Les propositions de courtes périodes de transition suggérées par l'Algérie et le Nigeria attendent une réponse des militaires au pouvoir depuis un mois à Niamey, alors que se joue un bras de fer diplomatique avec la France dont l'ambassadeur refuse de quitter le pays malgré l'injonction du CNSP. Tandis que la Cédéao maintient une certaine fermeté aussi bien en terme de sanctions que d'exigences du retour au pouvoir du président élu Mohamed Bazoum, l'initiative algérienne est désormais appuyée par celle du Nigeria dont le président Bola Ahmed Tinubu est également président en exercice de la Communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest. Les deux pays voisins du Niger ont ouvert la porte à une éventuelle transition qui permettrait de sortir de l'ornière. Quelques jours plus tôt, l'Algérie a dévoilé un plan précis qui permettrait aux dirigeants du CNSP d'engager «une transition de six mois sous la tutelle d'une autorité civile», gage d'un retour progressif à la légalité constitutionnelle. À ce jour, les dirigeants militaires conduits par le général Abderrahmane Tiani maintiennent leur proposition initiale d'une transition de trois ans maximum, rejetée par la Cédéao et l'Union africaine. La tension entre Niamey et Paris est extrême, les militaires ayant manifesté leur intention d'expulser l'ambassadeur de France Sylvain Itté dont ils ont retiré l'immunité et le visa diplomatiques. Dans un courrier transmis au Quai d'Orsay, ils ont formellement exigé le départ du diplomate mais l'Elysée a argué, une fois de plus, d'une décision nulle parce qu'émanant d'une autorité illégitime qui n'a aucun pouvoir pour formuler une telle requête. Ce bras de fer intervient alors que l'ultimatum du 3 août par lequel le CNSP mettait fin aux accords militaires avec la France arrive à expiration et que le sort des 1500 soldats français, basés au Niger, se pose avec acuité. Une coalition de sociétés civiles, le M62, rejetant la présence militaire française, a appelé à des manifestations hier, aujourd'hui et demain, dans la capitale pour exiger leur départ. Un Front patriotique pour la souveraineté du Niger (FPSN), a annoncé en outre un «sit- in permanent», dès aujourd'hui, «jusqu'au départ de tous les soldats français». Au Gabon où le putsch est regardé d'une tout autre manière, les premières décisions des nouveaux dirigeants du pays sont guettées avec avidité. Aussi bien l'UE et son chef de la diplomatie que l'Allemagne ont déjà donné le ton occidental, estimant que la mise à l'écart d'Ali Bongo était «précédée par un coup d'Etat institutionnel car les élections (avaient) été volées». Et de considérer que le contexte de crise au Gabon et celui dans d'autres Etats africains ne revêtent aucune «équivalence». Il n'empêche, les scènes de liesse sont partout les mêmes, et les cris de joie des populations depuis Bamako, Ouagadougou et Conakry jusqu'à Niamey et Libreville ont pour résonance le sentiment d'une libération, synonyme d'une nouvelle fête de l'indépendance. Ainsi, se dessine, selon toutes les populations concernées, lentement mais sûrement, la fin de la Françafrique dans un continent qui a longtemps subi une domination coloniale effroyable.