La polémique d'il y a une dizaine de jours semble éteinte mais le malaise engendré par l'initiative du président du Parlement libyen, Saleh Aguila, persiste. Le 9 septembre dernier, le porte-parole du Parlement avait publié sur la page Facebook le document signé la veille par Aguila et par lequel doivent être régies la candidature et l'élection du futur président, lors du rendez-vous électoral du 24 décembre prochain. Tollé au sein de plusieurs institutions politiques et de nombreux députés qui ont dénoncé un coup de force puisque le texte n'a pas été soumis à l'étude ainsi qu'au vote de l'instance élue, d'une part, et qu'il comporte une clause hautement suspecte, d'autre part. Très attendue, cette «publication» était donc entachée d'irrégularité, selon le Haut Conseil d'Etat, appuyé par un groupe de 22 députés contestant la manière dont a procédé Saleh Aguila, passé outre le vote du Parlement. Or, cette démarche par laquelle le projet de loi a été transmis à la commission électorale et à la Mission des Nations unies en Libye (Manu), sans vote préalable des députés, «est une violation de la Déclaration constitutionnelle intérimaire, de l'Accord politique et du règlement intérieur du Parlement» assurent les contestataires. La démarche d'Aguila a également été condamnée par le HC, sorte de Sénat libyen dont la consultation conditionne toute ratification de ce genre de texte, la qualifiant de tentative d'«accaparer des pouvoirs qu'il ne possède pas», dans le but d' «entraver les prochaines élections en promulguant, délibérément, un texte de loi défectueux». Là se trouve l'objet du litige puisque le document permet au maréchal Khalifa Haftar de se présenter à la Présidentielle contrairement aux dispositions contenues dans la feuille de route du Forum de Dialogue Politique inter-libyen (FDPL). En tentant de favoriser le chef de l'ANL autoproclamée dont il reste toujours proche, Saleh Aguila prend ses propres marques et donne rendez-vous au maréchal le 24 décembre prochain. Un article du document que ses accusateurs considèrent comme abusif et illégal, même s'il y est dit qu'un militaire est en droit de se porter candidat à condition de «se suspendre de ses fonctions trois mois avant le scrutin», à charge pour lui, en cas d'échec, de «retrouver son poste et recevoir ses arriérés de salaire». On comprend la réaction troublée et contestataire des instances et des députés proches de Tripoli qui voient, dans cette manoeuvre, une nouvelle approche du maréchal Khalifa Haftar dans sa longue marche vers la magistrature suprême en Libye. L'heure tourne et les évènements se bousculent et c'est pourquoi il fallait poser l'objet du scandale, avec l'espoir qu'il passerait comme une lettre à la poste. Tel n'est pas le cas mais le contexte libyen est tel que l'enjeu du retrait des forces étrangères et mercenaires semble de plus en plus improbable alors que les Etats-Unis pèsent de tout leur poids au Conseil de sécurité de l'ONU pour un respect absolu de la date des élections, une position que partagent et soutiennent aussi bien l'ONU que l'Union africaine et la Ligue arabe.