Le Kremlin a estimé, hier, que l'attaque menée par des hélicoptères ukrainiens en territoire russe contre un dépôt de carburant allait peser sur les pourparlers russo-ukrainiens pour mettre fin à l'offensive en Ukraine. «Il est clair qu'on ne peut pas considérer cela comme quelque chose qui va créer les conditions appropriées pour la poursuite des négociations», a estimé Dmitri Peskov, porte-parole de la Présidence russe, après la destruction à l'aube d'un dépôt dans la région de Belgorod, frontalière de l'Ukraine. La Russie a en effet accusé, hier, l'Ukraine d'avoir mené une frappe aérienne sur son sol. Une nouvelle tentative pour évacuer des milliers de civils bloqués dans des conditions humanitaires dramatiques dans la ville méridionale de Marioupol se poursuivait, hier, sous l'égide du Comité international de la Croix-Rouge. «Il n'est pas clair encore si cela va se faire aujourd'hui», a indiqué un porte-parole à Genève, Ewan Watson. «Il y a beaucoup de parties mouvantes et tous les détails ne sont pas réglés pour être sûr que cela se passe en toute sécurité», a-t-il expliqué, hier matin. En Russie, le gouverneur de la région de Belgorod, Viatcheslav Gladkov, a confirmé que l'Ukraine a mené une attaque à l'hélicoptère contre un «dépôt de pétrole» dans cette ville située à une quarantaine de kilomètres de la frontière. C'est la première fois que la Russie fait état de frappes ukrainiennes par hélicoptères sur son territoire depuis le début du conflit. Le directeur d'une typographie près de Belgorod a affirmé que son entreprise avait également été touchée par des tirs d'hélicoptères. «Des hélicoptères nous ont tiré dessus avec des roquettes», a-t-il affirmé à l'agence publique TASS. En Ukraine même, les Russes «poursuivent leur retrait partiel» du nord de la région de Kiev vers la frontière bélarusse. La Russie avait indiqué, plut tôt cette semaine qu'elle entendait réduire son activité à Kiev et Tcherniguiv afin de transférer sa puissance de frappe depuis le nord vers les régions séparatistes de Donetsk et de Lougansk, dans l'est. «Dans le Donbass et à Marioupol, dans la direction de Kharkiv, l'armée russe se renforce en prévision d'attaques puissantes», a déclaré le président ukrainien. Ce recentrage laisse présager un conflit «prolongé», qui pourrait durer des mois, a estimé pour sa part le Pentagone. Plus d'un mois après l'invasion de l'Ukraine, Marioupol, port stratégique du sud-est du pays, sur la mer d'Azov, reste assiégé. Une nouvelle tentative d'évacuation était prévue, hier. La délégation du CICR en Ukraine a indiqué sur Twitter qu'elle se trouvait dans la ville voisine de Zaporojie, où sont censés arriver les bus en provenance de la ville encerclée. Sur le front diplomatique, l'UE tente de persuader la Chine de renoncer à aider Moscou contre les sanctions occidentales, lors d'un sommet virtuel, hier avec Pékin. Auparavant, le président Vladimir Poutine avait annoncé qu'il interdisait l'entrée sur son territoire aux dirigeants européens et à la majorité des eurodéputés, en réaction aux sanctions prises contre la Russie. Et il a prévenu les acheteurs de gaz russe des pays «ennemis» de stopper leur approvisionnement, une mesure destinée à soutenir le rouble qui affecterait principalement l'Union européenne, très dépendante. «Ils doivent ouvrir des comptes en roubles dans des banques russes. Et à partir de ces comptes, ils devront payer le gaz livré et cela dès demain», a-t-il déclaré. Le chancelier allemand Olaf Scholz a aussitôt répondu que les pays européens continueront de payer le gaz russe en euros et dollars comme cela est «écrit dans les contrats». Dans ce contexte, le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire, en déplacement à Berlin, a signalé que la France et l'Allemagne se «préparaient» à un potentiel arrêt des livraisons de gaz russe. Après cinq semaines de guerre, quatre millions de réfugiés ont fui l'Ukraine, auxquels s'ajoutent presque 6,5 millions de déplacés à l'intérieur du pays, selon l'ONU. L'ONG Human Rights Watch a de son côté appelé, hier, les autorités ukrainiennes à enquêter sur de potentiels «crimes de guerre» envers les prisonniers russes, après la diffusion d'images montrant des soldats ukrainiens leur tirant dans les jambes.