Après la réponse de Téhéran du 22 août, estimée négative, l'Iran a franchi, hier, un nouveau pas dans son bras de fer avec l'Occident. Il ne fait pas de doute que l'Iran n'est pas près de revenir en arrière dans sa volonté de maîtriser la technologie nucléaire en amont et en aval de sa pratique. Aussi, l'inauguration, hier, par le président iranien, Mahmoud Ahmadenijad, de la nouvelle usine de production d'eau lourde à Arak, au centre du pays, est induite comme un nouveau défi fait à l'Occident qui cherche depuis plus de deux ans à inciter l'Iran à arrêter (définitivement, dixit le président américain, George W.Bush) l'enrichissement de l'uranium et d'une manière plus générale la recherche dans le domaine nucléaire avec, en contrepartie, l'aide économique et scientifique de la part de l'Occident. De fait, l'Iran a jusqu'au 31 août (jusqu'à vendredi prochain) pour suspendre l'enrichissement de son uranium comme l'a exigé, en juillet, le Conseil de sécurité avant que de prendre des mesures plus draconiennes à l'encontre de l'Iran. En inaugurant, hier, l'usine ultramoderne de production d'eau lourde à Arak, qui servira au réacteur nucléaire controversé en construction à proximité de la nouvelle usine, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, met un peu plus la pression sur l'Occident tout en réitérant, lors de sa conférence inaugurale de l'usine, le «droit» de l'Iran à la technologie nucléaire. Un droit réaffirmé tout au long de ces derniers mois par les dirigeants iraniens à tous les niveaux de responsabilité. Alors que l'inauguration de l'usine d'Arak intervient à quelques jours de l'expiration (le 31 août) du délai donné par le Conseil de sécurité à Téhéran pour arrêter l'enrichissement de l'uranium. M.Ahmadinejad a, d'emblée, déclaré que l'«on ne peut priver aucun peuple de ses droits, et le peuple iranien défendra avec force ses droits» à la technologie nucléaire. L´eau lourde de l´usine sera utilisée comme liquide de refroidissement et comme fluide modérateur de l´activité du réacteur expérimental de 40 MW, qui doit être achevé en 2009. Un responsable de l'usine qui s'exprimait sous le couvert de l'anonymat a indiqué que «la production d´eau lourde a commencé le 20 (du mois iranien) Tir (soit le 11 juillet)» Donnant quelques précisions, le directeur du nouvel ouvrage, Manouchehr Maddadi, a indiqué qu'elle est équipée «de deux unités de production assurant une production totale de 16 tonnes d´eau lourde par an». Evidemment, l'entrée en fonction de l'usine d'Arak va encore accentuer la suspicion occidentale quant à la destination de la recherche nucléaire iranienne. C'est justement le fait que l'´Aiea (agence onusienne de sûreté nucléaire) n'a pu déterminer l'objectif du programmes nucléaire iranien (civil? militaire?) qui a fait douter l'Occident et Israël quant à la sincérité de Téhéran sur son programmes nucléaire. La technologie des réacteurs à eau lourde a été utilisée par plusieurs pays pour obtenir la bombe atomique, notamment l´Inde et le Pakistan. Israël et la Corée du Nord sont réputés y avoir eu recours pour obtenir une capacité nucléaire militaire, rappelle-t-on. Depuis quelques jours, en fait, Téhéran préparait l'opinion publique internationale à l'annonce de «nouveaux succès nucléaires» marquée par l'inauguration de l'usine de production d'eau lourde d'Arak. De fait, le porte-parole du gouvernement iranien, Gholamhossein Elham, a indiqué, vendredi, que «dans le domaine nucléaire, nous avons fait des progrès et obtenu de nouveaux succès scientifiques qui seront annoncés bientôt». L'inauguration de l'usine d'Arak -qui vient quelques jours après la réponse (jugée négative) à l'offre de coopération des grandes puissances (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne, France, Russie et Chine)- ne va pas améliorer les relations plus que tendues entre les dites grandes puissances et l'Iran plus que jamais déterminé à faire respecter son «droit» au nucléaire. Contournant l'exigence de suspension de l'enrichissement de l'uranium, l'Iran a fait le 22 août une contre-offre en appelant à des «négociations sérieuses» pour mettre un terme à la crise du nucléaire pendante depuis plus de deux ans. Alors que l'inauguration de l'usine d'Arak sonne comme un nouveau défi lancé à la face de l'Occident, l'Iran se dit prêt à toutes les éventualités parmi lesquelles de possibles sanctions (économiques et financières notamment). L'Iran était «prêt à affronter toute situation» a déclaré, mercredi, le porte-parole du gouvernement. M.Elham a, en effet, indiqué: «Nous attendons une réaction logique et juste des grandes puissances (mais) nous sommes prêts à affronter toute situation» et d'ajouter: «S´il n´y a pas de cadre international et de climat propice à des négociations justes, nous réagirons en conséquence». En inaugurant en grande pompe l'usine d'Arak, l'Iran, tout en franchissant un nouveau pas dans son bras de fer avec l'Occident, dit aussi sa détermination d'aller à l'avant et de défendre le droit qu'il estime le sien de poursuivre ses recherches sur le nucléaire comme celui de disposer de la technologie nucléaire.