Le gouvernement Djerad, via son ministre des Finances passe un oral difficile devant les députés de l'Assemblée populaire nationale. Il ne peut pas faire autrement que de ficeler une loi de finances complémentaires très serrée, avec ses coupes budgétaire «historiques» et une fiscalité qui commence déjà à faire grincer quelques dents. L'arbitrage, lorsqu'on est dans la situation du gouvernement Djerad, est un exercice presque impossible, en ce sens que la base même de calcul du budget est très aléatoire. L'Exécutif a fixé le niveau des rentrées financières générées par les hydrocarbures sur un critère dont il n'a aucune espèce de contrôle et n'est donc pas à l'abri de mauvaises surprises, même si dans le lot, l'avenir peut «sourire» à l'Algérie et lui donner une opportunité de souffler. Mais les observateurs qui s'arrêtent sur des données de terrain estiment que le futur immédiat ne sera pas idéal au double plan sanitaire et économique. Les deux fronts ont ceci d'identique: ils sont mouvants et n'offrent aucune possibilité de «combat à la régulière». Face au Covid-19, l'Exécutif ne peut rien faire d'autre que de suivre la courbe épidémique, compter sur l'esprit civique des Algériens, pour imaginer un plan devant tenir compte d'un très fragile équilibre entre une relance économique rendue nécessaire et la santé des Algériens confrontée à un péril inédit dans l'histoire de l'humanité. Le gouvernement Djerad, qui a présenté une LFC qui se veut réaliste et tournée vers une prise en charge des besoins sociaux des Algériens et une ambition de renouveau économique, peut dérouler son programme, mais ne pourra pas répondre à la question en rapport avec la mise en branle de la dynamique socio-économique portée par la LFC. C'est justement ce coup de starter qui dépend d'un facteur exogène à la volonté propre du gouvernement qui rend la tâche de l'Exécutif encore plus périlleuse, en ce sens que les prévisions de recettes, de création d'emplois, de réformes entreprises dans de nombreux secteurs, demeurent impossibles à quantifier, si l'Algérie reste confinée et en attente d'un fléchissement de la courbe épidémique du Covid-19. En fait, c'est bien la première fois dans l'Histoire de l'Algérie que le pays est confronté à cet état de fait où un gouvernement «plein d'idées» est paralysé par une situation sanitaire et fortement diminué au plan financier. Les Algériens ont eu le loisir de le voir à l'oeuvre dans la gestion de la pandémie et apprécier sa réactivité et le bon sens dont il a fait preuve. Les citoyens reconnaissent une efficacité avérée et constatent également l'attachement «viscéral» du président de la République à la protection des couches les plus défavorisées. Les actions en direction des zones d'ombre et les promesses tenues sur la hausse des bas salaires, malgré une conjoncture très difficile, plantent certes le décor d'une mandature qui ne sera certainement pas à l'actif d'une catégorie de privilégiés, mais portera le souci d'une cohésion sociale et une solidarité dont Tebboune n'a plus besoin d'en faire la preuve. On le voit au quotidien et les mesures d'accompagnement sociales prises dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 en apportent l'illustration. Cela étant dit, l'opinion nationale, toujours imprégnée par le Mouvement populaire qui a rendu possible l'arrivée de Abdelmadjid Tebboune à la présidence de la République, l'attend sur sa politique économique, mais le surveille certainement sur ses réformes politiques. Le débat sur la Constitution, qui constitue un axe central du programme présidentiel sera suivi «à la loupe» par les Algériens, d'autant qu'ils en seront les arbitres et les décideurs au final. Le président de la République sait parfaitement que l'avènement de la nouvelle République, matérialisé par l'adoption par référendum de la Constitution, n'aura l'impacte escompté qu'à condition d'une participation massive des citoyens. Mais avant de parler de la Constitution, le chef de l'Etat a besoin des citoyens pour enclencher son programme social et économique. Ce seront les Algériens qui, à travers un comportement individuel et collectif exemplaire, mettront le pays en ordre de bataille contre la pandémie et pour la relance économique. C'est inédit dans les annales de la République qu'un Exécutif dépende à ce point de la société pour mettre en oeuvre son programme. S'il réussit à ce triple examen, Tebboune aura fait émerger la nouvelle République.