Point d'appui de la Chine pour son déploiement en Afrique, l'Algérie a réussi le tour de main de s'imposer comme l'un des pôles les plus intéressants en matière de croissance économique. Les 4,1% annoncés par le ministère des Finances et confirmés par le FMI et la Banque mondiale est un véritable appel des institutions de Bretton Woods aux économies occidentales pour investir dans une économie qui, en plus d'être dynamique, se donne les moyens de l'émergence grâce à un soutien fort de la deuxième puissance économique mondiale. Les signaux ne trompent désormais personne. Les mégaprojets initiés récemment à l'image des trois mines de fer, de zinc et de phosphates, l'interconnexion électrique avec l'Europe via l'Espagne, les usines d'énergie solaire, l'immense ferme d'élevage de vaches laitières à 3,5 milliards de dollars d'investissement et bien d'autres gigantesques chantiers augurent d'un développement exponentiel de l'économie du pays. Cette émergence des industries lourdes que l'Algérie a voulu intégrer à travers la transformation localement des minerais démultiplie l'attractivité du pays. L'Exécutif ne s'y trompe pas et saisit l'opportunité pour monter dans l'échelle des valeurs et proposer aux investisseurs un projet à peine imaginable, il y a quelques années. À l'exception du président Tebboune qui a évoqué le sujet en 2021, peu d'observateurs croyaient possible la fabrication de véhicules électriques en Algérie. Grâce à l'intérêt formulé par la Chine, c'est désormais envisageable. Ça l'est tellement que l'Agence pour la promotion et la rationalisation de l'utilisation de l'énergie (Aprue) a confirmé une aide financière adressée aux entreprises désireuses d'investir dans des véhicules électriques neufs. Un «avis à manifestation d'intérêt» en direction de «l'ensemble des concessionnaires nationaux agréés de voitures», a été lancé par l'Aprue. Cette démarche, certainement concertée, vient rappeler l'intention de la Chine, révélée par son président Xi Jinping, d'ouvrir en Algérie une usine de batteries de lithium. Les Chinois ne font pas dans la charité. Ils connaissent le potentiel de l'Algérie et le rôle qu'elle peut jouer dans l'ambition de Pékin de dépasser les Etats-Unis. La guerre économique sino-américaine se déroulera en Afrique. Les compagnies pétrolières US, ainsi que d'autres géants de l'agroalimentaire se bousculent déjà au portillon et affichent des intentions fermes d'investissement dans le gaz, l'agriculture intensive. Les Turcs, les Italiens, les Russes ne sont pas en reste. Il serait fastidieux de noter tous les projets initiés par ces partenaires, mais il est entendu qu'avec ses réserves de change estimées à 69 milliards de dollars, avec une prévision à 85 milliards de dollars, la bonne tenue de son infrastructure de base, son désendettement et le grand avantage comparatif dont elle bénéficie dans les énergies et les ressources humaines, l'Algérie est une très sérieuse destination. Ce positionnement économique et géostratégique qui fait d'elle un partenaire rêvé tant pour l'Occident que pour l'Asie du Sud-Est, confère à l'Algérie une posture de leader naturel de l'Afrique. Troisième puissance économique, bientôt deuxième et pourquoi pas première du continent, l'Algérie joue un rôle central dans l'émancipation de l'Afrique. Le déploiement de ses banques en Afrique de l'Ouest, les investissements engagés par Sonatrach et Sonelgaz aux quatre coins du continent et son influence directe dans la Banque africaine de développement (BAD) en font un acteur incontournable. Les récentes rencontres de la BAD et du Fonds africain de développement (FAD) ont révélé une Algérie volontariste dans le soutien des économies africaines, en dehors du FMI et de la BM. Les agences de notation envisagées par la BAD, le milliard de dollars consenti par le président de la République pour l'aide au développement de pays africains et le concours direct dans la mise en place de la Zlecaf, donnent à l'Algérie le rôle qui est le sien, à savoir un partenaire majeur susceptible de se placer, à terme, en alternative au FMI et à ses pressions. La visibilité désormais acquise, la rapproche de l'organisation de la coopération de Shanghai (OCS), qui ambitionne d'édifier des règles d'échanges commerciaux à même de permettre à l'ensemble de la communauté humaine de ne pas subir le diktat des puissants. Cette instance du nouvel ordre mondial multipolaire apporte à l'Algérie un supplément de moyens pour son émergence.