite sur les lieux pour faire un constat sur l'état des lieux. Plusieurs organismes concernés ont pris part à cette sortie à l'instar des membres de la commission de wilaya, sûreté de wilaya, daïra de Tizi Ouzou, la direction de l'urbanisme, la direction de l'administration locale, la direction des services agricoles, la direction des ressources en eau, l'Ergr, ainsi que la Conservation des forêts. En fait, le constat n'avait pas besoin d'efforts pour être vite établi. Les jardins de Tizi se clochardisent. Les solutions sont faciles à préconiser, mais difficiles à appliquer pour diverses raisons. Il est évident que dans les plans d'aménagement et d'urbanisation, la place et le rôle de la sociologie sont quasiment inexistants dans le dictionnaire des responsables. Le jardin public est un espace de vie commune que ces derniers ne prennent jamais en considération. Les enveloppes financières dépensées pour leur réaménagement chaque 10 ans, pouvaient être utilisées pour leur entretien quotidien. Aujourd'hui, la situation est que tous les jardins ne sont pas utilisés par les habitants de la ville pour leur bien-être. Bien au contraire, ces espaces sont fuis à cause du manque d'hygiène et de l'insécurité. S'asseoir sur un banc dans un jardin c'est hélas s'exposer au danger d'être la victime de vol, d'agression. On n'y rencontre que des personnes malades mentales et une gent qui n'inspire point confiance. Dans ces lieux, il règne un climat complètement en porte-à-faux avec le bien-être et la paix intérieure. Pour les rares vieux qui se retrouvent encore au niveau de la placette de la moquée, les temps du bien-être à Tizi sont loin. Les beaux jardins et les belles allées de l'ancienne «Petite Suisse d'Algérie» ne sont plus que de vagues souvenirs. Le jardin du colonel Mohand Oulhadj, le square du 1er Novembre 1954, la placette du 17 octobre 1961, le jardin du tribunal, le jardin Aït Menguellet, la place de l'Olivier et le jardin Kerrad-Rachid ne sont plus que l'ombre d'un passé rayonnant de soleil de cette belle contrée de la Méditerranée. Enfin, il est à signaler que les solutions qui consistent à pomper de l'argent pour refaire les jardins ne sont plus porteuses. Les jardins de Tizi Ouzou n'ont pas besoin d'argent, mais d'amour et de bienveillance. La solution ne peut venir que si les pouvoirs publics font appel aux spécialistes du domaine comme les architectes paysagistes et les spécialistes des sciences humaines comme la sociologie et la psychologie, voire même l'histoire. Faire revivre les jardins passe inéluctablement par le nécessaire rétablissement du lien entre les habitants de la ville et ces lieux. Ce qui est impossible aujourd'hui avec l'insécurité et l'absence d'hygiène au sein de ces espaces qui semblent changer de rôle.